Histoire > UMANITÀ NOVA : 100 ans de journalisme anarchiste (suivi de l’édito du n°1 signé Errico Malatesta)
Histoire
par Giorgio Sacchetti • le 29 novembre 2020
UMANITÀ NOVA : 100 ans de journalisme anarchiste (suivi de l’édito du n°1 signé Errico Malatesta)
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Trad et notes Monica Jornet groupe Gaston Couté & individualita FAI Napoli
Giorgio Sacchetti [note] . Umanità Nova. Publié le 27 février 2000 et dans le premier numéro de 2020
De 1920 au fascisme
Le mouvement anarchiste caressait depuis longtemps le projet de publier un quotidien et avait été très près de le réaliser en 1908-09 avec "La Protesta Umana" de Milan. Une réunion fédérale à Rome, en 1911, adopte ensuite d’idée de l’édition d’une feuille unique nationale qui sortirait au retour d’exil d’Errico Malatesta. Après la guerre, les publications anarchistes en langue italienne refleurissent. Au moment de la fondation de l’Union Communiste Anarchiste Italienne, à Florence, en 1919, les bases sont jetées pour une collaboration, depuis des positions différentes, de tous les courants. C’est le passage nécessaire pour la parution du quotidien Umanità Nova. La circulaire-programme du nouveau journal est rédigée par Malatesta. Les adhésions sont recueillies par un comité siégeant à Milan et animé par Ettore Molinari.
Le 26-27 février 1920, le numéro 1 du quotidien Umanità Nova sort (salué par des mots de sympathie par Avanti [note] !). Depuis le début, il y a des tentatives de perturber sa parution en empêchant la livraison du papier (pourtant déjà payé) depuis les fabriques de papier de l’État. Ce sont les mineurs de la Vallée de l’Arno qui, en employant l’arme de la menace de grève dans les mines de lignite (qui fournissaient à leur tour ces fabriques), qui imposent alors le déblocage de la situation. En un mois, le tirage atteint les 60 000 exemplaires (ensuite la moyenne se situera à environ la moitié). Une première souscription est lancée qui s’élève à 16.737,48 lires. À Boston 4000 dollars sont collectés pour l’acquisition d’une rotative (déjà utilisée par l’Autriche pour la propagande de guerre) et d’un Monotype. "
C’est un journal – écrit le Préfet de Milan dans son rapport au ministère-, fondé grâce à des fonds provenant de souscriptions d’anarchistes et sympathisants des diverses régions d’Italie, et à des souscriptions de l’étranger et notamment des sommes très importantes reçues d’Amérique qui continuent à affluer. C’est un journal plutôt bien diffusé parmi les masses ouvrières et ce qui a contribué à une plus grande diffusion a été le prix de vente, maintenu à dix centimes. Il a sa propre imprimerie au 3 rue Goldoni, mais les frais de rédaction et d’administration ne sont pas excessifs, le personnel de rédaction et celui consacré à l’impression du journal étant réduit".
L’activité d’Umanità Nova (d’abord quotidien à Milan et qui voit sa publication interrompue suite aux événements du Diana [note] , puis à Rome, où il sort hebdomadairement ou irrégulièrement jusqu’à la fermeture définitive de 1922) est suivie et documentée par la Direction Générale de la Sécurité Publique. Après la “grande espérance” et la défaite du mouvement d’occupation des usines, et en dépit de l’arrestation de toute sa rédaction, le journal continue à sortir. La bonne fortune du fascisme est étroitement liée à l’élimination violente de toute forme d’opposition. Les décrets relatifs à la presse en vigueur depuis 1924 et la législation d’exception pour la Défense de l’État ne feront qu’officialiser une situation de fait. Les journaux anarchistes subissent un sort analogue à celui de la presse du mouvement syndical et socialiste, des populaires, du camp des démocrates. Les agressions se produisent de façon organisée : d’abord les quotidiens de lutte militante, puis les journaux de réflexion culturelle et de débat politique. Le nombre de titres de presse anarchistes passe ainsi de 28 en 1923 à 3 en 1926.
C’est aux "camarades de Rome" qu’il revient – une fois la rédaction milanaise en cessation d’activité du fait de la destruction de ses locaux- d’envoyer une circulaire aux diffuseurs et correspondants du journal, pour annoncer la reprise de sa parution. La fermeture définitive du journal (qui passe d’une édition quotidienne à une édition hebdomadaire en août 1922), a lieu à la fin de cette même année (avec le numéro 196 du 2 décembre) suivant des étapes bien précises : plaintes pour outrages ; lourdes amendes pour de présumées irrégularités administratives ; imprimerie ravagée par les fascistes. L’acte final est la plainte déposée par la Préfecture de Police contre vingt anciens membres de la rédaction, correspondants et membres du conseil d’administration pour délits d’opinion. Ce à quoi s’ajoute la séquestration de documents, la confiscation de la caisse du journal. Parmi les imputés, un certain Voline, "sujet russe non identifié".
