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par Anarchist Federation Bristol le 29 mars 2021

Bristol en première ligne de la répression et dans les médias. Compte-rendus de nos camarades grands bretons

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Traduction Monica Jornet Groupe Gaston Couté FA

Ne lisez pas Le Monde qui relaie la version gouvernementale et de la police, lisez plutôt nos camarades grands bretons dans le Monde Libertaire. Monica Jornet



Premier compte-rendu. 22.0.2021 :
QUE S’EST-IL REELLEMENT PASSE A BRISTOL LE DIMANCHE 21 MARS. DÉMONTONS UNE VERSION DES FAITS MONTÉE DE TOUTES PIÈCES


On a vraiment comme une impression de déjà-vu quand on rentre de manif et qu’on commence à lire les compte-rendus de la presse et sur Twitter. C’est pourquoi, je fais ce compte-rendu des événements de Bristol, comme je l’ai fait pour des dizaines d’autres manifestations au fil des ans. Je vous emmène, si vous voulez bien, faire un tour dans cette manif pour vous montrer comment la presse, la police, les politiciens et leurs bouffons ont échafaudé leur récit.

Samedi 13 mars. Un récit monté de toutes pièces
La colère contre les exactions de la police et du gouvernement couve lentement depuis les manifestations du BLM [note] au Royaume-Uni, à l’été 2020. Alors que les rues étaient tout à fait calmes, le maintien de l’ordre raciste et sexiste s’est poursuivi. Le meurtre de Sarah Everard, pour lequel un policier est inculpé, a provoqué une vague de douleur et de colère plus forte (mais toujours contenue). Une colère face aux violences sexistes auxquelles les femmes sont confrontées quotidiennement, et face à une prétendue justice qui, au mieux, ignore cette souffrance, et souvent y contribue. La plus grande des manifestations de deuil, suite au meurtre, s’est déroulée samedi 13 mars à Clapham Common [sud de Londres].

Comme s’il fallait une dernière preuve, la police a attaqué la veillée. Elle a attendu que le nombre de participants se réduise, que la nuit tombe et rassemblé des forces suffisantes pour déborder la foule encore présente. Les compte-rendus et les photos de ces attaques ont été divulgués, ce qui causé des problèmes à la police. Mais aussi à leurs chefs au gouvernement, qui espéraient adopter tranquillement leur projet de loi visant à accroître les pouvoirs de la police et visant les manifestations, les gens du voyage et ceux qui dégradent des monuments.

Le récit se met en place le 13 mars
Au départ, la presse a rapporté l’attaque de la veillée de façon "neutre", parlant d’«affrontements s’étant produits lors d’une veillée» ou d’«affrontements entre les manifestants et la police». Des mots soigneusement choisis pour ne pas indiquer qui a provoqué les affrontements (la police) et qui a été la cible de la plupart des violences (les participants à la veillée funèbre). Bien qu’il ne s’agisse pas techniquement d’un mensonge, l’intention ici est d’éviter de blâmer la police ou de laisser entendre que les manifestants étaient en faute. Bien sûr si les manifestants avaient réellement incité à la violence, les tout premiers articles diraient très exactement «les foules attaquent la police». Attendez… Des manifestants ? On joue encore sur les mots. Des personnes assistant à une veillée funèbre n’ont pas l’air menaçants ou dans l’illégalité. Cela évoque des couronnes de fleurs, des discours pleins de chagrin, des cierges, de la tristesse. C’est la description fidèle de ce qui s’est déroulé à Clapham Common, mais pas la plus utile si vous voulez dresser un tableau favorable de la police. C’est pourquoi tant de voix ont choisi de qualifier les personnes présentes de «manifestants». Les politiques, comme le ministre de l’Intérieur Priti Patel, n’ont pas tardé à condamner la «violence» causée par les «manifestants» lors d’un «rassemblement illégal», ce que la presse a consciencieusement relayé, le plus souvent sans le moindre esprit critique.

Cependant, cela ne suffisait d’en parler comme d’une manifestation, les gens avaient vu les photos et pour la plupart seraient d’accord pour considérer qu’un meurtre est une raison valable de manifester. Il faut donc ensuite des déclarations de la police. Elles sont parfois mensongères, mais ce sont souvent des vérités partielles qui permettent d’échafauder un faux récit, qui abonde en détails techniques. Le but est de présenter la veillée funèbre comme dangereuse, et aussi de diviser les personnes présentes en «gentils» et un «méchants».

