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Nouvelles internationales
par Philippe Diaz le 20 septembre 2025

LA DICTATURE DU DOLLAR – 5ème partie : La fin de l’Etat de droit

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Nous avons vu dans la première partie, https://monde-libertaire.net/index.php?articlen=8360
comment la nouvelle autocratie présidentielle américaine, utilisait la dictature du dollar pour limiter la liberté d’expression de la presse ; dans la deuxième partie, comment cette même dictature du billet vert était utilisée pour supprimer la liberté d’expression des étudiants : https://monde-libertaire.net/index.php?articlen=8383 ; dans la troisième partie, la liberté d’expression artistique : https://monde-libertaire.net/index.php?articlen=8423 et dans la quatrième la recherche scientifique : https://monde-libertaire.net/index.php?articlen=8491.

Maintenant la seule pression financière ne suffirait pas à imposer le programme xénophobe, protectionniste, ultraconservateur, liberticide, autoritaire, climatodénialiste, et fortement nationaliste chrétien de Trump. Un autre outil est utilisé ici et c’est celui du pouvoir judiciaire.

Inutile de rappeler que Trump est un businessman qui a bâti sa fortune, héritant de son père et devenant à son tour ce que l’on appelle ici un « slum lord », c’est-à-dire quelqu’un qui loue des appartements invivables, et très souvent insalubres, aux minorités qui ne peuvent s’offrir autre chose, et qui sont jetées dans la rue violemment dès qu’ils sont en retard sur leur loyer. Il a ensuite développé de nombreuses sociétés pour lesquelles il a déposé le bilan dès qu’il ne pouvait plus en bénéficier personnellement au niveau qu’il avait fixé. Ceci lui a permis de devenir expert en une chose qui est l’utilisation des failles de la législation américaine, l’une de ces failles étant l’utilisation totalement pervertie du système judiciaire. Aux États-Unis, tout le monde peut te faire un procès, quelle que soit la raison. Je n’aime pas la couleur de ta chemise, je vais t’assigner au tribunal. Bien sûr qu’au terme du procès qui va prendre des années, je vais le perdre, mais ces années vont te coûter une fortune pour te défendre, vu qu’il est très difficile de trouver un avocat qui va te demander moins de $350 de l’heure et qu’il va lui falloir un nombre considérable d’heures pour te défendre. Pour les procès plus complexes ou impliquant de grandes entreprises, des sociétés qui emploient des centaines d’avocats vont intervenir avec des tarifs de milliers de dollars par heure pour chacun de ceux employés sur le procès, arrivant ainsi à la fin du procès à des notes atteignant des millions voir des dizaines de millions de dollars. Donc, pour celui qui se fait attaquer pour la couleur de sa chemise, ou pour la grande entreprise, le calcul est vite fait : autant négocier avec celui qui attaque, et faire un compromis en lui versant une portion de ce que le procès coûterait. Trump a utilisé cette technique pour devenir le riche businessman qu’il est, et a compris très vite que tout ce qui résistait à son pouvoir de président, qu’il considère sans limite, ou tout ce qui exprimait un point de vue contraire au sien pouvait être traité de la même manière. Cette technique fait partie intégrante de la dictature du dollar.

Nous avons déjà discuté des procès faits aux médias, entre autres à CBS possédée par Paramount Global dont la principale actionnaire est Shari Redstone, grande capitaliste américaine, elle aussi héritière de son père Summer Redstone, qui bâtit cet empire des médias. Étant âgée, elle décide de vendre à Skydance Media, une des sociétés de la famille Ellison. Rappelons que Larry Ellison est le créateur d’Oracle, leader des systèmes de gestion de bases de données dont le plus gros client est la CIA, et, bien entendu, supporter de Trump. Il est devenu la semaine dernière et pour quelques heures l’homme le plus riche du monde, lorsque sa fortune s’est accrue de 100 milliards de dollars en une journée, grâce à ses investissements dans l’intelligence artificielle, surpassant ainsi Elon Musk ! Maintenant, Shari Redstone a besoin de l’approbation de la Commission Fédérale des Communications pour sa « fusion » avec Skydance. Après qu’elle eut accepté de payer 16 millions de dollars à la fondation présidentielle de Trump, pour en finir avec son procès, elle reçut cet accord sans aucun délai. Cela s’appelle de l’extorsion, ce qui est un acte criminel, même aux États-Unis ! Il est intéressant de noter que, juste après avoir vendu Paramount, et alors que les principales stars des médias américains ont lancé une campagne de boycott d’Israël, Shari Redstone décida d’investir dans la société de production de films et de séries télé Sipur… société israélienne ! Elle déclara que c’était une « opportunité de présenter un Israël différent » !

