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par Francis PIAN • le 22 décembre 2024

Amazonie

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Mythe, mystères, réalité

L’Amazonie. Pour des générations, ce nom fut synonyme de mystères, d’aventures, de rencontres avec des civilisations disparues. Les récits de découverte des sources de l’Amazone, d’échanges avec des tribus isolées du monde, dotées d’une immense culture, d’osmose avec les plantes, les animaux, leur environnement, ont fait rêver des occidentaux.
Pourtant les légendes, les mythes ont caché la réalité de ce sous-continent comme l’appelle Marcio Souza dans son livre Amazonie de la période précolombienne aux défis du XXIe siècle publié en version française aux éditions Métailié en 2024. « Sa table des matières remonte loin dans le temps. L’auteur creuse dans la mémoire historique de l’Amazonie « d’avant les Européens ». C’est la plus formidable invitation aux voyages dans cette jungle immense, diverse et contradictoire. Et essentielle. » relève Éric Orsenna dans sa préface.

Une histoire et un avenir
En couverture, une photographie en noir et blanc de cette forêt avec un arbre qui s’en détache, au tronc noueux. Le lecteur urbanisé ne voit rien, là où l’autochtone sentira la vie. Marcio Souza est né à Manaus et enseignant, il s’est rendu compte que l’histoire de sa région était méconnue. Alors, il la raconte avec aisance, souplesse, la réhabilite et la projette dans l’avenir. Non, l’Amazonie n’apparaît pas qu’à la découverte des Amériques en 1492. Elle avait déjà une histoire. Et pour l’avenir ? Doit-elle être condamnée à la destruction par appât du gain ?

Les cartes en introduction de l’ouvrage démontrent que le biome amazonien ne tient pas compte des frontières des hommes, huit pays en plus du Brésil sont concernés par cette région contenant des forêts tropicales humides, d’autres montagnardes, de bambous, de palmiers et de savanes. S’appuyant sur les propos du syndicaliste Chico Mendes, l’auteur souligne « qu’on veut étiqueter le prix de chaque parcelle de terre. Mais comment mettre sur le marché l’identité du peuple amazonien, identité qui est aujourd’hui indissociable de sa culture et de son histoire ? » L’identité de l’Amazonie ? « Un corps composé de fleuves démesurés, de forêts brutalement saccagées, de peuples indigènes décimés, de la saga de personnages à la conquête de la nature. » Comme un appel à ses proches, « nous sommes amazoniens, fils de la forêt et des eaux », ces peuples oubliés.

Nous entamons avec Marcio Souza, le grand voyage dans le temps, le passage du Détroit de Béring, la descente vers l’Amérique du Sud. Qu’en est-il de la découverte par les peuples de l’Océan Pacifique, voire des Chinois ? N’y aurait-il de découvertes que par les Européens ? Des sociétés complexes se sont développées depuis les groupes de chasseurs cueilleurs jusqu’aux premiers horticulteurs. A l’arrivée des Conquérants, l’Amazonie n’était pas un désert démographique mais bien au contraire, occupée par des sociétés organisées avec une culture, une idéologie, des capacités de production. N’oublions pas que ces peuples furent massacrés et asservis par les armes, la poudre mais aussi par les maladies importées. Ils n’avaient rien à voir avec « l’âge de pierre ».

Une approche colonialiste
L’arrivée des Conquistadors est animée par l’or. Le mythe d’El Dorado, et les espagnols, les portugais se lancent dans des expéditions fascinantes à travers « l’enfer vert ». Rappelons-nous Aguirre, la colère de Dieu de Werner Herzog. Et puis, les Hollandais, les Français arrivent. Vous lirez ces pages oubliées, supplantées au profit de la Conquête de l’ouest d’Amérique du Nord. La révolte de la Cabanagem de 1835 à 1844 est révélée par ces pages. Et l’industrie se développe, le latex, le caoutchouc, la richesse déborde pour certains. « Je suis brésilien et j’ai de l’or » chante le Brésilien dans La vie parisienne d’Offenbach. L’exploitation est en route, on élimine les peuples, on détruit les cultures (110 langues ont disparu au XXème siècle). Une approche colonialiste exploite le quinquina, la coca… Les dictatures se succèdent. Dans ce vaste espace, l’exploitation par les multinationales suscite des projets absurdes comme la Transamazonienne. Des génocides s’organisent. Songeons au sort des Yanomami ou des Waimiri-Atroari. Vous découvrirez aussi le système extractiviste d’exploitation. « Malheureusement, le modèle économique brésilien s’obstine à détruire des richesses qui n’ont pas même été répertoriées, mû par un pur immédiatisme économique. »
En 2023 puis en 2024, l’Amazonie a connu de grandes sécheresses. « En plus d’être une alerte de la nature, c’est un cri venu se joindre aux protestations de la population native pour affirmer que personne, qu’aucune force politique ne sera capable de s’emparer de l’Amazonie. »

• Marcio Souza
Amazonie
De la période précolombienne aux défis du XXIe siècle
Ed.Métailié, 2024

PAR : Francis PIAN
Groupe Commune de Paris
Emission Au fil des pages sur Radio libertaire

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