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Littérature
par Patrick Schindler le 29 juillet 2024

Le raout du rat (noir) en août

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En août, petit focus grec oblige en compagnie d’Iakovos Kambanellis, de sa pièce de théâtre Les quatre pieds de la table, suivie de son incontournable récit concentrationnaire : Mauthausen. Toujours en Grèce, dans une autre veine : Carnets de garde de Spyros Tsovilis. Russie tsariste : petit échantillon des Fables de Léon Tolstoï. Retour dans les Balkans avec Le Derviche et la mort de Meša Selimović et Le pays maudit de Svetislav Basara ; Enfin, dernier volet de notre voyage dans les étoiles : Les météorites, messagères de l’espace de Bernard Melguen.



Marcelin Grassi, München museum, photo Patrick Schindler

« Plus un chercheur trouve, moins il a de temps pour connaître sa nouvelle ignorance » …
Henri Michaux

Iakovos Kambanellis




Iakovos Kambanellis est né en 1921, sur l’île de Naxos. Poète, dramaturge, scénariste et romancier, il est le sixième des neuf enfants d’une famille nombreuse. Kambanellis est rapidement apparu comme l’un des dramaturges grecs les plus éminents du XXe siècle et considéré comme le père du théâtre grec moderne. En tant que survivant du camp de concentration de Mauthausen-Gusen, il a écrit, outre ses souvenirs du camp, les paroles de la Trilogie de Mauthausen sur la musique de Mikis Theodorakis. Il est également l’auteur de pièces de théâtre, de scénarios et d’une centaine de chansons. Il est seulement reconnu officiellement en 2000, élu membre de l’académie d’Athènes. En 2011, Kambanellis transporté d’urgence à l’hôpital en raison d’une insuffisance rénale, décède à l’âge de 89 ans.


Les quatre pieds de la table



Au début de la pièce Les quatre pieds de la table (éditions Le Miel des Anges, traduction Hélène Zervas et Michel Volkovitch) d’Iakovos Kambanellis (déjà croisé à deux reprises dans les chroniques du Rat noir de mars et de juillet 2023 – faire une recherche dans le cadre ad’hoc sur le site du Monde libertaire), nous nous trouvons dans la chambre où est en train d’agoniser Asimakis Kavalas, un riche industriel grec de 99 ans.
A son chevet : les deux aînés de ses sept enfants. Costas et Aliki (qui considèrent que leurs frères et sœurs sont « des ingrats et de voraces et ambitieux assoiffés ») font le point en essayant de ne pas parler trop fort de l’état de leur père pour ne pas être entendus des autres de la fratrie, rassemblés dans la pièce à côté. Surtout en ce qui concerne les conséquences de la mort prochaine du patriarche et le démantèlement du patrimoine familial qu’ils doivent se partager entre héritiers. Alors, quoi faire pour limiter le massacre et sauvegarder un semblant de cohésion familiale ? Changer le testament du père ? Arranger sa biographie ?
Savoureuse petite pièce bondé d’un humour glaçant, féroce et macabre. D’autant plus crédible lorsque l’on sait que les faits évoqués sont issus de l’histoire d’une famille grecque bien réelle. Univers machiste et violent où à travers leurs sous-entendus et piques permanents, on lit « à livre ouvert » au fin fond de l’intimité de chacun des protagonistes. Circonvolutions, coalitions, trahisons, jeux de rôle. Et si, contre toute vraisemblance, après ce grand déballage mortifère, la solution consistait tout simplement à trouver d’autres « têtes de Turcs » ?

Mauthausen



Dans son avant-propos à la première édition de Mauthausen (trad. Solange Festal-Livanis) datant de 1963, Iakovos Kambanellis explique les raisons pour lesquelles il avait mis vingt ans avant de se décider à écrire sur les conditions de sa détention à Mauthausen.
Dans l’avant-propos de la deuxième édition datant de 1995, il nous révèle pourquoi trente ans plus tard, il se mit à tout réécrire, mais cette fois-ci en se polarisant sur les trois mois qu’il passa du 5 mai (date de l’arrivée des Américains dans le camp) à la mi-juillet 1945, avec les quelques milliers de Juifs et autres prisonniers politiques avant que ces derniers soient renvoyés au compte-goutte, dans leurs pays d’origine. Et pour les Juifs le désirant, gagner la Palestine dès que les accords internationaux leur en donneraient la possibilité. Et c’est là ce qui fait la grande originalité de ce récit. Personne encore ne l’avait fait avant lui.
C’est alors que Kambanellis replongea dans ses notes après avoir lu les ouvrages de Vassilis Vassilikos et Hans Marsarek qui lui avaient permis de découvrir beaucoup de choses qu’il ignorait. Entre ces dates, Kambanellis s’était passionné pour le théâtre (voir plus haut, ainsi que les Rat noir de mars 2023 et juillet 2023 -faire une recherche dans le cadre ad’hoc du site du Monde libertaire).