Fort de ce nouveau succès, Trump vient d’intenter un procès en diffamation au New York Times leur réclamant 15 milliards de dollars à cause de la soi-disant lettre qu’il aurait envoyée au prédateur sexuel Jeffrey Epstein pour son anniversaire représentant les traits d’une femme nue… et ceci, alors même que cette lettre vient d’être rendue publique. On n’est pas très loin du procès pour la couleur de la chemise !




En ce qui concerne les procès intentés aux universités, la majorité d’entre elles a donc payé des sommes très importantes pour voir leurs fonds fédéraux débloqués. Les faux procès intentés aux universités étaient liés au soi-disant antisémitisme toléré sur les campus, voulant dire, bien entendu, le soutien des étudiants au peuple palestinien. En plus des indemnités financières, les universités ont dû abroger, ou en tout cas fortement limiter le droit des étudiants à manifester. De plus la délation fonctionne maintenant parfaitement bien. L’université de Berkeley en Californie a transmis ces derniers jours les noms de 160 enseignants et étudiants à l’administration Trump dans le cadre de son enquête sur des « actes présumés d’antisémitisme ». Ceci répond au fait que Trump s’attaque maintenant aux universités californiennes et particulièrement à UCLA, basée à Los Angeles — et « bastion de l’extrême gauche terroriste » selon Trump, ha, ha, ha ! — exigeant de l’université un versement d’un milliard de dollars ! Il vient de bloquer plus de 300 millions de dollars de subventions de recherche, sous prétexte que l’université n’a pas réussi à « promouvoir un environnement de recherche exempt d’antisémitisme ». Le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, a qualifié cette demande d’« extorsion » et a déclaré que l’État intenterait une action en justice pour la bloquer. L’attaque d’un milliard de dollars vise en fait l’argent des contribuables. Contrairement aux universités Columbia et Brown, qui ont payé, l’Université de Californie est une institution publique.

Voyant le succès indéniable de ses procès, Trump a pensé s’attaquer à ses nouveaux ennemis, à savoir les grands cabinets d’avocats américains et les juges. Oui, vous avez bien lu, les juges !
Au moins neuf grands cabinets d’avocats nationaux ont capitulé face aux attaques de Trump en acceptant des paiements totalisant plus de 900 millions de dollars, y compris une représentation juridique pro bono pour des entités conservatrices et autres engagements. Trump avait signé un décret interdisant à leurs avocats l’accès aux contrats gouvernementaux, révoquant leurs habilitations de sécurité et leur interdisant l’accès aux bâtiments ou aux fonctionnaires fédéraux. Les cabinets sous le feu de l’administration sont ceux qui ont réussi à bloquer les décisions de Trump devant les tribunaux fédéraux de première instance et d’appel. Et maintenant, c’est au tour des juges. Trump vient d’intenter un procès à l’ensemble des juges fédéraux de l’État du Maryland au sujet d’une ordonnance suspendant l’expulsion immédiate des migrants contestant leur expulsion. Ceci semblerait raisonnable à n’importe quelle juriste, mais pas à Trump. Heureusement, pas plus tard qu’il y a quelques jours, un juge fédéral a annulé ce procès, ce qui va bien sûr générer un appel de l’administration qui se finira probablement devant la Cour Suprême favorable à Trump.

Il n’est pas étonnant, dans ce contexte, de voir que la pénalité de 550 millions de dollars imposée à Trump pour avoir falsifié des documents comptables et s’être illégalement enrichi à New York vient d’être annulée par la Cour d’appel de ce même État !

Il est évident que la pratique de faire un procès, ou de soumettre les administrateurs de justice a toute sorte de pressions, va rapidement s’étendre aux États-Unis et dans le reste du monde. Rappelons-nous que Trump imposa aux juges et procureurs de la Cour Pénale Internationale de lourdes sanctions pour avoir osé aller contre le gouvernement de Netanyahou. C’est, bien sûr, la fin de l’indépendance de la justice aux États-Unis et de manière plus générale, purement et simplement, la fin de l’État de droit.

Par Philippe Diaz / « L’autre Voix de l’Amérique » pour Le Monde Libertaire
www.philippe-diaz.com
PAR : Philippe Diaz
« L’autre Voix de l’Amérique » pour Le Monde Libertaire
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