Le “retour” d’Umanità Nova et la Résistance
Umanità Nova sort à nouveau de 1943 à 1945, avec des dizaines de numéros et des milliers d’exemplaires de tirage imprimés à Florence, Gênes et Rome, il est la bannière de l’insurrection armée antifasciste, de l’opposition à la dictature militaire alliée. Une importante réunion clandestine dans la capitale toscane avait abouti à la décision de publier à nouveau le titre de presse. Un total de 14 numéros paraîtront jusqu’en mai, le tirage est de 8.000 exemplaires. Lato Latini est condamné pour ces faits, en tant que typographe et responsable, à cinq ans de prison par la Cour de justice alliée ; peine ramenée en appel une année, entièrement purgée à la prison "Le Murate" de Florence.
Le premier numéro clandestin d’Umanità Nova ouvre sur l’éditorial : "Salut à vous, camarades d’Italie et de tous pays ; après un silence long et forcé, nous reprenons avec une flamme immuable notre poste au combat pour la libération de toutes les personnes opprimées”. Se réclamant ensuite de Malatesta et explicitement des théories du communisme anarchiste, aussi bien que de l’Association Internationale des Travailleurs, soulignant à nouveau les principes bien connus du front unique antifasciste, le journal rend compte des grèves en cours "pour la paix et pour la liberté" et précise que les responsabilités des horreurs de la guerre devront peser également, à partir du 25 juillet, "sur la monarchie et sur le gouvernement monarchiste". Il est reproché durement à la Confédération Générale du Travail d’avoir collaboré avec Badoglio [note] et se place comme alternative :"Nos syndicats doivent réunir toutes leurs forces dans l’entreprise, tout le personnel (technicien, manœuvre, etc.) doit avoir ses commissions internes, librement élues par les personnes travailleuses qui en règlementeront le fonctionnement et le développement afin que tout conduise au passage à la propriété collective".
En juin 1944, les anarchistes de Rome sortent leur Umanità Nova, un "numéro spécial commémoratif, signé de la Fédération Communiste Libertaire Italienne".
Depuis la ville de Gênes et ses dockers, véritable épicentre de la résistance, en cette veille du mouvement insurrectionnel définitif, la Fédération Communiste Libertaire lance son appel aux Partisans anarchistes et au peuple -“C’est l’heure !"– et diffuse pour l’occasion un autre numéro spécial qui reprend, comme à Florence et à Rome, le titre de l’ancien quotidien direct de Malatesta. Celui-ci contient aussi, avec l’invitation à renforcer le Front Unique des Travailleurs, une lettre ouverte aux partis du CLN [note] revendiquant une reconnaissance égale avec les autres groupes antifascistes.
Au cours de ces mêmes journées d’avril, l’édition de Florence préfigure l’imminente fondation de la F.A.I.et le programme à proposer “aux camarades du nord”. Les points principaux de cette déclaration d’intentions coïncident avec les programmes "minimaux" déjà énoncés sous d’autres formes. Il s’agit d’un mix de syndicalisme, de municipalisme fédéraliste, de communisme libertaire et de républicanisme social, avec une forte tension utopique qui a comme référence "institutionnelle" la libre Commune, le Syndicat, le Conseil de Gestion.
Umanità Nova de l’après-guerre à nos jours
Le congrès fondateur de la F.A.I. (Carrara, 1945) décide de la publication à Rome de l’hebdomadaire Umanità Nova comme outil de propagande et de débat interne pour tout le mouvement.
Désormais le journal se pose, en diverses circonstances, comme le porte-parole du mouvement libertaire, présent avec des fortunes diverses, dans le monde du travail, dans la culture progressiste, dans la gauche unitaire, dans les manifestations de l’opposition radicale et de classe. Les changements de rédaction marquent des inflexions et des mutations de perspective. Dans une première et longue phase, gérée par Armando Borghi, le journal a pour référents ces secteurs avancés de l’opinion publique attentifs aux droits civils et aux luttes pacifistes. Après l’année 1965, année de la scission de la FAI des Groupes d’Initiative Anarchiste, on entre dans une décennies mouvementée rythmée, à partir de la contre-information sur le Massacre d’État de 1969 [note] , par la renaissance des instances libertaires dans les milieux juvéniles et ouvriers.
1974 est l’année du tournant. La rédaction est transférée à Milan ; sur la base de décisions de Congrès, elle devient collégiale et assumée à tour de rôle par divers groupes (et il en sera ainsi jusqu’à aujourd’hui). Elle passe successivement à Bologne puis Carrara, à nouveau Milan, puis Livorno, Spezzano Albanese et Turin, cette dernière étant une rédaction collégiale à laquelle participent des compagnons et des compagnes de Turin, Milan, Reggio Emilia, Bologne, Spezzano Albanese, en liaison internet : l’adresse postale est à Turin.
Jusqu’en 1974, Umanità Nova a été tiré à l’imprimerie G.A.T.E. de Rome, tout comme Paese Sera et l’Unità. Depuis lors, le mouvement anarchiste décide de se doter d’une imprimerie, qui est installée à Carrara pour y réaliser une grande partie des publications anarchistes. La presse est off-set, tandis que la composition, au départ sur IBM, se fait depuis 1980 moyennant une photocomposeuse assistée. Cet équipement permet d’ajouter des unités périphériques, avec une réduction conséquente du temps de travail. Et c’est précisément pour une meilleure utilisation des machines disponibles qu’est ensuite lancée une souscription pour l’acquisition d’un ordinateur. Et enfin l’utilisation optimale des outils informatiques devient le point d’arrivée des dernières années.