Le récit (révisé) de 1995 commence ainsi : « C’était en avril et c’était en 1945. Nous avions fini par le savoir : la guerre allait se terminer… Les signes étaient nombreux. Les haut-parleurs installés dans nos barraques braillaient les communiqués de la Wehrmacht, les discours d’Hitler s’étaient tus depuis longtemps. Le ciel crépitait des centaines de bombardiers américains et les SS les pourchassaient de leurs jurons et se mettaient à blaguer jusqu’à être pris d’un fou rire nerveux. Ambiance surréaliste délétère où les SS désemparés n’en réduisaient pas pour autant le rendement des chambres, même si le gaz et le fuel commençaient à manquer ».
Dans un style simple et sans fard, l’auteur va nous décrire au jour le jour les changements advenus dans le camp de Mauthausen, à partir de la fuite précipitée des derniers SS devant l’arrivée des Alliés, le 5 mai. Scènes d’horreur, revanches, lynchages, SS qui croient faire des compliments aux Russes en leur disant qu’ils les haïssent autant que les Juifs (!) etc.
Une scène hallucinante : la première sortie des prisonnières vouées aux bordels des SS. Et les questions qui fusent de toute part. Courtes heures « d’euphorie souvent outrées, avant de se mettre au travail ». Dans chaque groupe de déportés de tous pays, des représentants sont élus (l’auteur pour les Grecs, qu’ils soient juifs ou non). Quelles seront leurs missions auprès des dirigeants de l’armée américaine et de la Croix rouge internationale ? Régulièrement, Kambanellis ne peut s’empêcher, pour la vraisemblance du récit, de faire des flash-backs (grâce à ses notes conservées et prises sur le vif) et nous livrer quelques-uns des cauchemars récurrents ou des angoisses de ses compagnons de détention. Certains parlent, d’autres n’aspirent qu’à la vengeance, beaucoup se taisent.
Une foule de précisions sur l’organisation des camps, les hiérarchies entre déportés, les quarantaines, le déni, la maladie et la mort omniprésentes. Témoignage historique sur « la grande évasion », (ou plus exactement « la grande boucherie », selon l’auteur) des 80 Russes ayant réussi à s’évader du camp. Quelle fut leur fin ?
A découvrir : les rapports difficiles entre les déportés et la population civile du village voisin du camp. « Etaient-ils tous des nazis ou leurs complices ? » Au passage, on en apprend aussi beaucoup sur les phobies d’Himmler et autres. Récit émouvant sur le départ des Espagnols antifascistes basques et castillans, raflés en France par la police française… Interrogation des autres prisonniers quant à leur avenir. Départ des Grecs. Grande émotion. Kambanellis décide, lui, de rester avec les Juifs. Retour au pays difficile pour les Polonais.
Puis, l’auteur nous entraîne dans son histoire d’amour merveilleuse mais difficile vu les conditions, avec une jeune prisonnière lituanienne. Que se passe-t-il alors à l’approche de l’armée Rouge ? Lorsque les Italiens antifascistes partent à leur tour, c’est le désarroi. « Les Juifs se retrouvèrent à nouveau dans un Ghetto ! » Les derniers chapitres sont d’une rare beauté quand sonne enfin l’heure de la libération des Juifs. Mais quel pays d’accueil choisir ? L’Amérique ou attendre le feu vert des Nations unies et plus particulièrement des Anglais pour la Palestine ? A ce sujet, l’auteur nous livre le récit de l’édifiant épisode de l’Aliyah Beth, mal connu de la plupart des survivants de la Shoah. Et pour finir, quelles seront les décisions prises par Iakovos le Grec et la petite Lituanienne car, nous sommes alors encore bien loin de l’épilogue ? …

Spyros Tsovilis : Carnets de garde



Spyros Tsovilis est né à Paris en 1971. Il a occupé différents postes au sein du Conseil de l’Europe, notamment, dans le domaine de la coopération juridique et la lutte contre la corruption. En 2007, un grave accident « interrompt brutalement le cours normal des choses ». Depuis lors, l’écriture participe à la reconstruction d’une vie nouvelle. Avec Carnets de garde, il publie son premier roman.