Les médias font en premier lieu le bilan dans le camp de la police. Ils pourraient dire «six policiers ont reçu des soins médicaux en raison de la manifestation». Mais voyez plutôt ce qu’ils ne disent pas. Blessé comment ? Ont-ils été assommés par un manifestant enragé avec une batte de base-ball… ou se sont-ils sentis faibles à cause de la déshydratation, se sont-ils cassés une côte en trébuchant sur un bouclier, se sont-ils coincé un doigt dans une portière de voiture ou en frappant quelqu’un sur la tête ? Si vous pensez que j’exagère la façon dont la police peut signaler les blessures, je vous exhorte à lire mon rapport sur une manif sur le climat en 2008. C’est une tactique qui leur est utile car il est très rare que l’on publie des chiffres sur le nombre de manifestants blessés, cela qui laisse entendre qu’il n’y en a pas et que la police a donc été la cible de plus de violence qu’elle n’en a infligé.

Deuxièmement, les médias chercheront à répandre des rumeurs. Ils reconnaîtront que la plupart des milliers de personnes présentes étaient pacifiques, étaient venues pour l’événement et n’auraient pas dû être attaquées par la police. Ensuite, ils pointeront du doigt, à mots couverts. Qui ? Ce n’est guère important. Le bouc émissaire du jour sera les Black Lives Matter, les Antifa, Extinction Rebellion, les anarchistes, des féministes violentes. Bien sûr, on assiste couramment à des événements sans plan secret pour les «détourner». Ce qui compte, c’est la diabolisation et le rejet de ceux qui ont été matraqués et arrêtés. Ce n’était pas des gens comme vous et moi, des gens préoccupés à juste titre par la violence à l’égard des femmes et par la police. C’étaient des rebelles Black Live Matters, des agitateurs violents, des anarcha-féministes dures.

Troisièmement, les médias essaieront désespérément de renverser les rôles et jeter le discrédit sur les victimes de la violence policière. Ils parleront de la façon dont les manifestant.e.s étaient là à crier à l’arrivée de la police (c’est terrible). Et tous ces jurons sur les pancartes (oh mon Dieu!), ils parleront de «rassemblement illégal». Ils diront que ces horribles participants à la veillée devraient avoir honte. Ils n’admettront en aucun cas que la police a fait dégénérer une manifestation pacifique. Dans le passé, la police et la presse sont même allées jusqu’à suggérer que la police avait eu raison d’exercer des violences contre un homme en fauteuil roulant au motif qu’il se dirigeait vers eux de manière «agressive».

Et tant qu’à faire, vous aurez des «articles d’opinion» dans les journaux,des éditoriaux, des rapports interminables sur les réseaux sociaux sans vérification des faits, ce qui rend plus facile de mentir. Les premiers reportages peuvent facilement être flous et jouer avec la vérité, mais cela donnera les jours suivants des formulations telles que «des éléments armés antifa instrumentalisent la veillée funèbre et lancent une attaque contre des policiers» qu’on estimera normal de publier ou partager en ligne. Cela sera suivi du «tir amical» des critiques prétendûment fondées sur l’inquiétude et «servant la cause» de la part soit de qui a avalé le récit, soit veut simplement avoir l’air respectable (et marquer des points politiques). Revenons maintenant au sujet du jour…

Que s’est-il réellement passé à Bristol le 21 mars
Depuis plus d’une semaine, de grands rassemblements ont lieu tous les soirs à College Green (Bristol) en signe de deuil pour les femmes tuées par la violence sexiste et pour protester contre la complicité de la police dans les violences sexistes et autres. Parallèlement, beaucoup ont partagé un appel anonyme pour une manifestation contre le projet de loi sur la Police, la Criminalité, les Peines et les Tribunaux, sous le slogan #KillTheBill [Mort au projet de loi]. La manif a explicitement été déclarée comme non organisée, donc il n’y avait personne sur qui la police pouvait faire pression pour l’annuler, juste les appels de dizaines de groupes et de voix nouvelles.

Dimanche à 13h30, les gens ont commencé à confluer vers College Green. La police a commencé à approcher des individus et des petits groupes, en leur demandant de se disperser, les menaçant d’amendes ou d’arrestation, ou leur demandant de répondre à des questions. Cependant, ils ont rapidement reculé à mesure que la foule augmentait. Un peu après 14 heures, plus de 5000 personnes étaient présentes (la plus grande manif depuis celle des BLM qui avait réuni de plus de 15 000 personnes l’été dernier).

Au cours des heures, la foule a défilé dans le centre de Bristol dans une atmosphère festive ce qui est classique dans notre ville sur fond de chants, chansons, samba, sonos et, certainement, pas mal d’insultes, avec des pancartes de toutes sortes. En fin de manif, beaucoup ont fait une halte sur l’herbe dans le parc du château ou sont un peu restés discuter en haut de Union Street. C’est alors que la police a malmené et tenté d’éloigner un manifestant qui était assis. C’est après cette provocation, vers 18 heures, que ceux qui défilaient encore, ont descendu la colline du côté des Galeries vers le poste de police central de Bristol, Bridewell.

