Chômeurs en exemple

mis en ligne le 2 juillet 2006

Vous êtes tranquille, votre vie quotidienne se passe sans trop de difficultés ; peut-être avez-vous quelque fois des inquiétudes pour l'avenir, mais grosso modo vous imaginez que si la tempête vous a épargnée jusqu'à présent, il n'y a pas de raisons pour que cela ne dure pas...

Et puis brutalement, c'est la catastrophe. Soit ça dégraisse, soit vous êtes devenu trop vieux, trop cher, on vous fait remarquer que vous n'êtes vraiment plus flexible ou que vous l'êtes trop mais pas assez formé, et hop ! à la trappe !

Pendant un temps vous faites face courageusement, vous avez une indemnité chômage encore décente, vous espérez. Mais non, rien n'y fait, c'est la glissade avec son chapelet de privations et d'angoisses au quotidien, pour vous, pour vos enfants. Vous vous demandez en quoi vous avez bien pu démériter, comment regagner l'estime de ceux qui pourraient vous «engager»... Inutile de rappeler ce que tous les médias se font une joie gourmande de nous rabâcher jours après jours...

Mais quand même, on se pose la question de savoir ce que l'on pourrait faire pour sortir de cette descente aux enfers... Pas d'inquiétude, le gouvernement va s'occuper de nous. Et puis si ce n'est pas le gouvernement, les syndicats se font fort de prendre nos intérêts en main. Et si ce n'est toujours pas assez, il y aura bientôt le recours à l'opposition ; il suffira de voter pour les autres (depuis la dernière fois, ils savent ce qu'il y a lieu de faire)... Et ainsi de suite...

Ne nous plaignons pas, si tout cela peut paraître désespérant c'est en fait que nous sommes égoïste. En effet, la compétition généralisée va permettre, dans un avenir plus ou moins proche, une bien meilleure efficacité du système. La dérégulation va engendrer une amélioration considérable du niveau de vie... Bon, bien sûr, les délais c'est plus compliqué à définir. Mais il suffit de s'accrocher et de prendre patience.

Et puis, mais c'est bien sûr ! Ils nous le disent tous : il faut que nous soyons i-ma-gi-na-tifs, com-pé-ti-tifs. Il faut se battre : contre son voisin, qui est un concurrent, contre l'étranger, qui est un concurrent, contre le jeune, qui est un concurrent... Après cette chaude lutte, quand nous nous serons bien étripés sur le marché de l'emploi, bien déchirés entre entreprises, bien déchirés entre entreprises, quand nous aurons vaincu économiquement le pays d'à côté, que nous aurons bien profité de notre position de force sur le continent voisin, alors la terre ira beaucoup mieux, c'est promis.

Quoi ? Vous avez un doute ? L'appel à la patience, à la résignation, à l'esprit d'entreprise vous laisse légèrement dubitatif ? Une seule solution : sortir de chez soi, rencontrer les autres, prendre collectivement son destin en main, s'associer, réfléchir ensemble, descendre dans la rue, occuper les lieux de travail, les lieux publics (ils nous appartiennent), exiger l'impossible.

C'est encore ce que l'on a trouvé de mieux pour changer le cours de l'Histoire... Une histoire qui n'est jamais écrite définitivement.

Quand on chuchote, personne ne nous entend.

Quand on pleure, on invente la charité.

Quand on crie, on nous écoute.

Quand on se bat ensemble, on invente la solidarité.

Quand on gagne, on impose l'égalité !

Le combat des chômeurs est exemplaire !

Bruno
groupe René Lochu (Vannes)