Ce sont les notes de Spyros Tsovilis, griffonnées dans ses carnets à l’époque qui articulent la plupart des pages de Carnets de garde (éd. L’Harmattan). Un voyage de 121 jours passés dans l’armée grecque, en tant que « hexaménite » (grec résidant à l’étranger). Ces derniers étant tenus d’effectuer 6 mois de service.
Thomas Spartios (pseudonyme de Tsovilis dans son ouvrage), étudiant à Paris, n’y échappe pas. Et par un beau matin d’automne, notre héros se rend à la caserne de Missologhi (située sur la rive nord du Golfe de Patras), pour y faire ce que l’on appelait en France, ses classes. Il est accompagné, comme le veut la tradition, par Michel, son meilleur ami qui lui, l’a effectué six ans plus tôt.
Une des premières des notes du carnet de Tsovilis vient compléter le récit du héros. Elle date du 20 septembre. Découverte des « joies du service » avec la traditionnelle visite des locaux, surtout habités par les rats et les moustiques. Fourniture des treillis et tour des chambrées au linge sale. Découverte de ses futurs compagnons. « Les irréprochables, les futurs lieutenants, les pistonnés et la horde des lents à la détente » … Nous faisons alors connaissance avec ses voisins de section. Le bel Orphéas, autodidacte joueur de bouzouki ; Marcos, l’intellectuel germanophone et le communiste Vengelis ; Et bien sûr, les autres hexaménites, souvent expatriés allemands, mais aussi d’Australie, d’Afrique du Sud, de Suède, de Géorgie, d’ex-URSS, d’Albanie, de Roumanie, d’ex-Yougoslavie, etc. « On eut dit que toutes les tribus d’Israël s’étaient rassemblées ici » ! Dans cet univers cloisonné, Tsovilis découvre combien les hexaménites sont considérés par les autres appelés comme des privilégiés et haïs à ce titre par les « anciens » et plus encore, par les militaires de carrière. Nous entrons alors dans le vif du sujet : « Les jours suivants, je ne sais comment rapidement les choses se gâtèrent, je perdis à la fois, mon sang froid, mon humour et mon courage ». Bienvenue dans un monde viriliste, nationaliste, proche parfois de l’atmosphère d’une cour d’école « pulsions violentes, bizutage, débilité, loi du plus fort ou des grandes gueules, frustrations en tous genres » ! Avec au quotidien : prière collective du matin (!), corvées, exercices, parades, etc.
A souligner : très beaux passages de poésies extraites des notes de l’auteur. Reflets de discussions enflammées en chambrées au sujet de l’amour, de la politique, de la philosophie. Belles images souvenirs des permissions et des possibilités offertes ou encore, flashbacks sur la petite enfance de Tsovilis passée chez ses grands-parents dans un petit village proche de Parga. Arrivés à la seconde partie de l’ouvrage, nous suivons Thomas pour ses derniers mois de service, au sein de sa nouvelle affectation à Yannitsa, en Macédoine centrale, ainsi que ses trois de ses camarades de Missologhi, Leandros, Orphéas et Markos, l’haltérophile « lanceur de poids au cœur tendre ». Pour le meilleur et pour le pire. Et pour le pire, nous n’allons pas être déçus ! Personnages hauts en couleurs, insolites ou sombres crétins. Circonstances peu banales qui marqueront profondément la pensée et l’avenir de l’auteur.

Léon Tolstoï : Fables



Léon Tolstoï est né en 1828, à Iasnaïa Poliana. Célèbre pour ses romans et ses nouvelles qui dépeignent la vie du peuple russe à l’époque des tsars, mais aussi pour ses essais, dans lesquels il condamne les pouvoirs civils et ecclésiastiques. Il est excommunié par l’Église orthodoxe russe et après sa mort, ses manuscrits sont détruits par la censure tsariste. Il veut et entend mettre en lumière dans ses œuvres, les grands enjeux de la Civilisation. Il laisse également des contes et des pièces de théâtre. Anarchiste chrétien, il prône le travail manuel, la vie au contact de la nature, le rejet du matérialisme, l’abnégation personnelle et le détachement des engagements familiaux et sociaux. Il espère que la simple communication de la vérité d’une personne à une autre, fera disparaître toutes les superstitions, les cruautés et les contradictions de la vie.



