Histoire > Syndicalisme révolutionnaire et anarchisme (9e partie)
Histoire
par René Berthier • le 5 août 2019
Syndicalisme révolutionnaire et anarchisme (9e partie)
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ENTRETIEN DESTINE A L’INSTITUT D’ETUDES LIBERTAIRES DE RIO DE JANEIRO (EN COURS DE TRADUCTION)
Le syndicalisme révolutionnaire est apparu dans les années 1890 en France et s’est développé dans la plupart des pays pour devenir la principale force révolutionnaire. Il a subi une grave crise au moment de la Grande Guerre, puis il a réapparu au moment de la révolution russe qui provoqua dans le mouvement une profonde fracture entre le courant pro-communiste et le courant qui entendait maintenir les valeurs du initiales du mouvement. Les militants qui ont choisi de soutenir le bolchevisme disparurent en tant que syndicalistes révolutionnaires pour s’intégrer dans les partis communistes dont ils fournirent une partie de l’encadrement. En France cela posa de réels problèmes : la direction stalinienne du PC se plaignait dans les années 30 que les cadres intermédiaires de la CGT avaient tendance à ne pas suivre à la lettre les consignes du parti et à prioriser dans leur activité la logique syndicale plutôt que la logique de parti.
Le courant qui refusa de soutenir la dictature communiste réapparut progressivement sous la forme de l’anarcho-syndicalisme. La Seconde Guerre mondiale porta un coup terrible au mouvement, d’abord parce que de très nombreux militants furent tués par les régimes fascistes, par le stalinisme et même par les régimes démocratiques. La prééminence du modèle politique et syndical communiste et du mirage soviétique dans le mouvement ouvrier a aussi grandement contribué au déclin du mouvement dans de nombreux pays. Enfin, l’illusion que le système parlementaire allait pouvoir améliorer durablement la condition salariale a également été une des causes de la désaffection des travailleurs envers la lutte des classes.
Répondre à la question : « Peut-on se revendiquer du syndicalisme révolutionnaire aujourd’hui » nécessite de s’interroger sur les conditions de son apparition et sur les raisons de sa disparition en tant que mouvement de masse. Il faut aussi souligner les raisons pour lesquelles il est réapparu, dans les années 20 et 30, sous la forme de l’anarcho-syndicalisme afin de pouvoir décider de quel courant on veut se réclamer.
J’ai dit quelques mots sur les conditions de son émergence : la République formée après l’écrasement de la Commune se montra encore plus dure avec les Internationaux que l’Empire défunt ; la répression anti-ouvrière fut terrible. La classe ouvrière se montra catégoriquement opposée à cette République qui avait massacré les insurgés de la Commune, elle se montra également très réticente envers les multiples sectes socialistes divisées en de multiples partis concurrents, qui voulaient obtenir ses suffrages. C’est ce contexte qui favorisa l’émergence du syndicalisme révolutionnaire, qui se développa également dans de nombreux autres pays, selon le principe que les mêmes causes produisent les mêmes effets, à quelques variantes près.
Poser la question : peut-on se revendiquer du syndicalisme révolutionnaire (ou de l’anarcho-syndicalisme) aujourd’hui revient à se demander si les conditions aujourd’hui de la réapparition de ce courant sont les mêmes qu’au début du 20e siècle. Il ne me semble pas que ce soit le cas. En tout cas pas dans les formes qu’il avait prises à cette époque.
Après 1906 en France une succession de grèves dures avaient échoué et avaient été sévèrement réprimées. Les limites de la stratégie de confrontation permanente, en l’absence de perspective révolutionnaire, avaient été atteintes. Par ailleurs, au sein de la CGT un puissant courant réformiste grandissait. La tendance à accepter les médiations sociales finit par l’emporter à partir de 1908-1910 : négociations dans les conflits sociaux, stratégie parlementaire. La Charte d’Amiens fut en réalité le signe de cette modification de stratégie. Le reflux du mouvement syndicaliste révolutionnaire avant la Première Guerre mondiale ne fut pas le fait d’erreurs stratégiques de sa part mais le résultat d’évolutions en profondeur de la société auxquelles il ne pouvait pas s’opposer. La fin des querelles entre chapelles socialistes et l’unification du parti fournit une alternative légale et pacifique à la stratégie d’action directe du syndicalisme révolutionnaire, un autre pôle d’identification de la classe ouvrière. Le déclin du mouvement révolutionnaire en France suit très précisément la montée de la perspective parlementaire. Par contraste, le mouvement révolutionnaire perdura encore dans les pays comme l’Espagne où le moindre mouvement revendicatif était suivi d’une terrible répression, de l’assassinat de militants et où la troupe qui tirait sur la foule : l’ouvrier qui revendiquait était pratiquement obligé d’être révolutionnaire.