Actuellement le montage et la mise en page d’Umanità Nova sont faits directement par la rédaction qui s’occupe d’envoyer directement la mise en page bonne à tirer à l’imprimerie. Pendant plus d’un quart de siècle, malgré les relèves rédactionnelles, l’hebdomadaire de la FAI continue à voir le jour dans les locaux historiques de la Cooperativa Tipolitografica [note] (autrefois Il Seme) rue San Piero, à Carrara. L’engagement de sortir le journal en temps et en heure et l’effort d’adaptation aux innovations technologiques ont été assurés, au cours des dernières décennies, grâce à la contribution et au travail de nombre de camarades (et à l’assiduité d’Alfo [note] ). En conséquence, depuis les mouvements de 68 en passant par ceux de 77... et jusqu’en 2000, le fil noir et rouge de la proposition anarchiste continue à se dévider, avec toujours en écho, la feuille fondée par Malatesta.
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EDITORIAL DU N° 1 DU JOURNAL UMANITA NOVA, PAR ERRICO MALATESTA
Le 27 février 1920
NOS OBJECTIFS
Nous sommes anarchistes, anarchistes au sens propre et commun du mot ; à savoir que nous voulons détruire cet ordre social par lequel les personnes en lutte entre elles, s’exploitent et s’oppriment, ou tendent à s’exploiter et s’opprimer mutuellement, pour atteindre une nouvelle société où, dans la solidarité et l’amour, toutes les personnes trouveront une liberté complète, la satisfaction maximale de leurs propres besoins et de leurs propres désirs, le plus grand développement possible de leurs facultés intellectuelles et affectives.
Personne ne pourrait dire exactement quelles sont les modalités concrètes de réalisation de cette vie de liberté à laquelle nous aspirons ; et personne, surtout, ne pourrait, en tant qu’anarchiste, envisager d’imposer aux autres la façon meilleure à ses yeux. La seule façon d’arriver à la découverte de ce qui est le mieux, c’est la liberté, liberté de rassemblement, liberté d’expérience, liberté complète sans autre limite sociale que celle de l’égale liberté des autres.
Parmi les anarchistes, il y en a qui aiment se dire communistes, ou collectivistes, ou individualistes, ou autrement encore. C’est souvent une question de termes interprétés différemment qui opacifie la similitude fondamentalement identique des aspirations ; parfois il ne s’agit que de théories, d’hypothèses, par lesquelles on explique et on justifie des pratiques identiques.
Nous ne voyons pas de raison pour que ces camarades de différents courants ne puissent pas œuvrer en commun, quand la finalité est commune et les moyens ne sont pas contradictoires. Par ailleurs, il y a des anarchistes qui accordent la plus haute importance à l’action révolutionnaire qui brise violemment la violence étatique et la domination capitaliste, afin de créer le nouvel environnement de liberté qui rende possible l’accession des masses à une vie meilleure ; et d’autres font en revanche davantage confiance à la diffusion progressive de l’Idée au moyen de la propagande et de l’éducation.
Cela est fonction d’une appréciation différente de la situation ou relève simplement de différences de tempérament ou de dispositions personnelles ; mais ne devrait pas empêcher une coopération amicale et une répartition utile de la tâche à accomplir.
Quoi qu’il en soit, toutes ces tendances, ou écoles si l’on veut, trouveront en Umanità Nova leur organe de presse et leur terrain de lutte, pourvu qu’elles acceptent les principes suivants, qui sont, d’après nous, le phare qui éclaire le mouvement anarchiste et le guide sur la voie sur laquelle il doit avancer.
Lutte contre l’ignorance, contre le mensonge religieux, contre les préjugés, les rivalités et les haines nationales ou racistes ; lutte contre l’esprit de domination d’une part et de soumission d’autre part ; lutte contre les institutions économiques et politiques en vigueur sans la moindre tractation ou coopération avec les classes du patronat ou les organes étatiques ; préparation morale et technique des masses à l’avènement d’une société où chaque personne ait libre accès à la terre, aux matières premières, aux outils de travail, de sorte que personne ne soit dans l’obligation de vendre son propre travail et de se faire exploiter par qui détient ces moyens de travail et n’en fait pas directement usage par son travail personnel, une société où chaque personne soit totalement libre sans que personne d’autre, individu ou compagnie, ne puisse lui imposer par la force sa propre volonté.
Donc, Abolition du capitalisme, dont le système de production est fait pour le profit d’un petit nombre et pas pour la satisfaction des besoins de toutes les personnes, entraînant misère et dégradation des masses prolétaires. Abolition de l’État, même camouflé, avec ses organes législatifs, judiciaires et militaires. Constitution de libres communautés anarchistes unies volontairement dans une fraternité effective et la coopération avec tous les peuples du monde.
