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par Assembly.org.ua le 6 septembre 2023

REFUS DE COMBATTRE DES DEUX COTES DU FRONT : LE DEUXIEME AUTOMNE DE LA GUERRE S’AMORCE

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Juste un aperçu local de la région de Kharkiv sur la fatigue croissante au sein des troupes de première ligne russes et ukrainiennes au cours de l’été 2023

Bienvenue dans l’équipe de collecte de fonds pour travailler sur cette rubrique internationale et sur des activités de volontariat hors ligne. Deux tasses de café dans votre pays, même avant la guerre, pourraient équivaloir à une journée de salaire d’un travailleur en Ukraine. Merci d’avance à tous !https://www.globalgiving.org/projects/mutual-aid-alert-for-east-ukraine/

par Assembly.org.ua, publié par Libcom.org le 3 septembre 2023

Les illustrations sont celles du texte original. Texte traduit par les Relations internationales de la Fédération anarchiste

La contre-offensive ukrainienne : "envoyés au massacre", "menacés d’emprisonnement"

La contre-offensive sanglante en cours depuis des mois, qui est devenue une boucherie dans la Somme après la nouvelle bataille de Verdun près de Bakhmut, se reflète de façon notable dans le climat social. L’interlocuteur d’Assembly, conducteur dans le métro de Kharkiv, a répondu sous couvert d’anonymat le 25 juin :

"Mon frère combat près de Bakhmut, dans la 31e brigade d’assaut. La semaine dernière, ils sont passés à l’offensive - ils ont été refoulés au point qu’ils ont reculé plus loin qu’avant l’offensive. Le lendemain, les colonels sont arrivés avec des menaces. Et là où se déroule attaque, il y a des canons, des mortiers, des avions. Avant-hier, deux bataillons ont refusé totalement de se battre. Ils n’ont pas nourri ces gars et les ont menacé de prison. Trois bataillons ont déposé les armes car ils ont été envoyés au massacre sans soutien. 30 personnes ont été immédiatement déposées sur le terrain. Ils ont mis un nouveau commandant, mais c’est tout pareil. Ils ont à peine pris un village. Il n’y a pas de chars, il n’y a pas de Bradley, ils en prennent soin pour ne pas contrarier l’Occident. Mais ils ne prennent pas soin de l’infanterie - ils leur ont donné deux fusils de précision polonais et les ont renvoyés. Il n’y a pas de nourriture, seulement une ration sèche. Quand ils sont menacés d’emprisonnement, ils répondent : allez-y, et qui viendra sur nos positions ? Là, ils continuent à se battre on ne sait comment, mais au coup par coup, ça ne leur dit rien. C’est ça."

Le refus dans les troupes ukrainiennes de participer aux hostilités

Le même informateur confirme l’article de juin dans Der Spiegel sur les conducteurs de chars des forces armées ukrainiennes qui simulent des dégâts sur les chars pour éviter de se lancer dans la contre-offensive du sud. "Ils n’ont pas bougé. On leur a donné un véhicule de combat avec un capot en plastique. Une fois ils sont allés quelque part et le char a calé, ils l’ont sorti de là à grand peine. Ces véhicules sont là mais personne ne veut les conduire, une capsule mortelle", a déclaré le conducteur le 5 août.

Toujours dans la première quinzaine d’août, une interview vidéo du blogueur politique Iouri Romanenko, proche du bureau de Zelensky, au tireur d’élite Konstantin Proshinsky, qui combat près de Bakhmut, a été diffusée, y compris dans les médias occidentaux, il y est dit que l’armée ne serait pas contre le « scénario coréen », et il y a aussi des critiques à la « mobilisation dure » et à l’interdiction de quitter l’Ukraine pour les hommes, car « nous ne pourrons jamais gagner une guerre contre la Russie par le nombre. » Mais à côté de cela, Proshinsky confirme les informations d’Assembly sur l’équipement lourd occidental qui aurait été économisé aux dépens d’attaques d’infanterie dans le style "chair à canon" russe et sur les refus de se battre dans l’armée ukrainienne. Selon l’armée, parmi les recrues récemment envoyées à Bakhmut, la plus jeune avait 52 ans. Parmi les autres se trouvaient des hommes atteints de tuberculose, d’hépatite et de diabète. Ils ont été mobilisés, autorisés à passer la nuit au bureau d’enrôlement et le lendemain matin envoyés au front. Beaucoup de ces combattants, après la première bataille, écrivent leur refus de participer aux hostilités. Il ne s’agit pas d’une désertion et n’entraîne donc pas de responsabilité pénale : le postulant doit être transféré vers une entreprise de fournitures, et bientôt ces entreprises " compteront des milliers de personnes ", a déclaré l’invité de l’émission.





