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Chroniques du temps réel

par Hélène Hernandez • le 28 octobre 2025
GPA : Elles brisent le silence !
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Quatre femmes, qui ont donné un enfant pour autrui, ont pris la parole devant une assemblée nombreuse et attentive au Sénat, le samedi 4 octobre 2025. Trois organisations proposaient ainsi une conférence sur l’envers du décor de la location de ventres : Coalition internationale pour l’abolition de la maternité de substitution (CIAMS), le Conseil national des femmes françaises (CNFF) et Stop Surrogacy Now UK. Elles ont témoigné des souffrances subies et qu’elles subissent encore. A leurs côtés, deux avocates et un avocat ont expliqué l’injustice faite à ces femmes.

Elles étaient quatre, mais combien de femmes se retrouvent dans un parcours dit de « générosité » pour donner un enfant à des couples homo ou hétérosexuels ou à des personnes seules. La propagande médiatique cache la réalité sordide de ce système d’exploitation des femmes et de marchandisation des enfants au profit d’un marché en pleine expansion. En 2025, la gestation pour autrui (GPA) – ou maternité de substitution – connaît un essor sans précédent à l’échelle mondiale : près de 770 000 naissances sont directement issues de techniques associées à la GPA ou au don d’ovocytes.
« De l’exploitation et de la violence »
Reem Alsalem, rapporteuse spéciale de l’ONU sur les violences contre les femmes et les filles dans le contexte de la gestation pour autrui, conclut son rapport de juillet 2025 en page 24 par : « La pratique de la gestation pour autrui se caractérise par de l’exploitation et de la violence à l’égard des femmes et des enfants, y compris les filles. Elle renforce les normes patriarcales en traitant le corps des femmes comme une marchandise et un objet, et en exposant les mères porteuses et les enfants à de graves violations des droits humains ».
Pour une fois, ce n’était pas les clients commanditaires qui étaient sur le devant de la scène mais des femmes habituellement invisibilisées, reléguées au silence et à la chosification, réduites à leur ventre, qui ont partagé leurs souffrances et leur maternité confisquée.
Ainsi, Alejandra (1), argentine, mère deux filles, accepte de devenir la mère du fils d’un ami, heureuse d’aider au projet parental. Finalement, elle ne reçoit que des mensonges, elle se retrouve exclue du projet à la naissance du bébé, son passeport confisqué, forcée à se rendre en Espagne : la rencontre avec des avocats l’aide au rapatriement en France, à obtenir papiers, logement, travail et l’accompagne à l’action en justice pour récupérer la garde de son fils.
Pour Christian aux USA, « j’étais motivée par le désir d’aider les autres, et j’ai découvert plus tard que je souffrais d’une empathie toxique. J’espérais également gagner de l’argent pour payer les frais juridiques, car mon mari était en conflit pour la garde de ses enfants, et la compensation issue de la maternité de substitution devait aider à financer ces frais ». Grugée par un contrat signé avec une agence réputée de Californie, elle se rend compte que les clients futurs parents avaient été engagés pour servir d’intermédiaire. C’est un homme au Royaume-Uni, père biologique, qui s’occupe actuellement du bébé. Pendant la grossesse, Christian ressentait un lien très fort et un sentiment de protection vis-à-vis de l’enfant à naître. Le procès a duré quatre ans pour organiser la garde du bébé au Royaume-Uni. Le seul droit obtenu : le Tribunal a décidé la réception de photos et de brèves nouvelles de l’enfant deux fois par an. Sa famille a été très affectée tant durant la grossesse que pendant le procès. Elle regrette : l’enfant ne porte pas son ADN, le secret de sa naissance mourra avec elle, son enfant saura-t-il qu’elle le voulait vraiment ?
Mère porteuse pour sa cousine
Quant à Marie Anne, femme britannique, elle a accepté d’être mère porteuse pour sa cousine, qui était comme une sœur pour elle. Elles s’engagent toutes les deux avec pour Marie Anne la certitude de rester en contact avec l’enfant. Il s’est avéré que cette solution gratuite était bien sûr moins onéreuse que de faire appel à une mère porteuse à l’étranger. Du fait d’un recours à une FIV, la surmédicalisation imposait une procédure difficile pour la façon d’accoucher et pour ce qu’elle devait manger, et ce sans aucun soutien. Lors de l’accouchement, l’hôpital la considéra comme la mère : malgré l’insistance de sa cousine, elle refusa la césarienne, la sage-femme approuva sur un plan médical ce choix. L’hôpital interdit à la cousine de sortir avec le bébé et c’est Marie Anne qui sortit avec. Puis l’étrange échange se fit sur le parking en dehors de toute responsabilité de l’hôpital. Et ensuite, on fit pression sur elle pour qu’elle signe des documents déclarant qu’elle est la mère : « Imaginez devoir entraîner votre corps et votre esprit pendant neuf mois à croire que vous n’êtes pas la mère de l’enfant que vous mettez au monde ». Marie Anne n’a reçu aucun paiement. Les parents commanditaires ont intenté un procès pour obtenir une ordonnance parentale, c’est-à-dire pour transférer légalement la responsabilité parentale de la mère porteuse aux parents commanditaires et mettre fin à ses droits. Elle a refusé mais la cousine a fait pression durant les deux années de procès et finalement Marie Anne a signé l’ordonnance parentale. Sa fille a onze ans, elle ne l’a jamais revue depuis la naissance. « En essayant d’aider une autre famille, ils ont détruit la mienne. » Marie Anne a développé un syndrome de stress post-traumatique, elle a une peur profonde des hôpitaux, des enfants et des bébés, ce qui est incompatible avec sa carrière dans l’enseignement.