Et, pratiquement, le jour où le gouvernement sera abattu et qu’on en aura la possibilité matérielle : Prise de possession (de la façon la plus ordonnée possible et avec les orientations de groupes conscients) par le peuple soulevé, de toutes les richesses existantes, maisons, aliments et autres articles de consommation, puis distribution équitable, proportionnellement aux besoins et aux quantité disponibles. Confiscation par les personnes travailleuses, de la terre, des bureaux, des moyens de transport, des machines et autres instruments de travail ; et organisation immédiate de la production et de l’échange, opérée par toutes les personnes, au profit et à l’avantage de toutes les personnes, par les moyens, toujours modifiables et perfectibles, jugés les meilleurs par les personnes concernées.
Une organisation attentive de l’instruction publique ouverte à toutes les personnes à tous les niveaux, des services médicaux et d’hygiène, et de l’assainissement urgent des territoires en révolution pour l’augmentation de la production et l’adaptation aux besoins et la jouissance humaine. Résistance organisée contre les tentatives possibles de réaction et de restauration du régime tombé. Opposition à toute tentative de nouveaux gouvernements et de nouvelles organisations autoritaires et d’oppression.
Voici les principes et les objectifs qui nous unissent. Et si, d’aventure, il se trouvait des personnes qui, tout en se déclarant anarchistes, se désintéresseraient du sort général et ne voudraient que leur liberté et leur épanouissement personnel sans se soucier du bien-être, de la liberté et de l’élévation morale des autres, ou bien des personnes qui croient pouvoir arriver à la Liberté au moyen de l’autorité, eh bien, nous ne pouvons empêcher personne de se donner un nom quel qu’il soit, mais nous disons que leur anarchisme n’est pas notre anarchisme. Ces personnes pourront sans doute trouver l’hospitalité dans notre journal, mais ce ne sera qu’à titre d’information et de discussion aux fins de notre propagande.
Mais, surtout, même si nous faisons une part aux dissertations théoriques et aux expressions savantes, nous n’entendons pas jouer de virtuosité gratuite. Les temps sont trop orageux, les événements se pressent trop vite pour permettre aux camarades de s’attarder dans des discussions abstruses et des poses cosmétiques. Nous ne le voulons pas, nous devons être un journal de combat.
Quand le système en vigueur, capitaliste et étatique, a donné ses pires fruits ; quand la nécessité d’une profonde transformation sociale est évidente pour tous les êtres pensants, non aveuglés par la peur sordide de devoir renoncer à des privilèges usurpés, quand tout le pays souffre et tremble ; quand la révolution paraît imminente et incontournable, qu’il n’est plus question que du tour plus ou moins radical que cette révolution doit prendre, nous ne pouvons plus nous borner à être une poignée d’avant-gardistes qui fait de la propagande et lutte pour un lointain idéal de perfection, qui prévoit et exhorte dans le désert, en se contentant d’avoir raison… une fois que les faits sont advenus.
Nous devons être une force vive qui concoure continuellement, efficacement, et donc au moment même où l’occasion se présente, à la détermination des faits sociaux et empêcher que ceux-ci soient exploités par des personnes rusées profitant de la naïveté des humbles, et pour les pousser vers la pleine réalisation de l’idéal libertaire.
C’est pourquoi nous devons porter notre propagande au plus profond des masses. Nous devons faire entendre notre voix et connaître notre action au sein de toutes les luttes ouvrières, de tous les mouvements populaires. Toujours et partout, nous devons susciter chez les personnes qui souffrent une conscience vive et l’impatience à l’égard des injustices dont elles sont victimes : Leur inspirer confiance dans leurs propres forces et les pousser à agir par elles-mêmes, directement, en coopération avec leurs camarades de peine et d’aspirations.
C’est l’œuvre pour laquelle nous lançons un appel à toutes les personnes généreuses qui aspirent à la libération humaine. Nous lançons un appel général, y compris aux classes privilégiées dans le cas où elles sentiraient toute la honte de leurs privilèges de classe, résultant des affres, du supplice, de l’avilissement des personnes travailleuses et viendraient vers nous sans calculs, sans ambitions, juste dans le désir de bien faire, avec une soif d’amour.
Nous faisons surtout appel aux prolétaires ayant une conscience politique, car l’histoire leur confie la mission d’être les principaux artisans des prochains bouleversements sociaux.
Aux camarades, aux anarchistes, nous disons : apportez-nous votre soutien le plus ardent et constant à votre journal si vous pensez que ce soit une œuvre utile ; mais n’imaginez-pas qu’un soutien au journal suffise pour avoir fait tout votre devoir.
Le journal n’est que l’un de nos moyens d’action. Si, au lieu de susciter de nouvelles forces, des initiatives plus audacieuses et bouillonnantes, devait absorber toutes nos forces et étouffer toute autre activité, ce serait vraiment malheureux et absolument pas une affirmation de sa vigueur, une preuve de sa force, sa vitalité et sa hardiesse.
