Le Crade à Concarneau : égalité, écologie, vélo

mis en ligne le 3 février 2011
Le Centre de recherche sur l’avenir des déplacements écologiques (Crade) est une association créée en septembre 2010 à Concarneau, pour remettre en usage des vélos et pour entamer une réflexion autour des déplacements motorisés et les modes de vie qui y sont associés : gaspillage, perte de temps, isolement, violence routière, pollution.
Initialement intitulée Pignon sur rue, cette association intervenait depuis juillet 2010 sur les marchés locaux de Concarneau pour réparer et apprendre à entretenir les vélos, à prix libre.
Cet été, l’association a préparé le parcours et l’accueil à Concarneau de l’Alter Tour (Tour de France alternatif à vélo, tout en lenteur, pour dénoncer le dopage dans le sport tout comme dans l’agriculture, par apport d’engrais chimique).
Les initiateurs du Crade se sont renommés ainsi d’une part comme un pied de nez aux industries chimiques ou nucléaires qui, dans leur publicité, se présentent comme propres alors que leurs activités sont destructrices de l’environnement, c’est-à-dire à l’exact inverse du Crade ! D’autre part, l’objet du Crade dépasse le cadre (sic) strict du vélo pour s’interroger globalement sur les déplacements écologiques et l’aménagement urbain.
Depuis septembre, convaincu que la voiture c’est no future, le Crade organise chaque mois une « vélorution » (terme mixte entre vélo et révolution pour désigner une manif cycliste) pour faire la promotion des déplacements doux dans cette ville portuaire de 20 000 habitants.
Le Crade a sollicité en vain la mairie pour obtenir un local permettant l’échange autour du vélo, pour réparer, récupérer, stocker, s’informer, débattre, apprendre. Ne voyant rien venir, les deux initiateurs de l’association ont ouvert la recyclerie du Crade, dans un lieu abandonné depuis de nombreuses années qu’il a fallu retaper, du côté du port de pêche industrielle, appartenant à la chambre de commerce et d’industrie (CCI). Siège social de l’association, atelier commun de réparation où chacun apprend à être autonome, de recyclage (récupération et stockage de vélos et pièces détachées destinés à tort à la déchetterie) et lieu d’information sur les déplacements (transports en commun, cartographie, guide), de lien social, de débats, et source de documentation (on y croise Le Monde libertaire !), celui-ci attire chaque jour des personnes d’horizons différents, de toutes générations, de tous métiers et de toutes conditions, intéressées à la fois par l’atelier vélo et tout autant par le plaisir de discuter dans un cadre convivial. C’est que la recherche d’égalité sociale est fondamentale pour le Crade. Même quelques marins-pêcheurs fréquentent le lieu et semblent satisfaits par le retour de cette vie dans un port de pêche qui se désertifie.
Évidemment, la CCI a moins goûté le squat et a dépêché un huissier courant novembre pour que cesse l’occupation. Négocier un bail précaire pourrait être une porte de sortie. L’un des membres du Crade habite en effet sur le lieu et y paie ses factures d’électricité. L’eau courante en revanche n’a pas encore été accordée, bien que Concarneau soit en régie municipale. C’est que, jusqu’à présent, la municipalité ne sait pas quelle attitude exacte adopter face à cette initiative. Elle qui a un adjoint « développement durable et économie » (façade écologique ?) se fait largement dépasser sur ce terrain. On notera au passage que la régie municipale n’est pas la panacée, car elle confère à l’élu local un pouvoir à l’encontre des usagers. L’autogestion semblerait plus indiquée et c’est un euphémisme !
Le 5 janvier 2011, assignés en référé par la CCI pour cause d’occupation illégale, les membres du Crade ont dû se présenter au tribunal de grande instance de Quimper. La partie adverse ne se faisant pas représenter, le président du tribunal a à nouveau convoqué les protagonistes pour le mercredi 26 janvier, 9 heures.
Les enjeux sociaux de la recyclerie ne sont pas anodins. « Car la route a confisqué la rue, car les déplacements humains et écologiques doivent trouver leur place, car Concarneau s’est vidé au profit de grandes zones commerciales extérieures, car les parkings sont de plus en plus grands et les trottoirs de plus en plus petits, car vivre simplement sans voiture est un droit fondamental, car les impôts payés par les sans-voitures servent aussi à construire des routes », il s’agit de faire vivre ce lieu.
La recyclerie qui se trouve au 8, rue des Thoniers appartient à tous, elle est ouverte tous les jours de 13 heures à 19 heures, les prix y sont libres, l’adhésion au Crade est bienvenue. L’ironie de l’histoire veut que ce local servait autrefois à un revendeur de la multinationale du pétrole BP !
Pour soutenir le Crade, ou être tenu informé des suites du procès, vous pouvez appeler Rémi au 02 98 97 47 57.

Stef@, groupe Vannes-Lorient de la Fédération anarchiste