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par Francis PIAN • le 6 avril 2025

DES IDEES ET DES LUTTES: Les riches contre la planète

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« Dire la vérité n’est pas un crime ! »
Nous connaissons et nous aimons bien Monique Pinçon-Charlot dans notre émission Au fil des pages sur Radio libertaire. Ainsi nous l’avions invitée lors de la sortie de son livre Le méprisant de la République, chacune de ses phrases faisait mouche. Elle récidive toujours avec la même vivacité d’esprit dans Les riches contre la planète qu’elle sous-titre Violence oligarchique et chaos climatique publié comme le précédent aux éditions Textuel, collection petite encyclopédie critique. Et des critiques, il y en avait déjà dans le ton des ouvrages écrits avec son mari Michel Pinçon. Il faut rappeler combien tous deux furent des spécialistes de cette oligarchie décrite notamment dans Notre vie chez les riches, Mémoires d’un couple de sociologues (éditions Zones, 2021).

Les riches contre la planète pourrait constituer un manuel du militant dans les débats publics car maniable (180 pages) avec des textes courts regroupant des arguments, des chiffres, des références juridiques, techniques, scientifiques de nature à démonter l’assurance des technocrates, des industriels, des pollueurs et destructeurs de la planète Terre. A l’heure où les règlementations françaises et européennes pourtant faiblement protectrices de l’environnement sont remises en cause. A l’heure où la folie des dirigeants des Etats-Unis avec leurs complices à la tête de la plupart des Etats entend nier et développer le chaos climatique du monde. Il était bon, il était sain de trouver un ouvrage qui dénonce les faits et appelle à la mobilisation.

« Leur recherche de profits à tout prix »
Lisons Monique Pinçon-Charlot : « Appréhender simultanément dans leurs interactions réciproques, la violence des capitalistes avec leurs prédations des différentes formes du vivant et le chaos climatique engendré par leur recherche de profits à tout prix, est un pari fou et difficile à gagner. » Ce patchwork assumé permet au lecteur d’analyser « les agissements des membres de la classe sociale au somme des richesses à des faits précis, concernant par exemple les pesticides, Total Energie et ses liens avec l’Ecole polytechnique, ou la construction de l’A69 ».
Prévenus comme nous le sommes de cette quête du profit, « les profits « quoi qu’il en coûte » à l’humanité sont le nerf de la violence de classe ». Il est heureux de trouver une autrice qui n’hésite pas dans ces temps de banalisation de rappeler que la lutte des classes est une réalité. Même derrière la pseudo-lutte des Etats en faveur de la transition écologique, il existe un capitalisme vert car tout s’achète et tout se vend, y compris les droits à polluer. Parlons de « capitalocène » plutôt que d’anthropocène. Monique Pinçon-Charlot appelle à penser de façon multidimensionnelle. Les intérêts de classe sont défendus par les tenants du pouvoir et lorsqu’une disposition juridique, un espace naturel gênent la course au fric, la « Noblesse d’Etat », si bien définie par Bourdieu, se mobilise car les liens familiaux, amicaux facilitent la solidarité entre les différentes composantes de la classe dominante. Une dynastie de classe.

Lobbys et dynastie de classe
Au fil des pages, nous retrouvons le rôle des lobbys pour jeter le discrédit sur les travaux du GIEC ou de tout organisme qui a le malheur d’être indépendant. Il suffit de payer deux scientifiques chargés de créer le doute et l’étude perd de sa crédibilité. Stéphane Horel avait bien analysé la situation dans son livre Lobbytomie, Comment les lobbies empoisonnent nos vies et la démocratie (Ed. La Découverte, 2022).
Monique Pinçon-Charlot met notamment en relief le lobby de la chasse, l’affaire du glyphosate, celle du chlordécone, le poids de TotalEnergie.
En plus d’imposer leurs dégradations, les lobbys publics et privés poursuivent les défenseurs de l’environnement devant les juridictions. La plupart du temps, ces militants sont relaxés mais qui paie leurs frais de justice ? Encore une belle injustice ! C’est une des nouvelles méthodes pour bâillonner les contestataires. « Pourtant dire la vérité n’est pas un crime » s’affichait sur une banderole lors d’une manifestation. L’analyse de l’affaire de l’Agent orange répandu au Vietnam, l’opacité de la filière nucléaire montrent bien les alliances d’intérêts institutionnels et économiques.
Les instances internationales ne sont pas de nature à se mobiliser. Monique Pinçon-Charlot démontre l’ambivalence des instances européennes, tout comme l’hypocrisie des COP.
Face à ce constat, notre sociologue appelle à une mobilisation qui dépasse les nuances de chaque sensibilité, une coordination des luttes face aux inégalités de classe, aux inégalités entre les pays dues à « la collusion entre les élites politiques et les industries polluantes ».

• Monique Pinçon-Charlot
Les riches contre la planète
Violence oligarchique et chaos climatique
Ed. Textuel, coll. Petite encyclopédie critique, 2025

PAR : Francis PIAN
Groupe Commune de Paris
Emission Au fil des pages sur Radio libertaire

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