En outre, il y a une partie du travail qui ne peut, par définition, être faite par le journal ou par les journaux. Comme le journal doit s’adresser au public, il doit nécessairement parler devant l’ennemi, et il y a des circonstances dans lesquelles l’ennemi ne doit pas être informé. Les camarades doivent y veiller... en d’autres lieux ! Et à présent, au travail !
De 1920 au fascisme
Le mouvement anarchiste caressait depuis longtemps le projet de publier un quotidien et avait été très près de le réaliser en 1908-09 avec "La Protesta Umana" de Milan. Une réunion fédérale à Rome, en 1911, adopte ensuite d’idée de l’édition d’une feuille unique nationale qui sortirait au retour d’exil d’Errico Malatesta. Après la guerre, les publications anarchistes en langue italienne refleurissent. Au moment de la fondation de l’Union Communiste Anarchiste Italienne, à Florence, en 1919, les bases sont jetées pour une collaboration, depuis des positions différentes, de tous les courants. C’est le passage nécessaire pour la parution du quotidien Umanità Nova. La circulaire-programme du nouveau journal est rédigée par Malatesta. Les adhésions sont recueillies par un comité siégeant à Milan et animé par Ettore Molinari.
Le 26-27 février 1920, le numéro 1 du quotidien Umanità Nova sort (salué par des mots de sympathie par Avanti [note] !). Depuis le début, il y a des tentatives de perturber sa parution en empêchant la livraison du papier (pourtant déjà payé) depuis les fabriques de papier de l’État. Ce sont les mineurs de la Vallée de l’Arno qui, en employant l’arme de la menace de grève dans les mines de lignite (qui fournissaient à leur tour ces fabriques), qui imposent alors le déblocage de la situation. En un mois, le tirage atteint les 60 000 exemplaires (ensuite la moyenne se situera à environ la moitié). Une première souscription est lancée qui s’élève à 16.737,48 lires. À Boston 4000 dollars sont collectés pour l’acquisition d’une rotative (déjà utilisée par l’Autriche pour la propagande de guerre) et d’un Monotype. "
C’est un journal – écrit le Préfet de Milan dans son rapport au ministère-, fondé grâce à des fonds provenant de souscriptions d’anarchistes et sympathisants des diverses régions d’Italie, et à des souscriptions de l’étranger et notamment des sommes très importantes reçues d’Amérique qui continuent à affluer. C’est un journal plutôt bien diffusé parmi les masses ouvrières et ce qui a contribué à une plus grande diffusion a été le prix de vente, maintenu à dix centimes. Il a sa propre imprimerie au 3 rue Goldoni, mais les frais de rédaction et d’administration ne sont pas excessifs, le personnel de rédaction et celui consacré à l’impression du journal étant réduit".
L’activité d’Umanità Nova (d’abord quotidien à Milan et qui voit sa publication interrompue suite aux événements du Diana [note] , puis à Rome, où il sort hebdomadairement ou irrégulièrement jusqu’à la fermeture définitive de 1922) est suivie et documentée par la Direction Générale de la Sécurité Publique. Après la “grande espérance” et la défaite du mouvement d’occupation des usines, et en dépit de l’arrestation de toute sa rédaction, le journal continue à sortir. La bonne fortune du fascisme est étroitement liée à l’élimination violente de toute forme d’opposition. Les décrets relatifs à la presse en vigueur depuis 1924 et la législation d’exception pour la Défense de l’État ne feront qu’officialiser une situation de fait. Les journaux anarchistes subissent un sort analogue à celui de la presse du mouvement syndical et socialiste, des populaires, du camp des démocrates. Les agressions se produisent de façon organisée : d’abord les quotidiens de lutte militante, puis les journaux de réflexion culturelle et de débat politique. Le nombre de titres de presse anarchistes passe ainsi de 28 en 1923 à 3 en 1926.
C’est aux "camarades de Rome" qu’il revient – une fois la rédaction milanaise en cessation d’activité du fait de la destruction de ses locaux- d’envoyer une circulaire aux diffuseurs et correspondants du journal, pour annoncer la reprise de sa parution. La fermeture définitive du journal (qui passe d’une édition quotidienne à une édition hebdomadaire en août 1922), a lieu à la fin de cette même année (avec le numéro 196 du 2 décembre) suivant des étapes bien précises : plaintes pour outrages ; lourdes amendes pour de présumées irrégularités administratives ; imprimerie ravagée par les fascistes. L’acte final est la plainte déposée par la Préfecture de Police contre vingt anciens membres de la rédaction, correspondants et membres du conseil d’administration pour délits d’opinion. Ce à quoi s’ajoute la séquestration de documents, la confiscation de la caisse du journal. Parmi les imputés, un certain Voline, "sujet russe non identifié".
Le “retour” d’Umanità Nova et la Résistance
Umanità Nova sort à nouveau de 1943 à 1945, avec des dizaines de numéros et des milliers d’exemplaires de tirage imprimés à Florence, Gênes et Rome, il est la bannière de l’insurrection armée antifasciste, de l’opposition à la dictature militaire alliée. Une importante réunion clandestine dans la capitale toscane avait abouti à la décision de publier à nouveau le titre de presse. Un total de 14 numéros paraîtront jusqu’en mai, le tirage est de 8.000 exemplaires. Lato Latini est condamné pour ces faits, en tant que typographe et responsable, à cinq ans de prison par la Cour de justice alliée ; peine ramenée en appel une année, entièrement purgée à la prison "Le Murate" de Florence.