D’une façon générale, les militants révolutionnaires n’analysèrent pas vraiment les causes des modifications du comportement de la classe ouvrière confrontée à l’alternative « révolution ou réforme ». Bien entendu ils n’avaient pas suffisamment de recul. Pour expliquer le reflux du mouvement révolutionnaire, on accusa les manœuvres des politiciens qui trompaient la classe ouvrière, ou la passivité de cette dernière. Ainsi, James Guillaume, expliquant les raisons pour lesquelles il quittait la Suisse pour s’installer à Paris, écrivit : « Sur les bords du Léman, à Genève, à Lausanne, à Vevey, malgré les efforts de quelques camarades dévoués, nous n’avions pas avec nous la masse ouvrière, trop disposée à se laisser égarer par les politiciens [note] . »
Je pense que la plus grande carence du mouvement libertaire d’aujourd’hui, l’une des principales raisons de son caractère extrêmement minoritaire, réside dans l’absence d’analyse sur la signification et les conséquences de l’instauration du régime représentatif dans les sociétés modernes.
Ces quelques précisions me semblaient nécessaires pour montrer que les circonstances qui ont vu l’apparition du syndicalisme révolutionnaire ne sont pas reproductibles. Pendant l’apogée du mouvement, peu de confédérations syndicales pouvaient être qualifiées de « syndicalistes révolutionnaires » : la plupart des militants syndicalistes révolutionnaires étaient organisés en tendances à l’intérieur d’organisations réformistes. C’est la raison pour laquelle le refus de la CGT de participer au congrès international syndicaliste révolutionnaire en 1913 provoqua un tel choc : elle était la seule organisation de masse considérée comme syndicaliste révolutionnaire [note] . Aujourd’hui, il me paraît guère réaliste d’imaginer la création d’organisations de masse hégémoniques dans la classe ouvrière telles que le furent la CGT française dans les années 1890-1900, la CGT portugaise ou la CNT dans les années 1920-1930.
La reconstruction de la CNT en Espagne après la mort de Franco a soulevé de nouveau le problème du rapport entre anarchisme et syndicalisme, un problème qui a parcouru toute l’histoire du syndicalisme révolutionnaire sans vraiment trouver de solution. La reconstitution de la CNT espagnole en 1976 n’a pas non plus trouvé de solution et a abouti à une scission et à la création de la CGT, qui ne constitue aujourd’hui en Espagne qu’une alternative syndicale parmi d’autres. En France ceux qui se réclamaient de l’héritage de la CGT-SR ont tenté de créer une organisation après la guerre; ils ont accumulé les erreurs stratégiques, ils ont voulu faire une « CNT à la française » en dépit de toute analyse du contexte, et soixante ans plus tard ils sont divisés en quatre ou cinq courants opposés qui ne dépassent pas le niveau de groupes infinitaires.
On peut faire le même constat dans à peu près tous les pays.
Il y a encore un dernier point qu’il faut soulever avant de répondre à la question « peut-on se revendiquer du syndicalisme révolutionnaire aujourd’hui » ? L’un des fondements du syndicalisme révolutionnaire a été le principe de la neutralité syndicale. Dans un premier temps cette neutralité était comprise comme un principe actif, dynamique : le syndicat ne s’occupait pas de la politique parlementaire des partis mais, en vertu du principe : « le syndicat suffit à tout », il s’autorisait à prendre position sur toute question politique en toute indépendance. Il ne s’interdisait aucun champ d’intervention, au point que de nombreux groupes anarchistes en étaient arrivés à considérer que les syndicats étaient des concurrents pour les organisations politiques.
La montée du courant réformiste dans la CGT a fait basculer ce concept de « neutralité » [note] . A l’origine, le concept de neutralité allait de pair avec l’idée d’autonomie, ou d’indépendance syndicale, ce qui signifiait que l’organisation syndicale se réservait le droit de prendre position sur tout sujet qu’elle considérait comme important, y compris des questions réputées « politiques ». La notion de « rien n’est étranger au syndicat » est une notion qui est parfaitement cohérente avec les positions de cette partie du mouvement anarchiste qui a adhéré à l’action syndicale et qui y a vu la forme par laquelle l’action anarchiste devait s’exercer. Mais ce point de vue a également suscité l’opposition très ferme d’une autre partie du mouvement anarchiste qui se voyait ainsi dépossédée de son champ d’intervention.