Le refus dans les troupes russes de participer aux hostilités

Pendant ce temps, l’avancée des forces armées russes sur le territoire allant de Koupiansk à Kremenna rencontre apparemment encore moins de succès que les tentatives ukrainiennes de percée vers la côte d’Azov et Bakhmut. L’esprit combatif des occupants est également très moyen. Nos confrères d’ASTRA ont publié les 9 et 11 août de nouvelles preuves d’un abri souterrain clandestin pour les russes refusant de combattre à Zaytsevo, au nord-est de la région de Lougansk. Les mobilisés du détachement "Storm" (unité militaire 31134) se sont plaints à leurs familles de la façon dont ils étaient contraints d’aller vers une mort certaine. Des proches de plusieurs militaires en ont fait part à ASTRA, déposant leurs plaintes auprès de la Commission d’enquête, et il y a également un enregistrement audio d’une conversation avec l’un des mobilisés. Sur l’enregistrement, le combattant dit qu’ils vont partir pour un quatrième assaut consécutif, ils sont jetés dans des attaques sans armes et sans repos : "On n’est plus que 20 sur 100 de "Storm". Au bout quasiment de 20 minutes de combat. < ...> Nous sommes obligés d’aller dans les champs de mines. Pourquoi y sommes-nous si conduits ? Alors que les autorités ont déjà signalé qu’elles avaient déjà pris ces positions. <...> Le commandant a personnellement tiré dans les jambes de ceux qui ont dit Non." Les 24 survivants ont été envoyés au sous-sol de Zaytsevo, tout contact avec eux a disparu. Comme l’a ajouté la rédactrice en chef de la chaîne, Anastasia Chumakova qui nous a parlé, les détenus changent tout le temps.

L’offensive russe : "C’est de l’extermination"

Le média d’opposition sibérien Peuple du Baïkal a publié le 25 juillet un article sur un habitant mobilisé d’Irkoutsk nommé Alexandre, qui a servi dans l’unité « Storm » de la 90e division blindée. Début mars 2023, il a abandonné son poste avec trois de ses amis et s’est rendu à Alexandrovsk, où ils ont loué un appartement et bu de l’alcool. Là, ils ont été arrêtés et envoyés au bureau du commandant. Après cela, Alexandre a été retrouvé mort près de Chervonopopovka (également à la frontière Lougansk-Kharkiv) avec des marques de nœud coulant autour du cou. "J’ai compris que ce n’était pas la guerre que j’imaginais. C’est de l’extermination, nous servons d’appât. Qu’ils m’envoient en prison, je ne mourrai pas pour ça", raconte son frère Sergey en parlant du défunt. Il tente d’élucider les circonstances du décès par l’intermédiaire du parquet militaire et de la commission d’enquête.

Combien d’entre eux prendront des positions anti-guerre ?

Et le temps presse pour les deux États. Septembre sera plus ou moins clément, et après ce sera à nouveau le froid, la boue et les affrontements de position. À en juger par le durcissement de la législation russe sur la conscription, une nouvelle vague de mobilisation ouverte est en train d’arriver. Cependant, jusqu’aux élections présidentielles de 2024, leurs autorités tentent de se limiter en obligeant à la signature de contrats dans les couches sociales les plus marginales – condamnés, conscrits et migrants d’Asie centrale. A côté de ceux qui refusent de se battre, tant du côté ukrainien que russe, il est déjà facile de rencontrer un soldat de première ligne qui soupçonne vaguement qu’il est utilisé comme matériel consommable mais a peur de l’admettre. Ils demandent volontiers à des civils au hasard pourquoi ils ne sont pas dans les tranchées et ne vont pas y aller mais, allez savoir pourquoi, ils ne posent pas de questions à ceux qui disposent de leurs vies au sujet des relations commerciales qu’ils entretiennent avec les représentants de l’ennemi et sur la corruption dans les achats de l’armée. La question reste de savoir combien d’entre eux prendront des positions anti-guerre. Il est seulement certain que si tout continue comme c’est le cas actuellement, un jour, les deux États n’auront tout simplement plus la force de lancer de nouvelles offensives.

Un bucher funéraire sans autres perspectives que la pauvreté et la corruption en Ukraine

La ligne de front pourrait ne pas beaucoup bouger par rapport à l’actuelle, mais aussi bien se déplacer jusqu’aux frontières ukrainiennes de 1991. Les défaites d’une armée face à une autre ne sont pas en mesure de mettre fin à la guerre à elles seules - elles ne font que forcer le régime perdant à verser plus activement de nouvelles tonnes de copeaux humains dans le bûcher funéraire…

Récemment, nous avons déjà parlé de la déception croissante des Ukrainien.ne.s quant aux perspectives de vaincre la pauvreté et la corruption, ce qui alimente le désir de quitter l’Ukraine immédiatement après la guerre ou même avant.

En plus de cela, vous êtes invités à découvrir comment, dans les entreprises de Kharkiv, les travailleurs masculins sont remplacés par des femmes et des retraités, comme dans l’Europe de 1916, en raison de la mobilisation.


[Les intertitres sont ceux du secrétariat aux Relations internationales de la FA et de la rédaction du Monde libertaire en ligne]

PAR : Assembly.org.ua
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