Le premier numéro clandestin d’Umanità Nova ouvre sur l’éditorial : "Salut à vous, camarades d’Italie et de tous pays ; après un silence long et forcé, nous reprenons avec une flamme immuable notre poste au combat pour la libération de toutes les personnes opprimées”. Se réclamant ensuite de Malatesta et explicitement des théories du communisme anarchiste, aussi bien que de l’Association Internationale des Travailleurs, soulignant à nouveau les principes bien connus du front unique antifasciste, le journal rend compte des grèves en cours "pour la paix et pour la liberté" et précise que les responsabilités des horreurs de la guerre devront peser également, à partir du 25 juillet, "sur la monarchie et sur le gouvernement monarchiste". Il est reproché durement à la Confédération Générale du Travail d’avoir collaboré avec Badoglio [note] et se place comme alternative :"Nos syndicats doivent réunir toutes leurs forces dans l’entreprise, tout le personnel (technicien, manœuvre, etc.) doit avoir ses commissions internes, librement élues par les personnes travailleuses qui en règlementeront le fonctionnement et le développement afin que tout conduise au passage à la propriété collective".
En juin 1944, les anarchistes de Rome sortent leur Umanità Nova, un "numéro spécial commémoratif, signé de la Fédération Communiste Libertaire Italienne".
Depuis la ville de Gênes et ses dockers, véritable épicentre de la résistance, en cette veille du mouvement insurrectionnel définitif, la Fédération Communiste Libertaire lance son appel aux Partisans anarchistes et au peuple -“C’est l’heure !"– et diffuse pour l’occasion un autre numéro spécial qui reprend, comme à Florence et à Rome, le titre de l’ancien quotidien direct de Malatesta. Celui-ci contient aussi, avec l’invitation à renforcer le Front Unique des Travailleurs, une lettre ouverte aux partis du CLN [note] revendiquant une reconnaissance égale avec les autres groupes antifascistes.
Au cours de ces mêmes journées d’avril, l’édition de Florence préfigure l’imminente fondation de la F.A.I.et le programme à proposer “aux camarades du nord”. Les points principaux de cette déclaration d’intentions coïncident avec les programmes "minimaux" déjà énoncés sous d’autres formes. Il s’agit d’un mix de syndicalisme, de municipalisme fédéraliste, de communisme libertaire et de républicanisme social, avec une forte tension utopique qui a comme référence "institutionnelle" la libre Commune, le Syndicat, le Conseil de Gestion.
Umanità Nova de l’après-guerre à nos jours
Le congrès fondateur de la F.A.I. (Carrara, 1945) décide de la publication à Rome de l’hebdomadaire Umanità Nova comme outil de propagande et de débat interne pour tout le mouvement.
Désormais le journal se pose, en diverses circonstances, comme le porte-parole du mouvement libertaire, présent avec des fortunes diverses, dans le monde du travail, dans la culture progressiste, dans la gauche unitaire, dans les manifestations de l’opposition radicale et de classe. Les changements de rédaction marquent des inflexions et des mutations de perspective. Dans une première et longue phase, gérée par Armando Borghi, le journal a pour référents ces secteurs avancés de l’opinion publique attentifs aux droits civils et aux luttes pacifistes. Après l’année 1965, année de la scission de la FAI des Groupes d’Initiative Anarchiste, on entre dans une décennies mouvementée rythmée, à partir de la contre-information sur le Massacre d’État de 1969 [note] , par la renaissance des instances libertaires dans les milieux juvéniles et ouvriers.
1974 est l’année du tournant. La rédaction est transférée à Milan ; sur la base de décisions de Congrès, elle devient collégiale et assumée à tour de rôle par divers groupes (et il en sera ainsi jusqu’à aujourd’hui). Elle passe successivement à Bologne puis Carrara, à nouveau Milan, puis Livorno, Spezzano Albanese et Turin, cette dernière étant une rédaction collégiale à laquelle participent des compagnons et des compagnes de Turin, Milan, Reggio Emilia, Bologne, Spezzano Albanese, en liaison internet : l’adresse postale est à Turin.
Jusqu’en 1974, Umanità Nova a été tiré à l’imprimerie G.A.T.E. de Rome, tout comme Paese Sera et l’Unità. Depuis lors, le mouvement anarchiste décide de se doter d’une imprimerie, qui est installée à Carrara pour y réaliser une grande partie des publications anarchistes. La presse est off-set, tandis que la composition, au départ sur IBM, se fait depuis 1980 moyennant une photocomposeuse assistée. Cet équipement permet d’ajouter des unités périphériques, avec une réduction conséquente du temps de travail. Et c’est précisément pour une meilleure utilisation des machines disponibles qu’est ensuite lancée une souscription pour l’acquisition d’un ordinateur. Et enfin l’utilisation optimale des outils informatiques devient le point d’arrivée des dernières années.