Par ailleurs, l’examen attentif des débats du congrès d’Amiens de 1906 montre l’ampleur de l’assaut réformiste en vue de retirer à l’idée d’autonomie syndicale toute substance. C’est ainsi que la direction confédérale se vit reprocher de ne pas respecter l’« apolitisme » confédéral parce que la propagande anti-religieuse ne respectait pas les croyances de nombreux adhérents de la confédération. De même, « lorsque vous votez la grève générale expropriatrice […] vous ne respectez pas les opinions du radical. Pas plus, vous ne respectez les opinions du nationaliste lorsque vous faites de l’antipatriotisme et de l’antimilitarisme [note] . » On est là dans une perspective de « neutralité » au sens le plus étroit du mot, pas dans le sens où l’organisation syndicale peut décider de toute orientation, fût-elle politique, du moment qu’elle émane du syndicat lui-même et pas d’une instance extérieure.
C’est cette conception restrictive du neutralisme et de l’« apolitisme » syndical qui a fini par dominer à la CGT après le congrès d’Amiens en 1906 : il n’est désormais plus question de lutte contre l’État, contre l’armée, contre le parlementarisme. C’est dans ce sens que je considère que la résolution d’Amiens ne fut pas, contrairement à l’idée communément admise, l’exposé-type de la doctrine syndicaliste révolutionnaire, elle fut au contraire l’expression du début de son reflux. On comprendra donc que ce n’est pas de ce syndicalisme révolutionnaire-là qu’on se référera aujourd’hui. On lui préférera l’anarcho-syndicalisme qui a pris en quelque sorte sa succession en réaffirmant sans ambiguïté la prééminence de l’organisation de masse sur l’organisation politique.
Si on ne peut guère espérer reconstituer dans sa forme un mouvement de masse syndicaliste révolutionnaire tel qu’il existait au début du 20e siècle, on peut en revanche définir quelles sont les valeurs du syndicalisme révolutionnaire qu’il faut s’efforcer de diffuser afin de reconquérir l’espace perdu, ou une partie substantielle de celui-ci. Les militants d’aujourd’hui peuvent retenir un certain nombre de principes fondamentaux sur lesquels s’appuyer pour engager la reconquête, ne serait-ce que partielle, du terrain perdu. Ces principes sont énoncés par Ralph Darlington [note] , qui souligne que le syndicalisme révolutionnaire présentait un certain nombre de constantes dans ses différentes manifestations internationales :
• La lutte des classes ;
• L’opposition au parlementarisme et à l’État ;
• L’indépendance par rapport aux partis politiques ;
• Le syndicalisme comme instrument de la révolution ;
• L’action directe ;
• La grève générale ;
• Le contrôle ouvrier ;
• L’antimilitarisme ;
• L’internationalisme.
A ces principes, j’ajouterais que les militants d’aujourd’hui devraient insister particulièrement sur l’idée de contrôle des mandats, de rotation des mandats et de révocabilité.
Insistons tout particulièrement sur l’idée qu’une transformation en profondeur de la société ne pourra être faite que par l’organisation de classe des travailleurs, c’est-à-dire par l’organisation qui regroupe les travailleurs à partir de leur rôle dans le processus de production, aujourd’hui une organisation de lutte pour l’amélioration des conditions d’existence des travailleurs, demain organe de reconstruction d’une société émancipée.
*
Anarcho-syndicalisme et anarchisme. Tactique et intervention syndicale.
Rapport de Pierre Besnard, Secrétaire de l’AIT au Congrès anarchiste International de 1937 (extraits)
(http ://monde-nouveau.net/IMG/pdf/rapport_de_pierre_besnard_1937.pdf
Le rôle des Groupes anarchistes et des Syndicats
Ce qui précède nous conduit normalement et logiquement à envisager le rôle des groupes anarchistes et des syndicats.
