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par Francis Pian • le 16 avril 2022

Des idées et des luttes, La révolution à venir

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De la résistance à la transformation sociale

Les éditions Agone nous livrent une compilation d’articles de Murray Bookchin consacrée à son évolution intellectuelle vers le communalisme. Attention, Bookchin n’est pas un anarchiste, il a un temps flirté avec cette sensibilité avant de s’en détacher énonçant des critiques assez fermes bien que s’appuyant sur l’expérience espagnole. Dans ce cas, pourquoi en parler ? Tout simplement parce que la commune en tant que regroupement humain de base, attire l’attention et l’intérêt de nombre de nos amis.

Qui est Bookchin ? « Auteur, essayiste et activiste prolifique, Bookchin a consacré sa vie à développer une pensée de gauche qui parle à la fois à celles et ceux qui se soucient de faire vivre un mouvement ou qui subissent des injustices sociales qu’un tel mouvement veut combattre. Le communalisme dépasse le stade de la critique en proposant un cadre dans lequel construire une société fondamentalement différente : une démocratie directe, anticapitaliste, écologique et opposée à toutes les formes de domination, une organisation sociale qui réalise les conditions de la liberté au moyen d’assemblées populaires reliées entre elles au sein d’une confédération. »

Une forme de trésor perdu
Bien sûr, il s’inspire des expériences passées. « Des comités de quartier de la Commune de Paris aux assemblées générales d’Occupy Wall Street et d’ailleurs, cette auto-organisation de conseils démocratiques, qui traverse l’histoire jusqu’à nos jours comme un fil rouge, constitue un immense potentiel. » Il s’agit là d’une forme de trésor perdu des traditions révolutionnaires qui constitue le fondement du projet politique de Bookchin. Pour lui, il s’agit bien de la base d’une approche socialiste libertaire de la démocratie directe.

Le titre de la compilation est éloquent : La révolution à venir, Assemblées populaires et promesses de démocratie directe, une bonne base pour alimenter la réflexion des militants. Il s’agit donc d’un aperçu de la philosophie politique de Bookchin ainsi que la description des formes d’organisation susceptibles de contrebalancer le pouvoir coercitif de l’État-nation, le tout regroupant neuf essais. En introduction, « le projet communaliste », l’auteur le situe par rapport aux autres idéologies de gauche, on peut regretter ses critiques à l’égard de l’anarchisme qui, selon lui, ne saurait pas évoluer. Pourtant la capacité d’intégrer des faits nouveaux démontre au contraire la la modernité et la présence de l’anarchisme au sein des luttes notamment en matière d’environnement sans se tromper d’adversaire. C’est justement en matière écologique que Bookchin soutient que la crise écologique est causée par un système social irrationnel, gouverné par la logique du capitalisme, dirigée par l’impératif compétitif du croître ou mourir et de production sans fin. Le choix entre les besoins des personnes et la course permanente du profit est d’une actualité rare.
Trois essais couvrent le champ organisationnel du communalisme. Comment un contrôle populaire exercé par des assemblées confédérées pourrait-il mettre fin à « l’isolement de l’économie en tant que sphère sociale distincte en l’employant à la satisfaction » des personnes ? Comment changer le contenu mais aussi la forme de la politique, « la faisant évoluer de son état actuel de pression où nous subissons l’oppression exercée par des politiciens honnis, vers un nouveau paradigme où la politique devient une démarche que nous, en tant que citoyennes et citoyens pleinement engagés, faisons pour nous-mêmes ».

Un ferment d’unité entre les humains
Un autre aspect intéressant de l’ouvrage réside dans l’analyse de la notion de ville. C’est important car nous vivons dans un monde urbanisé. Aujourd’hui, les habitants, soi-disant citoyens, deviennent de simples contribuables qui délèguent leur pouvoir par le vote. C’est toute l’interrogation de la dépossession du pouvoir de décider de sa vie et de son environnement. Reste la question de l’État-nation. Bookchin propose de dépasser le nationalisme par « une éthique libertaire et cosmopolite dans laquelle les différences culturelles seraient un ferment d’unité entre les humains ». Par ses critiques à l’égard des anarchistes espagnols dans leur rapport au pouvoir et plus globalement de l’anarchisme, Bookchin nous pousse à la réflexion et à la contestation argumentée de ses affirmations. Pour les auteurs de l’introduction, « le communalisme de Bookchin contourne l’impasse de l’opposition entre l’État et la rue, cette hésitation-oscillation traditionnelle entre les protestations de rue, puissamment émancipatrices mais éphémères, et l’entrée dans les institutions mêmes de l’Etat, conçues pour maintenir l’ordre présent ». Et de conclure : « Nous espérons donc que ses idées ne resteront pas enfermées dans ces pages, mais qu’elles inspireront la pensée et l’action qui nous permettront de passer de la résistance à la transformation sociale ».

Francis PIAN

Murray Bookchin, La révolution à venir. Assemblées populaires et promesses de démocratie directe.
Ed. Agone, 2022

PAR : Francis Pian
Groupe Commune de Paris

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