Jean-Pierre Piseta, le traducteur de ce petit ouvrage, attend la postface pour nous raconter la genèse des Fables de Léon Tolstoï (éd. Allia) et comment a été orchestrée la sélection des textes rassemblés ici.
Ils sont issus des Quatre livres russes de lecture, écrits par Léon Tolstoï dans le but de « les destiner à tous les enfants russes, depuis ceux de la famille impériale jusqu’à ceux des plus humbles paysans ».
Mais leur contenu souvent rural laisse présager qu’ils s’adressaient surtout à ces derniers.
Pour ce qui s’agit des thèmes évoqués, Tolstoï en a puisé les sources aussi bien auprès des textes classiques (grecs, indiens, etc.) que populaires, d’autres sortis de sa propre imagination. Parmi eux, on trouve de véritables petits trésors comme La tête et la queue du serpent, qui se détestent et luttent pour savoir qui des deux sera devant ! Ailleurs, l’histoire d’une paysanne avide qui nourrissait trop sa poule et va en payer cher les conséquences. Un partage d’héritage entre deux frères qui se termine mal. Les réflexions (de bon sens) d’un cheval de Moujik. Le conte hilarant et désopilant mettant en scène un seigneur qui envoie son serviteur acheter au marché, les meilleures poires, mais… Plus loin, « Comment décrire la couleur du lait à un aveugle » ? Belle morale que celle du conte sur le loup et l’arc. Enfin une très belle conclusion « toute tolstoïenne » dans la dernière fable où un corbeau, un pigeon, un serpent, un cerf et un ermite tentent de répondre à la question « Pourquoi le mal existe dans le monde » ?
A mettre entre toutes les mains !

Meša Selimović : Le derviche et la mort



Mehmed « Meša » Selimović est né le 26 avril 1910, à Tuzla (Bosnie-Herzégovine). Il fait ses études à la Faculté de philosophie de l’université de Belgrade et participe, dès 1941, au Comité national de Libération. Son œuvre comporte des romans, un essai, des recueils de nouvelles et de souvenirs qui lui ont valu les plus hautes récompenses littéraires.



« J’entreprends ce récit, sans raison, sans profit pour moi-même ni pour le autres […] J’ignore encore ce qui sera consigné, mais dans mon procès, je suis à la fois juge, témoin et accusé », nous avertit Amhed Nuridin, le narrateur du Derviche et la mort (éd. Gallimard, traduit du Serbo-croate par Simone Meuris). Nous avons déjà croisé Mesa Solimovic et son magnifique roman, La Forteresse, dans la chronique du Rat noir de juin 2023 (faire une recherche dans le cadres ad’hoc sur le sie du Monde libertaire).
Mais revenons à Ahmed notre héros qui n’est autre que le cheikh d’un couvent de Derviches Mevlevi. Arrivé à la quarantaine, sa paix intérieure va être remise sérieusement en cause lorsque son frère Harun va se retrouver en prison. Ce qui décide Ahmed à aller trouver le vieux Djanitch à l’agonie. C’est donc sa fille, belle mais énigmatique, qui accueille le Derviche. Ironie du sort c’est elle qui demande alors à Ahmed, sceptique, de lui rendre un service. Mais au fil du temps les évènement impromptus vont s’enchaîner et tout compliquer. Ahmed perdra-t-il alors ses repères et convictions religieuses devant l’infaillible réalité ? Son regard sur le monde va-t-il changer ? D’autant que tout s’emmêle : les attitudes ambiguës ou indifférentes de ses collègues derviches et les révélations de son ami Hassan, un garçon « libre et franc » qui lui explique que tout ce que l’on reproche à son frère est « d’en savoir trop ».
Tandis que l’intrigue avance, nous retrouvons l’un des thèmes phares de l’univers de Solimovic : le rouleau compresseur de l’ordre établi. La conclusion du roman nous offre tout ce que l’on peut attendre des plus beaux contes orientaux ! Au passage, l’auteur nous gratifie d’un beau résumé de l’histoire de la Bosnie et de la conditions de ses habitants, hélas inchangées jusqu’à nos jours : « Nous nous n’appartenons à personne, nous nous trouvons toujours sur une frontière ou sur une autre, nous sommes toujours la dote de quelqu’un. Depuis des siècles, nous nous cherchons, nous nous trouvons parfois. Bientôt, nous ne saurons plus qui nous sommes. Nous perdons peu à peu notre propre visage et ne pouvons prendre celui des autres. Nous vivons à la limite des mondes, à la frontière des peuples, exposés à toutes les attaques, toujours coupables. Les vague de l’histoire se brisent sur nous comme sur un rocher » !

