Femmes dissidentes au Moyen-Orient

mis en ligne le 11 décembre 2014
Voilà donc un livre de passion. Quatre femmes interviewées sur leur militantisme, leur féminisme, leur vie déterminée par le conflit israélo-palestinien.
Quatre femmes « boulets de canon » que, dès leur prise de conscience par rapport aux injustices aux crimes, dont elles furent témoins, rien n’a pu arrêter ni la prison, ni la torture, et encore moins les attaques terribles contre elles et leur famille. Comme le dit Michal Schwartz : « Au début de mon emprisonnement, j’ai vécu cela comme les milliers d’autres détenus-es. Si l’on se considère comme juif, cela parait injuste. Mais en tant qu’ être humain luttant contre l’occupation, on fait partie d’un large mouvement, c’est-à-dire de ces milliers de personnes qui sont, ou ont été en prison. Alors, Juifs, Juives, ou Arabes, peu importe ! ».
Ana Mer Khamis, issue d’une famille juive immigrée en Palestine dans les années 1880 et qui a épousé un palestinien Saliba Khamis, malgré toutes les difficultés qu’il est aisé d’imaginer, a créé l’association Care and learning pour les enfants palestiniens. Les écoles palestiniennes ayant été fermées par les autorités militaires israéliennes, elle crée des homes d’enfants et une bibliothèque dans le camp de réfugiés-és de Jenine.
Arna Mer, dont les parents furent massacrés durant l’Holocauste dit dans ce livre une parole très forte : « Il n’est pas juste que les Palestiniens–nes soient rendus-es coupables des atrocités du fascisme et du nazisme. »
Léa Tsemel dit d’Arna : « J’étais son avocate lors de ses arrestations. Je me souviens d’elle , dans les manifestations des années 1980. La répression était très violente. Arna combattait littéralement et physiquement contre les soldats et se couchait même devant les véhicules militaires. Les soldats lui avaient donné le surnom d’un char militaire russe. Elle était très impressionnante. »
Nawal Al Saadawi, surnommée « La fille du Nil » est, elle, médecin psychiatre et auteure de renommée internationale. Emprisonnée pour ses écrits en 1981, elle crée néanmoins en 1982 l’Association de solidarité des femmes arabes (AWSA). « Des États-Unis à l’Arabie saoudite, partout dans le monde, le fondamentalisme et son argent sont là pour que les pauvres restent pauvres et les femmes à leur place. » Presque tout est dit dans cette phrase … 
Quant à Lea Tsemel, elle est l’Avocate contre la torture. Avocate infatigable, elle milite pour la défense des Palestiniens-es dans le labyrinthe judiciaire érigé par les occupants. Elle vit à Jérusalem et court de tribunal militaire en tribunal militaire, tant et si bien que Christiane Passevant n’a pu l’interviewer que par téléphone ou dans sa voiture. Elle dit : « Quand vous défendez les Palestiniens-nes, c’est dur, où que vous alliez. Émotionnellement, c’est très dur, horrible. Si on n’est pas une femme forte, c’est impossible. ».
C’est une évidence de dire que ces quatre femmes sont féministes.
Ce livre, militant, féministe, qui donne la parole à ces quatre femmes d’une énergie mentale et physique à toute épreuve, encouragera celles et ceux qui le liront à continuer la lutte, encore et toujours.

Laurence Warot