Le Monde Libertaire

Chroniques du temps réel > « Plutôt Hitler que le Front populaire » en 2025 ??

Chroniques du temps réel

par Francis PIAN • le 8 novembre 2025

« Plutôt Hitler que le Front populaire » en 2025 ??

Lien permanent : https://monde-libertaire.net/index.php?articlen=8673

Au gré des élections, nous constatons la montée régulière du Front/Rassemblement national en nombre de voix. Rappelons que l’expression Rassemblement national est d’origine pétainiste. Lorsque Le Pen s’est retrouvé au second tour des élections présidentielles en 2002, ce fut une marée humaine dans les rues pour crier le rejet de l’idéologie véhiculée par ce personnage. Puis au fil du temps, la société, les médias, le monde des affaires banalisent cette montée. Nous connaissons tous les propos à l’emporte-pièce : « On n’a pas essayé », « Rien à voir avec l’Allemagne nazie », « Le RN d’aujourd’hui n’est pas le FN d’hier » … Aujourd’hui, nous lisons des propos antisémites dignes de l’entre-deux-guerres sur les réseaux sociaux. Parmi les gens que nous côtoyons, il y a nécessairement des électeurs, des militants d’extrêmedroite et ils ne s’en cachent pas. Les digues dites républicaines sont ouvertement rompues depuis juin 2024, même si des manœuvres antérieures dans le monde des médias et les entreprises préparaient le terrain, considérant que le danger, c’est la gauche. Les médias ont largement développé cette phraséologie.

Ce constat, Laurent Mauduit le relève dans son livre Collaborations, enquête sur l’extrême droite et les milieux d’affaires publié récemment à La Découverte. Les médias assument dont le célèbre empire Bolloré. L’extrême droite organise le débat, choisit les thèmes clivants. Les patrons aident au financement des mouvements et groupuscules, les médias invitent leurs représentants dans les débats, sans oublier la profusion de sites sur internet.
La digue est rompue, mais ne demandez pas aux patrons de s’excuser. L’argument revient en boucle : Tous les patrons ont rencontré Marine Le Pen et auparavant son père. Il faut faire tourner nos entreprises. On a déjà entendu cela pendant l’occupation… Des réseaux puissants s’organisent dans l’économie, la finance. Les noms nous sont connus : Ambroise Roux, Claude Bébéar, Pierre-Edouard Stérin, des cadres et dirigeants du Medef, de l’Association française des entreprises privées. Ils/elles se connaissent, habitent dans les mêmes quartiers, échangent de bons services, s’impliquent dans les stratégies de la haute administration. Ils sont fascinés par la politique de Trump et le personnage, la victoire du cynisme et de la vulgarité. Moins d’Etat, moins d’impôts, démanteler le modèle social et les services publics, la mafia libertarienne est en marche comme une forme d’Internationale.

La constitution des réseaux
Comment diffuser ces idées ? En constituant des réseaux, des empires. Laurent Mauduit expose la construction de la sphère Bolloré, celle de Dassault avec Le Figaro, Stérin et son projet Périclès , des participations financières croisées, le recrutement de voix dans la presse audiovisuelle, de plume dans celle écrite. Là aussi les noms nous sont connus. A chaque initiative vaguement sociale, la stratégie est bien huilée. On mobilise des associations plus ou moins factices, on les invite sur les plateaux avec des personnages dits respectables du patronat qui gémissent qu’ils ploient sous l’impôt et menacent de quitter le territoire national.
Le saccage des maisons d’éditions est inquiétant. Songeons au rachat de Fayard, nous avons apprécié cette maison comme l’une des plus brillantes dans les publications historiques. Il suffit d’aller sur son site pour constater l’indigence des contenus et l’homogénéité de l’idéologie diffusée actuellement. Il faut s’interroger aussi sur les menaces pesant sur le groupe Editis.

Le monde des petits patrons commence à s’afficher. Nous avons en mémoire le poujadisme des années 50 opposé à l’impôt et au contrôle fiscal, relayé dans les années 70 par le Cid- Unati. Les commerçants adhèrent aujourd’hui au RN, n’oublions pas que ce sont de redoutables relais d’opinion. La CGPME reste aussi à observer.
Laurent Mauduit analyse le comparatif entre les patronats allemand et français. Il fait appel aux travaux de Johann Chapoutot notamment son récent ouvrage Les irresponsables : Qui a porté Hitler au pouvoir ? chez Gallimard, d’Eric Vuillard, L’ordre du jour publié chez Actes Sud. Le livre de Laurent Mauduit fourmille de références précises, le lecteur peut donc s’appuyer sur les éléments fournis qui n’ont fait l’objet à ce jour d’aucun contentieux de la part des intéressés.
Et l’auteur de conclure ainsi ses propos : « Surmonter les divisions, faire front commun contre les dangers qui se rapprochent : le fascisme d’un côté, et de l’autre, ce nouveau capitalisme libertarien qui s’étend. Car l’histoire récente le confirme : ces deux périls n’en forment désormais plus qu’un ».

Retrouvez Laurent Mauduit dans l’émission Médias et antifascisme le vendredi 14 novembre à 11h30 et dans Pas de quartiers mardi 23 décembre de 18h00 à 19h30 diffusées sur Radio libertaire.

• Laurent Mauduit
Collaborations
Enquête sur l’extrême-droite et les milieux d’affaires
Ed. La Découverte, 2025

PAR : Francis PIAN
Groupe Commune de Paris
Emission Au fil des pages sur Radio libertaire

Réagir à cet article

Écrire un commentaire ...

Poster le commentaire

Annuler

« Plutôt Hitler que le Front populaire » en 2025 ??

Numéro en cours

Fouiller autrement

Glané sur le web