Actuellement le montage et la mise en page d’Umanità Nova sont faits directement par la rédaction qui s’occupe d’envoyer directement la mise en page bonne à tirer à l’imprimerie. Pendant plus d’un quart de siècle, malgré les relèves rédactionnelles, l’hebdomadaire de la FAI continue à voir le jour dans les locaux historiques de la Cooperativa Tipolitografica [note] (autrefois Il Seme) rue San Piero, à Carrara. L’engagement de sortir le journal en temps et en heure et l’effort d’adaptation aux innovations technologiques ont été assurés, au cours des dernières décennies, grâce à la contribution et au travail de nombre de camarades (et à l’assiduité d’Alfo [note] ). En conséquence, depuis les mouvements de 68 en passant par ceux de 77... et jusqu’en 2000, le fil noir et rouge de la proposition anarchiste continue à se dévider, avec toujours en écho, la feuille fondée par Malatesta.
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EDITORIAL DU N° 1 DU JOURNAL UMANITA NOVA, PAR ERRICO MALATESTA
Le 27 février 1920
NOS OBJECTIFS
Nous sommes anarchistes, anarchistes au sens propre et commun du mot ; à savoir que nous voulons détruire cet ordre social par lequel les personnes en lutte entre elles, s’exploitent et s’oppriment, ou tendent à s’exploiter et s’opprimer mutuellement, pour atteindre une nouvelle société où, dans la solidarité et l’amour, toutes les personnes trouveront une liberté complète, la satisfaction maximale de leurs propres besoins et de leurs propres désirs, le plus grand développement possible de leurs facultés intellectuelles et affectives.
Personne ne pourrait dire exactement quelles sont les modalités concrètes de réalisation de cette vie de liberté à laquelle nous aspirons ; et personne, surtout, ne pourrait, en tant qu’anarchiste, envisager d’imposer aux autres la façon meilleure à ses yeux. La seule façon d’arriver à la découverte de ce qui est le mieux, c’est la liberté, liberté de rassemblement, liberté d’expérience, liberté complète sans autre limite sociale que celle de l’égale liberté des autres.
Parmi les anarchistes, il y en a qui aiment se dire communistes, ou collectivistes, ou individualistes, ou autrement encore. C’est souvent une question de termes interprétés différemment qui opacifie la similitude fondamentalement identique des aspirations ; parfois il ne s’agit que de théories, d’hypothèses, par lesquelles on explique et on justifie des pratiques identiques.
Nous ne voyons pas de raison pour que ces camarades de différents courants ne puissent pas œuvrer en commun, quand la finalité est commune et les moyens ne sont pas contradictoires. Par ailleurs, il y a des anarchistes qui accordent la plus haute importance à l’action révolutionnaire qui brise violemment la violence étatique et la domination capitaliste, afin de créer le nouvel environnement de liberté qui rende possible l’accession des masses à une vie meilleure ; et d’autres font en revanche davantage confiance à la diffusion progressive de l’Idée au moyen de la propagande et de l’éducation.
Cela est fonction d’une appréciation différente de la situation ou relève simplement de différences de tempérament ou de dispositions personnelles ; mais ne devrait pas empêcher une coopération amicale et une répartition utile de la tâche à accomplir.
Quoi qu’il en soit, toutes ces tendances, ou écoles si l’on veut, trouveront en Umanità Nova leur organe de presse et leur terrain de lutte, pourvu qu’elles acceptent les principes suivants, qui sont, d’après nous, le phare qui éclaire le mouvement anarchiste et le guide sur la voie sur laquelle il doit avancer.
Lutte contre l’ignorance, contre le mensonge religieux, contre les préjugés, les rivalités et les haines nationales ou racistes ; lutte contre l’esprit de domination d’une part et de soumission d’autre part ; lutte contre les institutions économiques et politiques en vigueur sans la moindre tractation ou coopération avec les classes du patronat ou les organes étatiques ; préparation morale et technique des masses à l’avènement d’une société où chaque personne ait libre accès à la terre, aux matières premières, aux outils de travail, de sorte que personne ne soit dans l’obligation de vendre son propre travail et de se faire exploiter par qui détient ces moyens de travail et n’en fait pas directement usage par son travail personnel, une société où chaque personne soit totalement libre sans que personne d’autre, individu ou compagnie, ne puisse lui imposer par la force sa propre volonté.
Donc, Abolition du capitalisme, dont le système de production est fait pour le profit d’un petit nombre et pas pour la satisfaction des besoins de toutes les personnes, entraînant misère et dégradation des masses prolétaires. Abolition de l’État, même camouflé, avec ses organes législatifs, judiciaires et militaires. Constitution de libres communautés anarchistes unies volontairement dans une fraternité effective et la coopération avec tous les peuples du monde.
