Quand les tondeurs se font appeler « Tondus »

mis en ligne le 9 octobre 2013
Après les « Pigeons » et les « Poussins », ces mouvements de petits patrons défendant la micro-exploitation, voilà que des patrons plus replets nous pondent le mouvement des Tondus . Ces tondeurs détournent le plus élémentaire des constats du socialisme révolutionnaire, celui de la mise en esclavage de tous, celui de l’exploitation généralisée des activités collectives au profit de l’accumulation privative capitaliste, pour la seule satisfaction de la lamentable et dérisoire prétention de quelques merdes humaines à monopoliser les décisions qui devraient être collectives.
Ce seraient donc les patrons qui seraient les exploités, les « Tondus ». Ce serait drôle si ce n’était révélateur d’une offensive massive du patronat et de l’État contre le prolétariat, à coups de louanges éhontées de la croissance du Capital, de l’emploi d’esclaves salariés, de la productivité nationale, broyant toujours plus les humains de tous les coins de la planète sous les exigences de la machinerie du profit.
Face à de telles usurpations cyniques du vocabulaire de la lutte sociale, en parallèle des manipulations grossières de l’extrême droite fascisante qui se fait passer pour le socialisme du XXIe siècle, il n’y a guère plus de réponse et d’autodéfense du prolétariat. Les bureaucraties syndicales, toutes installées et calcifiées qu’elles sont dans la cogestion de la dépossession collective, ont repris pour elles-mêmes ces mots d’ordre de l’emploi, de la croissance, de la productivité française. Qu’on le veuille ou non, le capitalisme ne se maintient qu’en étendant la dépossession, et cela va jusqu’au vocabulaire même de la lutte des exploités !
Depuis quelques mois, plus de 300 000 patrons d’entreprises de toute taille s’agrègent autour de la revendication principale du fondateur de l’association des Tondus, Guillaume De Thomas, propriétaire plein aux as de plusieurs saunas libertins, faisant aussi dans le commerce. Un business juteux semble-t-il mais voilà, les capitalistes n’en ont jamais assez. Depuis juillet, ces patrons refusent de payer la part patronale des cotisations sociales, qui empêcherait la création d’emplois (3,4 millions, selon De Thomas). C’est bien connu, les médias nous le répètent assez : s’il n’y a pas de boulot, c’est de notre faute. Même les miettes d’allocations qu’on consent à nous jeter sont de trop, désormais.
Vu la mansuétude des autorités à l’égard de ces patrons revendiquant le droit de raser gratis, et la diffusion de leur propagande aussi grossière que répugnante par des médias complaisants les faisant passer pour des rebelles, ils auraient tort de se priver d’exiger plus de leurs complices gouvernementaux. Ceux-ci sont déjà prodigues en défiscalisations patronales tous azimuts. Hier à Poitiers, Guillaume De Thomas a ainsi annoncé que les Tondus refuseraient désormais de verser la cotisation foncière des entreprises ainsi que la taxe foncière, histoire de sabrer un peu plus les moyens sociaux des collectivités locales. Ben voyons. À quand le retour du vieil esclavage old school ? Au moins, les choses étaient plus claires…
Or la part patronale des cotisations sociales est une partie pleine et entière du salaire, dans son versant « socialisé », contribuant directement à financer les branches maladie, chômage et retraite, ainsi que les allocations familiales.
Le mouvement des Tondus n’est qu’un aspect médiatisé, version trash, de l’attaque frontale actuelle contre le prolétariat, pour faire baisser encore plus drastiquement les salaires, histoire de maintenir sous perfusion le profit capitaliste.
Ces réacs assumés, « rebelles » en peau de lapin à poil ras comme ceux de la Manif pour tous, imitent la tradition des mouvements sociaux (manifestations, pétitions, désobéissance…) pour se faire passer pour des contestataires, alors qu’ils sont dans un discours réactionnaire et bourgeois des plus puants.
Nous ne rentrerons pas ici dans le pseudo-débat sur une gestion plus juste ou humaine du capitalisme, que nous laissons à la gauche et à la droite du capital. Nous ne voulons pas d’un retour au compromis avec le patronat. En revanche, nous pourrions reprendre la balle au bond. Ces patrons, en se désignant eux-mêmes comme « Tondus », ne nous incitent-ils pas à nous armer de ciseaux ? Ces exploiteurs de la force de travail collective ne veulent plus payer la part patronale des cotisations sociales ? Ils ne veulent plus même faire semblant de contribuer au maintien de cette paix sociale faite pour neutraliser les luttes ? Après nous avoir réduits en steaks hachés, ils prétendent nous transformer en jus de viande sans plus se justifier d’aucun prétexte ?
Eh bien pratiquons la seule réponse qui soit légitime : celle consistant à nous débarrasser des patrons, à les exproprier à tout jamais, eux, les gouvernants, et tous leurs mots d’ordre puant le pognon, pour gérer enfin nous-mêmes nos affaires et produire pour nous-mêmes ce dont nous avons besoin.

Juanito
Groupe Pavillon Noir de la Fédération anarchiste



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


kavi

le 17 novembre 2013
Quel bel amalgame entre "patronat" et petits chefs d'entreprise (commercants et artisans)...
La lutte ideologique semble plus importante a vos yeux que la dure réalités de petits commercants qui n'ont ni le droit au Smic, ni au chomage... Sont ils des sous humains a vos yeux qu'ils n'ont meme pas le droit comme les autres de manifester et prononcer la moindre revendication ?
Evitez donc de confondre un grand patron habillé d'un parachute doré avec ceux qui travaillent 2 fois 35h par semaine pour un salaire a peine au dessus du smic svp. Vous feriez evoluer le debat, en demontrant que vous vous y etes un tant soi peu interressé...
Bien cordialement.

kavi

le 17 novembre 2013
Ps: surtout quand le message vise a proteger les emplois qu'ils habritent (et auxquels les syndicats ne s'interressent jamais) et pas leur propre pomme...

quaderos

le 23 mars 2015
1 an et quelques mois plus tard, l'article ci-dessus est véritablement et superbement bien étayé - Je confirme ! Les Tondus, c'est foutu !

Si vous avez donné, c'est foutu aussi !

Gaffe quand même, leur appel à dons est toujours actif, ne donnez pas pour leurs prochains voyages à l'étranger, genre Autriche,Danemark, Londres, Irlande, Pays-bas, ils adorent... Enfin, le fondateur surtout, avec ses potes et autres, qui paye ?

Gaffe aussi à ses sociétés bidon

Il est fort le mec