Les anarchosyndicalistes admettent parfaitement que les groupes anarcho-communistes, plus mobiles que les organisations syndicales, prospectent les masses travailleuses ; qu’ils recherchent ses adhérents et forment des militants ; qu’ils fassent une propagande active et œuvre intense de défrichement, dans le but d’amener à eux, et conséquemment, aux syndicats anarchosyndicalistes, à la cause de la révolution sociale, le plus grand nombre possible de travailleurs trompés et dupés, jusque-là, par tous les partis politiques, sans exception.
Cette tâche purement idéologique. cette besogne de propagande d’ordre moral sont, incontestablement, du ressort des groupes anarchocommunistes, à la condition expresse qu’elles s’identifient avec le travail des syndicats anarchosyndicalistes, qu’elles le complètent et le renforcent, pour le plus grand bien du communisme libertaire.
Mais je déclare carrément que la responsabilité de la décision, de l’action et le contrôle de celles-ci doivent appartenir actuellement aux syndicats, agents d’exécution et de réalisation des tâches révolutionnaires.
J’estime également que c’est à ces syndicats qu’il incombe de présenter toutes ces tâches, sur le plan économique, défensif et offensif.
Enfin, je considère que le système économique, administratif et social doit être homogène, harmonique, et que la base de ce système, pour être réelle, solide et durable, ne peut être qu’économique.
Je revendique comme un droit pour les syndicats l’accomplissement des tâches économiques révolutionnaires et postrévolutionnaires parce que l’organisation de la production est la véritable fonction des travailleurs.
Par contre, il est logique que les communes, organes administratifs, leurs services techniques et sociaux aient le soin de distribuer la production ; d’interpréter les désirs des hommes sur le plan social, d’organiser la vie dans toutes ses manifestations. Dès maintenant, les groupes anarchistes ont pour devoir de préparer ces réalisations révolutionnaires [note] .
La besogne de chacun des organismes est donc extrêmement nette, parfaitement délimitée. Elle suffira largement à accepter sur chaque plan l’activité et les efforts de tous, selon les attributions réelles de chacun.
À aucun moment, j’en donne l’assurance la plus formelle, les syndicats anarchosyndicalistes ne pourront constituer un obstacle à la marche en avant du communisme révolutionnaire.
À aucun moment, non plus, ils ne pourront devenir réformistes, parce qu’ils sont et resteront révolutionnaires, fédéralistes et anti-étatistes, parce qu’ils visent, en un mot, comme les groupes anarcho-communistes, à instaurer le communisme libertaire.
En conclusion de cette partie de mon exposé, j’affirme :
1° Que le mouvement anarchosyndicaliste ne peut dévier, en raison du contrôle permanent et sévère qui s’exerce sur les organisations et les militants ;
2° Que le mouvement anarchosyndicaliste, épuise, sur le plan actuel, dans le domaine révolutionnaire, les moyens de réalisation du communisme libertaire. Qu’il appartient aux groupes anarcho-communistes, sur le plan exclusivement idéologique, de porter la propagande aussi loin que possible ;
3° Que le mouvement anarcho-communiste doit s’intéresser surtout aux tâches de propagande et d’éducation ; d’étude et de vulgarisation social ;
4° Que le meilleur contact permanent qui puisse être réalisée sera, comme en Espagne, par l’adhésion sans restriction de tous les anarchocommunistes, dans tous les pays, aux syndicats anarchosyndicalistes, chargés de la préparation et de l’exécution de l’action, seuls capables de mener celle-ci à bonne fin, avec des effectifs et des moyens suffisants ; que la doctrine expérimentale de l’anarchosyndicalisme, qui est celle de l’anarchisme lui-même, est assez solide et ferme pour ne pas risquer aucune atteinte, atténuation ou déviation.
5° Que l’anarcho-communisme, véritable figure du socialisme, est né de la carence totale de tous les partis politiques ; que l’anarchosyndicalisme, forme moderne et active de ce mouvement, issu lui-même de l’anarchisme, remplit présentement toutes les tâches positives de l’anarcho-communisme et prépare les voies du communisme libertaire dont il sera le principal agent de réalisation ; que les tâches de l’anarcho-communisme – comme celles de l’anarchosyndicalisme – s’épuiseront dans la période postrévolutionnaire quand les hommes, par leur évolution et le développement de leurs facultés de compréhension, seront capables d’accéder au communisme libre, finalité de l’anarchie.
En résumé, l’anarchosyndicalisme est la force nécessaire de lutte, dans le régime actuel, de l’agent de réalisation économique du communisme libertaire, dans la période postrévolutionnaire.