Svetislav Basara : Le pays maudit



Svetislav Basara est en 1953, à Bajina Bašta. Ecrivain et homme politique serbe, il est particulièrement actif au sein du Parti démocrate-chrétien de Serbie. Considéré comme un représentant de la littérature postmoderne, il est admiré pour son humour grinçant et sa fantaisie. « Est-il fou, génial, libertaire, ou encore un amuseur effronté et sentimental ?», se sont souvent demandé les critiques.



Quel plaisir de replonger dans l’univers déroutant de Svetislav Basara (déjà croisé dans le Rat noir de juin 2024, avec Copie d’un manuscrit brûlé). Cette fois-ci à destination du Pays maudit (éd. Gaïa, traduit du Serbo-croate par Alain Cappon).

Le narrateur du roman, un ambassadeur britannique, se rend incognito dans un village du pays d’Etracie. Une contrée où interfèrent, mythologie, passage par l’ère socialiste, avant de tomber dans l’oubli. Espace aux frontières floues, coincé entre deux no man’s land. Dans ce confins du monde, notre narrateur va se trouver tout d’abord face à son propre fantôme, puis à Eros et Thanatos, mais aussi croiser « nombre de trafiquants d’esclaves, de faux réalisateurs de cinéma, de businessmen fauchés, ou encore de princesses russes déchues, de mercenaires, de prostitués de dealers, de chercheurs de néant ».
Bref, perdu dans une faune qui, on ne sait comment, de seconde en seconde ne cesse de se multiplier. D’où le fort taux de criminalité. Bizarrement, on y trouve également un taux impressionnant de maisons d’éditions et d’imprimeries « alors qu’ici, personne ne lit » !
Intrigué, notre héros se rend dans l’unique librairie du village et y achète l’ouvrage d’un illustre inconnu nommé Robert T. Cincaid. Probablement lui aussi ambassadeur, lui aussi britannique et « donc forcément homosexuel et agent à la solde de Moscou » !
Son unique ouvrage Le pays maudit (comme par hasard traduit par un certaine Svetislav Basara !) se déroule on s’en serait douté, en Etracie, « Ce pays absent de toute encyclopédie sinon présent en termes assez vagues, dans une encyclopédie russe « inégalable pour ce qui est de l’inventivité car, l’Etracie n’existe pas, cela ne voulant pas dire qu’elle n’existera jamais ! » … Nous voilà plongés, pour notre plus grand plaisir, au fond de ce grand mystère.

Fort de son style explosif et si particulier, Svetislav Basara se livre avec jouissance à un pastiche de « ce qu’a pu être le roman diplomatique de tradition serbo-croate ». S’entremêlent ici récit, correspondances, biographies, extraits d’ouvrages relatant au passé et au présent les faits et gestes des protagonistes, tous dans le collimateur d’un gouvernement autoritaire sous les ordres d’un « roi fantoche » et de ses services de sécurité tout-puissants. « Sainte ivresse, réhabilitation des bûchers pour les sorcières et apologie de la « monarchie absolutiste ».
Roman « à tiroirs sans clés » qui sous nos yeux hypnotisés, va devenir de plus en plus hyperréaliste, baignant dans un univers dans lequel disparaissent tour à tour, le temps, l’espace, le sens et surtout les gens ! Mais au fait dans ce Maelstrom, que va-t-il advenir de notre narrateur ?

Bernard Melguen : Les météores, messagères de l’espace





Après La vie dans l’Univers et Les exoplanètes parues dans la chroniques de juillet 2024, voici le troisième volet de notre voyage dans l’espace. Nous allons y découvrir Les Météores, messagères de l’espace (éd. Apogée). Dans son introduction, Bernard Melguen, professeur d’astronomie à l’Université de Nantes, nous livre quelques considérations générales sur ces « bombardements célestes, imprévisibles, constants et qui durent depuis des millénaires ».
Des centaines de tonnes tombent chaque année sur Terre et ce, à une vitesse moyenne de 100.000 km/h, ou plus ! Ces météorites (terme qui vit le jour en 1822), furent-elles objet de frayeur ou bien de vénération, depuis les temps anciens ? Ont-elles été coupables d’avoir éradiqué 80 % de la vie sur Terre il y a 65 millions d’années, ou ont-elles contribué au contraire, à apporter les premiers germes de la vie sur notre planète ?
Quoi qu’il en soit, « elles sont devenues depuis quelques décennies, les pierres les plus précieuses que nous connaissions ».

