La femme selon Playmobil : en avant le sexisme !
En me promenant, lundi dernier, dans les rues de Paris, je suis tombé sur un magasin de jouets (dont je tairais le nom). Curieux de voir ce qu’étaient devenus les jeux qui, naguère, meublaient mon enfance, je passais le pas de la porte et me dirigeais tout droit au rayon des Playmobil, ces jouets en plastique avec lesquels on reconstruit, déconstruit et/ou réinvente la société, de l’Antiquité à nos jours, de l’imaginaire au réel, du BTP (ils ont de super pelleteuses !) aux pirates fantômes. Après une courte frustration devant les nombreuses nouveautés (les anciens Égyptiens, les morts-vivants, les dinosaures n’existaient malheureusement pas à mon époque !), je consulte le catalogue de l’année 2010 qui, toutes les deux pages, met en scène les petits bonshommes en plastique : l’hôpital, la campagne, les pompiers, le Jurassique, l’Ancienne Égypte, la piraterie, le Moyen-Âge, etc. Certaines de ces scènes font rêver et, quelque part, procurent une certaine nostalgie d’une époque plutôt insouciante pour ceux qui, comme moi, avaient la chance de pouvoir en avoir. Mais l’enchantement est de courte durée lorsque, tombant sur les pages consacrées à la vie de famille à la maison, je me rends compte que la vision de la femme de Playmobil est profondément ancrée dans les vieux schémas patriarcaux – et malheureusement toujours d’actualité – d’une femme boniche. Ainsi, dans le décor idyllique d’une grande maison avec jardin et véranda hyper-chics, les femmes s’occupent de nourrir l’enfant au biberon, de ranger le lait dans le frigo, d’étendre le linge, de mettre la table, d’apporter dans une poêle le steak et les saucisses du repas, de balayer la cour et de planter les carottes. Trois d’entre elles ne bossent pas, trop occupées qu’elles semblent être à… lire un magazine de fleurs, se coiffer ou se regarder devant la glace en se brossant les dents… Les mecs, quant à eux, lisent un bouquin devant la télé, sont assis à table en attendant le repas, consultent un magazine sur un fauteuil bien confortable dans la véranda, jouent au football ou lisent dans leur pieu. Seul l’un d’entre eux met la main à la pâte pour faire… le barbecue (sûrement un truc de mâle, faudrait pas se brûler) !
Ah oui, j’oubliais aussi le brillantissime titre de la scène : « Papa, est-ce que je peux regarder mon film préféré ? » Une façon de montrer que, dans la famille, c’est le père – le pater familias – qui détient l’autorité, c’est lui qui autorise ou interdit. La femme ? Trop occupée aux tâches ménagères…
Playmobil nous offre donc une vision fortement machiste de la famille avec des mecs qui glandent pendant que les filles s’occupent de cuisiner, de nettoyer et de ranger. Si cela peut paraître relativement anodin, ça pose quand même la question de l’impact que peuvent avoir ce genre de mises en scène sur le développement des enfants. Quand, dès leur plus jeune âge, leurs jouets préférés reproduisent et véhiculent – du moins ainsi présentées – des valeurs profondément réactionnaires, dans quelle mesure et à quel degré les mômes sont, à leur tour, amenés à les intégrer pour, plus tard, les reproduire et ainsi entretenir sans cesse cette vision sexiste des femmes ?
Tout cela est bien dommage, car les Playmobil pourraient être le moyen, pour l’enfant, de construire, dans le virtuel et le jeu, une autre société, porteuse de valeurs différentes et, pourquoi pas, émancipatrices. Un moyen, aussi, de refaire l’histoire et de bâtir le futur. Or, les mises en scène présentées dans le catalogue (que lisent avec bonheur tous les petits !) ne font qu’entraver cette liberté d’imagination pour contraindre l’enfant à reproduire les tristes réalités de son époque. Encore une fois, dommage !
COMMENTAIRES ARCHIVÉS
Kalandre
vi
Zala
et ma soeur est avec ses animaux :p
Videopunk
J
bill
Personnellement, je n'ai jamais cru qu'un jouet puisse transmettre des valeurs.
Je pense que ce qui compte, c'est le cadre dans lequel il est utilisé.
Le jeu, parfois (toujours ?) c'est la reproduction de la réalité dans la fiction, afin de mieux la comprendre. La petite fille passe l'aspirateur parce que maman fait le ménage. Le petit garçon joue à la voiture parce que papa est fier de sa BMW.
Je suis convaincu que le jeu permet de se projeter dans le monde des grands, de l'appréhender.
Conclusion : tant que les femmes seront réduite à passer l'aspiro, les petites filles seront séduites par les aspiro en plastoc. Je crois que cela serait un crime de leur retirer ceux-ci des mains.
Je pense que le problème n'est pas le jeu en lui-même mais le sujet dont il est le reflet...