Pour Julie, française, c’est en Espagne qu’elle accoucha pour donner son enfant à un couple d’homosexuels. En Espagne, car en France, la GPA n’est pas autorisée. Elle aussi est privée de voir l’enfant comme annoncé. Elle est même suspectée d’être une mauvaise personne, sans capacité parentale, puisqu’elle a accepté d’être mère porteuse. L’enfant a été confié in fine à l’homme qui n’a aucun lien avec l’enfant, son conjoint étant décédé. Pour cet homme, il n’est pas envisagé de le suspecter d’avoir eu recours à une mère porteuse. La seule personne qui reste avec un lien de filiation c’est Julie mais les services sociaux ne l’entendent pas ainsi.
Eprouvant pour chacune des femmes
Lors des témoignages, ce fut éprouvant pour chacune des femmes. « On pouvait lire la souffrance sur le visage des quatre femmes lorsqu’elles ont livré leur témoignage. Elles avaient peine à retenir leurs larmes, tant l’émotion demeurait vive. Comme participantes, nous pouvions ressentir la profondeur de ce qu’elles avaient vécu, tant leurs témoignages étaient authentiques » (2).
Au cours de cette rencontre, des questions essentielles ont été abordées telles que les motivations et contextes qui ont conduit ces femmes à la GPA, les impacts sur leur santé physique et mentale, et sur leur vie personnelle, leur analyse du système d’exploitation qu’implique la maternité de substitution, les dysfonctionnements de la justice et la lutte pour garder un lien avec leurs enfants. Il en ressort que toute femme ayant été mère porteuse est disqualifiée vis-à-vis de sa revendication de garder un lien avec l’enfant qu’elle a mis au monde : soit parce qu’elle a touché de l’argent, elle est vénale, soit si elle n’a reçu aucun paiement, c’est qu’elle n’a aucune compétence parentale. Ceux qui ont la compétence parentale, c’est ceux qui ont de l’argent, les riches qui choisissent sur catalogue la couleur des yeux, des cheveux, de la peau, ceux qui jettent comme un kleenex celle qui les a aidés à acheter un enfant par la location d’un ventre pendant neuf mois. Les avocats présents, Constance Ambroselli, Hector Castro Montesinos et Adeline Le Gouvello ont témoigné comment il et elles accompagnent des mères porteuses pour qu’elles soient reconnues dans leurs souffrances et dans leur maternité. La juridiction privilégie les capacités financières des parents « d’intention » et non l’intérêt de l’enfant et le droit de la mère.
La gestation pour autrui, au-delà de la tromperie sémantique qui la qualifie « d’altruiste » ou d’une rhétorique qui la déguise en « liberté reproductive », est le nouveau visage de la traite de personnes.
Hélène Hernandez
Groupe Pierre Besnard
1. Selon le dossier de presse distribué à la conférence, pour les trois premières femmes.
2. Selon Infolettre PDF en bref, Vol. 2025-2026, n° 2, Octobre 2025.
Ouvrage collectif de la CIAMS, Ventres à louer, une critique féministe de la GPA, éditions L’Échappée, 2022
PAR : Hélène Hernandez
Groupe Pierre Besnard
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