L’anarchisme aide le mouvement anarchosyndicaliste, sans se substituer à lui.
L’activité de ses militants se confond, dans les syndicats, avec celle des militants anarchosyndicalistes.
Les deux mouvements se doivent donc une aide mutuelle et permanente.
Et, plus tard, dans la paix, la concorde et l’harmonie, l’anarchisme et l’anarchosyndicalisme, confondus dans un même mouvement, poursuivront la réalisation du communisme libre, but suprême de l’anarchie.
La tâche la plus urgente de l’anarchosyndicalisme est aujourd’hui d’organiser dans son sein les travailleurs en vue de la lutte décisive contre le capitalisme ; de préparer techniquement cette lutte, d’opérer la synthèse des forces de la production pour la construction révolutionnaire de l’ordre communiste libertaire ; et, demain, de l’organisation économique, et cela, jusqu’à l’instauration du communisme libre ; de défendre, enfin la révolution.
Celle de l’anarchisme révolutionnaire consiste à aider de toutes ses forces à leur accomplissement par tous les moyens dont il dispose.
Rapports de l’anarchisme et de l’anarchosyndicalisme
De toute évidence, des rapports doivent exister entre l’anarchisme et l’anarchosyndicalisme, tant sur le plan national qu’international. L’A.I.T. a, d’ailleurs, prévu cette éventualité dès son Congrès constitutif.
Ces rapports doivent être basés sur l’indépendance et l’autonomie réciproque des deux mouvements et demeurer sur le plan de la plus parfaite égalité.
En dehors de la copénétration des deux mouvements, par l’action de leurs militants, il est souhaitable que dans chaque localité, chaque région, chaque pays, des contacts s’établissent entre les organisations anarchistes et anarchosyndicalistes.
Pour être féconds et durables, ces rapports devront reposer sur les bases d’une tolérance mutuelle, facilité par une identité de doctrine sur tous les plans, et une compréhension exacte des tâches qui incombent aux deux mouvements.
Ces tâches sont suffisamment définies par le présent rapport pour ne pas prêter à confusion et à chevauchement.
1° L’unité de doctrine des anarchistes dans chaque pays ;
2° L’unification, également dans chaque pays, des groupements anarchistes, sur le plan de la doctrine unique de l’anarchisme révolutionnaire.
Conclusions générales
Quels que soient les désirs du Congrès et ceux de l’A.I.T. de réaliser pratiquement ces rapports, ils ne pourront y parvenir, comme l’exigent les événements, si ces ceux conditions n’étaient pas remplies préalablement par les mouvements anarchistes dans chaque pays.
Il eût été infiniment préférable et aussi conforme à nos principes connus qui sont ceux du fédéralisme, que cette unité de doctrine et cette unification de forces anarchistes fussent réalisées avant la tenue du Congrès qui doit donner naissance à l’Internationale anarchiste.
Au nom des anarchosyndicalistes qui ont atteint ce double but par la constitution de l’actuelle AIT depuis 1922, je demande instamment à tous nos camarades anarchistes révolutionnaires de nous suivre dans cette voie.
S’ils acceptent tous, l’Internationale qui sortira de ce Congrès méritera le titre qu’ils lui donneront certainement et qui ne peut être que : L’Internationale anarchiste révolutionnaire – et j’y insiste – ils atteindront ce but sans difficulté.
Il suffit, mais il faut, qu’ils acceptent tous de rompre définitivement avec les forces prétendues démocratiques tant politiques que syndicales ; qu’ils affirment que l’anarchisme révolutionnaire, par ses buts, ses moyens d’action, sa doctrine, n’a rien et ne peut rien avoir de commun avec ces forces dites « démocratiques » qui sont, dans tous les pays, les meilleurs serviteurs du capitalisme [note] .
Si, poussant ce geste jusqu’à sa limite, le mouvement anarchiste révolutionnaire rompt également avec toutes les dissidences des partis politiques autoritaires qui, comme leurs partis originels, n’ont qu’un désir : prendre ou reprendre le pouvoir, le mouvement anarchiste révolutionnaire et le mouvement anarchosyndicaliste pourront marcher sans crainte et de pair vers leur but commun : la transformation sociale révolutionnaire par l’établissement du communisme libertaire, étape nécessaire du communisme libre.
Secrétaire général de l’AIT
Pierre Besnard
PAR : René Berthier
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