Survol des principaux thèmes abordés dans ce petit recueil. Tout d’abord l’évocation de quelques météorites légendaires ayant laissées des traces dans la mythologie depuis 1450 avant notre ère. Dans la Bible, puis dans l’antiquité grécoromaine (météorites d’Aegos Potamos), en Asie Mineure (Pessinonte), chez les Phéniciens d’Emèse (le bétyle d’Elagabal), la Pierre noire de la Mecque et autres météorites décrites en Chine. Le problème qui s’est alors posé à tous ces peuples fut de tenter de comprendre la provenance, un peu partout dans le monde, de ces divers objets en fer pur (souvent associés à 10% de nickel) et attestés dans les textes anciens et visiblement « plus anciens que le traditionnel âge de fer ».
Bernard Melguen nous initie ensuite aux longs débats scientifiques, vieux de plus de 2 000 ans, au sujet de « ces pierres tombées du ciel » : Etaient-elles les messages des dieux envoyés aux hommes, ou de simples chutes cosmiques extraterrestres ? Ces interrogations donneront naissance à la « cosmochimie », aujourd’hui en plein essor.
Dans les chapitres suivants, nous allons découvrir au gré des découvertes scientifiques, l’origine des météorites : sont-elles des pierres orphelines ? Des corps parents des astéroïdes (la première ayant été découverte en 1801 par Guiseppe Piazzi, le directeur de l’observatoire de Palerme) ? Des étoiles filantes ou encore, des poussières cométaires ? Comment reconnaitre les trois catégories de météorites (pierreuses, ferreuses et mixtes ou sidérolithes) ? Suit, un passage très instructif sur les météorites et la radioactivité, sur leurs messages en matière de « nudéosynthèse » et plus précisément sur les conditions de la formation du système solaire, l’âge de la Terre et la naissance des atomes au cœur des étoiles. D’où cette véritable chasse aux météorites notamment en Antarctique, mais rendue d’autant plus difficile à cause de l’étendue des océans. Une météorite martienne pouvant atteindre sur le « marché », jusqu’à 100 fois plus que son poids en or ! Quelles sont les caractéristiques de la chute et de l’impact des météorites ? Quid des cratères et quels sont les plus grands répertoriés sur Terre ? Suite un historique des chutes célèbres ou les plus étonnantes, et ce, de la plus ancienne à la plus récente.
C’est alors que nous pénétrons au cœur d’une « véritable enquête policière » sur la disparition des dinosaures. Enquête initiée par Luis Alvarez (physicien nucléaire) et son fils Walter en 1978. Et toujours des questions. La disparition des dinosaures aurait-elle eu un impact positif sur le développement de l’humanité ? Les météorites auraient-elles apporté les premiers germes de vie sur notre planète ? Enfin, une question des plus pertinentes : les météorites, sont-elles des menaces pour la menaces pour la Terre ? Des épées de Damoclès ou des « force d’insémination » ?
Toutes les réponses se trouvent cachées dans ce passionnant petit ouvrage, prodigieusement bien illustré !

Patrick Schindler, individuel FA Athènes

Un passager clandestin (Bernard CRML)









PAR : Patrick Schindler
individuel FA Athènes
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1

le 4 août 2024 11:46:34 par Stéphane Sangral

Cher ratounet anar,
Intéressant le Tolstoï : pour une fois qu’il écrit un bouquin qui ne soit guère epais ( guerre et paix )!... Bon pas sûr que je sois très fier de mon jeu de mots...
Stef anar

2

le 4 août 2024 12:33:08 par Le Rat noir

Cher Stefane,
Merci pour ton jeu de mots que je trouve, oi, excellent !...
Mais au déplaisir de te décevoir, ce petit livre n’est qu’un extrait choisi de fables parues dans L’abécédaire de Tolstoï destiné à ses élèves qui, dans la version originale ( aujourd’hui introuvable ), ne faisait pas moins de 756 pages !!!!
C’est donc Allia, l’éditeur, qu’il faut remercier d’en avoir fait un tout petit volume à trimbaler, pour les inconditionnels, partout avec eux dans leur poche !...