éditorial du n° 1076
« C'est l'Europe sociale qui se construit », affirme-t-on de toutes parts. Tout y était : les drapeaux au vent, les banderoles déployées, les discours qui claquent... Personne ne doute que ceux de Vilvorde se rebellent avec fermeté et audace contre la fermeture de l'établissement sis dans leur cité. Quid des autres ?
En Espagne, les directions des Commissions ouvrières et de l'UGT sont prêtes à accepter que la direction de Renault fasse effectuer des heures supplémentaires dans les usines de Valladolid et de Palencia ; seuls les anarchosyndicalistes de la CGT d'Espagne appellent les travailleurs à repousser ce qui ne serait ni plus ni moins qu'un coup de poignard dans le dos de ceux de Vilvorde.
Et que perçoit-on exactement de l'orientation des confédérations françaises et de leurs fédérations de la métallurgie ? Quelques débrayages ont certes été organisés, sans pourtant qu'ils permettent aux travailleurs du rang de participer aux manifestations. Comme à Flins, par exemple, où seuls les délégués ont pu rejoindre les cortèges. On ne mobilise pas vraiment, on cherche surtout à se faire voir.
Contre la volonté clairement affirmée de la direction de Renault de faire disparaître un établissement et six mille postes de travail, les directions syndicales hexagonales n'envisageraient-elles qu'un simulacre de lutte, un simulacre de résistance, un simulacre d'internationalisme et d'Europe sociale ? Le mécontentement est grand pourtant dans toute l'automobile : la productivité s'accroît sans cesse et les directions ne remplacent guère les départs en retraite.
Les simulacres de lutte aboutissent toujours, pour ceux qui travaillent dans les usines, à des défaites bien réelles. Ceux de Flins, de Vilvorde, de Palencia et de Cléon s'en souviendront peut-être - ils pourraient organiser eux-mêmes la résistance. Mais il s'agirait alors d'une autre histoire !