Et, pratiquement, le jour où le gouvernement sera abattu et qu’on en aura la possibilité matérielle : Prise de possession (de la façon la plus ordonnée possible et avec les orientations de groupes conscients) par le peuple soulevé, de toutes les richesses existantes, maisons, aliments et autres articles de consommation, puis distribution équitable, proportionnellement aux besoins et aux quantité disponibles. Confiscation par les personnes travailleuses, de la terre, des bureaux, des moyens de transport, des machines et autres instruments de travail ; et organisation immédiate de la production et de l’échange, opérée par toutes les personnes, au profit et à l’avantage de toutes les personnes, par les moyens, toujours modifiables et perfectibles, jugés les meilleurs par les personnes concernées.
Une organisation attentive de l’instruction publique ouverte à toutes les personnes à tous les niveaux, des services médicaux et d’hygiène, et de l’assainissement urgent des territoires en révolution pour l’augmentation de la production et l’adaptation aux besoins et la jouissance humaine. Résistance organisée contre les tentatives possibles de réaction et de restauration du régime tombé. Opposition à toute tentative de nouveaux gouvernements et de nouvelles organisations autoritaires et d’oppression.
Voici les principes et les objectifs qui nous unissent. Et si, d’aventure, il se trouvait des personnes qui, tout en se déclarant anarchistes, se désintéresseraient du sort général et ne voudraient que leur liberté et leur épanouissement personnel sans se soucier du bien-être, de la liberté et de l’élévation morale des autres, ou bien des personnes qui croient pouvoir arriver à la Liberté au moyen de l’autorité, eh bien, nous ne pouvons empêcher personne de se donner un nom quel qu’il soit, mais nous disons que leur anarchisme n’est pas notre anarchisme. Ces personnes pourront sans doute trouver l’hospitalité dans notre journal, mais ce ne sera qu’à titre d’information et de discussion aux fins de notre propagande.
Mais, surtout, même si nous faisons une part aux dissertations théoriques et aux expressions savantes, nous n’entendons pas jouer de virtuosité gratuite. Les temps sont trop orageux, les événements se pressent trop vite pour permettre aux camarades de s’attarder dans des discussions abstruses et des poses cosmétiques. Nous ne le voulons pas, nous devons être un journal de combat.
Quand le système en vigueur, capitaliste et étatique, a donné ses pires fruits ; quand la nécessité d’une profonde transformation sociale est évidente pour tous les êtres pensants, non aveuglés par la peur sordide de devoir renoncer à des privilèges usurpés, quand tout le pays souffre et tremble ; quand la révolution paraît imminente et incontournable, qu’il n’est plus question que du tour plus ou moins radical que cette révolution doit prendre, nous ne pouvons plus nous borner à être une poignée d’avant-gardistes qui fait de la propagande et lutte pour un lointain idéal de perfection, qui prévoit et exhorte dans le désert, en se contentant d’avoir raison… une fois que les faits sont advenus.
Nous devons être une force vive qui concoure continuellement, efficacement, et donc au moment même où l’occasion se présente, à la détermination des faits sociaux et empêcher que ceux-ci soient exploités par des personnes rusées profitant de la naïveté des humbles, et pour les pousser vers la pleine réalisation de l’idéal libertaire.
C’est pourquoi nous devons porter notre propagande au plus profond des masses. Nous devons faire entendre notre voix et connaître notre action au sein de toutes les luttes ouvrières, de tous les mouvements populaires. Toujours et partout, nous devons susciter chez les personnes qui souffrent une conscience vive et l’impatience à l’égard des injustices dont elles sont victimes : Leur inspirer confiance dans leurs propres forces et les pousser à agir par elles-mêmes, directement, en coopération avec leurs camarades de peine et d’aspirations.
C’est l’œuvre pour laquelle nous lançons un appel à toutes les personnes généreuses qui aspirent à la libération humaine. Nous lançons un appel général, y compris aux classes privilégiées dans le cas où elles sentiraient toute la honte de leurs privilèges de classe, résultant des affres, du supplice, de l’avilissement des personnes travailleuses et viendraient vers nous sans calculs, sans ambitions, juste dans le désir de bien faire, avec une soif d’amour.
Nous faisons surtout appel aux prolétaires ayant une conscience politique, car l’histoire leur confie la mission d’être les principaux artisans des prochains bouleversements sociaux.
Aux camarades, aux anarchistes, nous disons : apportez-nous votre soutien le plus ardent et constant à votre journal si vous pensez que ce soit une œuvre utile ; mais n’imaginez-pas qu’un soutien au journal suffise pour avoir fait tout votre devoir.
Le journal n’est que l’un de nos moyens d’action. Si, au lieu de susciter de nouvelles forces, des initiatives plus audacieuses et bouillonnantes, devait absorber toutes nos forces et étouffer toute autre activité, ce serait vraiment malheureux et absolument pas une affirmation de sa vigueur, une preuve de sa force, sa vitalité et sa hardiesse.
En outre, il y a une partie du travail qui ne peut, par définition, être faite par le journal ou par les journaux. Comme le journal doit s’adresser au public, il doit nécessairement parler devant l’ennemi, et il y a des circonstances dans lesquelles l’ennemi ne doit pas être informé. Les camarades doivent y veiller... en d’autres lieux ! Et à présent, au travail !
PAR : Giorgio Sacchetti
FAI Italie
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