Congrès Force ouvrière : quels enjeux ?

mis en ligne le 17 février 2011
Le congrès confédéral de Force ouvrière se tiendra du 14 au 19 février à Montpellier. Ce sont plus de 3 000 délégués qui débattront pendant une semaine du rapport d’activité du bureau confédéral et des résolutions qui déterminent les mandats de l’organisation pour les trois prochaines années. Trois mille délégués, c’est environ deux fois plus que pour les congrès CGT ou CFDT, tout simplement parce que les statuts ne permettent pas à FO de filtrer les congressistes. Tout syndicat de base peut déléguer un mandaté porteur d’un nombre de voix proportionnel aux adhérents qu’il représente sans que les directions des unions départementales ou des fédérations ne puissent exercer de veto. Le seul obstacle est matériel, puisque c’est aussi au syndicat de base de financer les frais de transport, d’hébergement, de restauration. Mais même sur ce plan un certain nombre d’unions départementales (dont la mienne) « mutualisent » les moyens et permettent à des syndicats sans le sou de participer au congrès. à cela s’ajoute le droit absolu pour tout mandaté de s’exprimer à la tribune. Tout cela aboutit à une liberté de ton assez peu fréquente dans le milieu.
Bien évidemment, cela ne signifie pas que des manœuvres diverses, des discussions de couloir, des alliances de circonstances existent mais le fait est que l’appareil a souvent bien du mal à cadrer les choses comme il le souhaiterait. C’est particulièrement frappant lors des discussions des résolutions. La direction propose sur les différents sujets des textes souvent « semouleux » qui permettraient ensuite des interprétations très souples du mandat. Mais à la fin de débats souvent acharnés en commission, jusqu’à 3 ou 4 heures du matin, le résultat est souvent assez radicalement différent, y compris si un secrétaire confédéral doit avaler son chapeau !
C’est ainsi qu’au congrès de Lille en 2007, un mandat clair a été fixé sur la question des retraites et c’est sur la base de ce mandat que la direction confédérale a pu être « recadrée » à l’automne dernier quand c’était nécessaire. Le mot d’ordre de « retrait » de la loi impulsée par Sarkozy s’est imposé et la confédération a porté l’idée de grève et de blocage, alors même que l’intersyndicale autour de l’axe Thibault-Chérèque conduisait sciemment les salariés dans le mur.
FO n’a signé aucun de ces communiqués « intersyndicaux » ne revendiquant rien et organisant des journées saute-mouton dont on connaît la nocivité. Sans parler de la honte du communiqué appelant « au respect des biens et des personnes » ! Certes, on aurait pu souhaiter que Jean-Claude Mailly soit plus pugnace dans ses quelques interventions médiatiques mais l’essentiel a été que le cap de l’indépendance a été maintenu alors même que les pressions syndicales, politiques et médiatiques pour faire rentrer FO dans le rang ont été très fortes.
L’enjeu de ce 22e congrès réside essentiellement dans le maintien de ce cap au moment où les sirènes du syndicalisme d’accompagnement, avec tous les avantages que cela procure aux bureaucraties, se font pressantes. Et il existe à FO des structures dans la métallurgie, l’agriculture et l’alimentaire ou dans tel ou tel département dont le moins que l’on puisse dire est qu’elles ne brillent pas par leur esprit de résistance ! Au moment où Nicolas Sarkozy et sa clique (ainsi que ceux qui aspirent à les remplacer en 2012) entendent détruire ce qui reste de la Sécurité sociale (discussion avec les « partenaires » au printemps, projet de loi début juillet et vote en automne, cela ne vous rappelle rien ?), des services publics et des libertés individuelles, mieux vaut pour le mouvement social que FO soit bien orientée. C’est pas la révolution mais ça aidera, et cela aucun militant de luttes de classes conséquent ne peut le négliger, en attendant mieux.
Les militants anarchistes de FO prendront dans cette bagarre toute leur responsabilité, sans compromission avec quiconque mais avec une claire idée de ce qu’ils cherchent : des points d’appui pour les luttes sociales.
Quant à la commission exécutive (trente-cinq membres) qui sera élue le samedi et qui connaît treize départs cette année, nous ferons modestement tout ce qui nous est possible pour qu’elle incarne sinon l’esprit révolutionnaire (faut pas rêver), du moins l’esprit de résistance qui semble vouloir se réveiller ici ou là dans le monde.
Nous ferons le bilan sur toutes ces questions dans un prochain numéro.