Pendant environ dix minutes après l’arrivée de la manifestation à Bridewell, il n’y avait qu’une douzaine de policiers sur place, ils n’étaient pas en tenue anti-émeute, et étaient éparpillés devant le poste de police. Il y avait deux fourgons garés dont l’un a bientôt été déplacé ailleurs et l’autre était inoccupé. Quelques cent ou deux cents personnes ont fait un sitting devant le poste de police en chantant et en scandant des slogans, surtout des jeunes et principalement des femmes. Le reste des manifestants est resté de l’autre côté de la rue, ou longeait le trottoir. La police était cernée et en infériorité numérique de l’ordre de 1 pour 90, et en dépit de ce fait, personne ne les a attaqués. Personne ne les a bousculés pour accéder à l’entrée non gardée, ni n’a jeté de pierres sur les baies vitrées du poste.

À ce moment, la première grande vague de renforts policiers est arrivée, des dizaines de policiers anti-émeute et une demi-douzaine d’unités montées. Ils ont commencé à repousser les gens, en nassant des secteurs de la manif. Les gens ont reculé et des policiers les ont agressés. Malgré cela, les manifestants, bien que tendus, sont restés calmes. Beaucoup de gens étaient encore assis par terre ou se baladaient près du poste. La plus forte riposte de la part de la foule au cours de cette confrontation de 20 minutes environ a consisté à chanter «Honte à vous» et à secouer le fourgon de police isolé.

Vers 18 h 40, la police avait le choix, s’aligner défensivement près du poste peut-être, voire reculer un peu, ou faire dégénérer la situation en la rendant dangereuse et de plus en plus violente. Ils ont fait ce dernier choix et envoyé les chiens, au sens propre pour les unités canines qui ont été déployées, et au sens figuré pour les officiers humains qui ont chargé la foule à la matraque, frappant à la tête ceux qui étaient debout, donnant des coups de pied aux gens au sol. Ils ont même frappé une jeune femme assise sur le sol les mains levées leur disant que c’était une manifestation pacifique.

Peut-on identifier une minorité violente
Il n’y en avait tout simplement pas ! Cela montre la police sous un si mauvais jour qu’un faux récit a commencé à prendre corps pour que la vérité reste dans l’ombre. Les rédacteurs en chef, les politiciens, les officiers de police, les médias, Twitter, se sont mis à vociférer : "Les manifestants se heurtent à la police" ou "Affrontements devant le commissariat de police de Bristol au cours de manifestations". Comme si les manifestations créaient des affrontements sans même de nécessité de se heurter à qui que ce soit ! Plus tard, ils feront un rapport sur ce pauvre fourgon qui "été secoué"! Qui pourrait blâmer la police, après ça, d’avoir matraqué un manifestant ? Même si ce manifestant était assis par terre sur la route, entièrement séparé de la camionnette par une rangée de CRS ?

Je pense que la puissance de la réponse des manifestants a carrément surpris la police. Au départ, c’était relativement passif - l’arrivée des chiens policiers a été accueillie par un couple dans la foule qui a essayé de leur donner un peu de pizza. Ensuite, lorsque la police n’a plus pris de gants pour frapper, les gens ont riposté. Les matraques, les gaz et les boucliers ont été accueillis avec des poings et des bâtons. Les fourgons de police qui ont pénétré dans la foule, ont été attaqués avec des bouteilles et de la peinture en aérosol. Un point majeur du faux récit monté par la presse est l’article de la BBC parlant des fourgons de police attaqués avec des bouteilles après avoir pénétré dans la foule. Sauf que la BBC a juste dit que les fourgons de police avaient été attaqués. Ce qui a des implications très différentes.

En plein chaos, quelqu’un a lancé des feux d’artifice dans la foule. C’est potentiellement dangereux, mais moins que les chiens policiers qui, à ce moment-là, ont été emmenés, effrayés par les bruits forts (on ne sait pas si c’était délibéré). Les chiens ont été redéployés à plusieurs reprises tout au long de la nuit. Malgré le danger que cela représente pour les manifestant.e.s, pour les chiens et même pour la police, dont au moins un agent a failli être castré par sa propre charge. L’un des premiers récits dominants des médias était celui des manifestants mettant en danger les animaux de la police ; eh bien, c’est la police qui les a amenés là-bas et les a utilisés comme armes. Et les unités de chevaux de la police étaient toujours dans les rues six heures après (chevaux indemnes), donc soit il n’y avait jamais eu aucun danger pour eux de la part de la foule, soit la police les a délibérément mis en danger toute la nuit et à plusieurs reprises.

Le fourgon isolé a fini par être peint à la bombe entre le deuxième et le troisième assaut de violence policière, puis incendié, étonnant à quel point la police oublie un ou deux véhicules lors de chaque manifestation majeure. De nouveaux fourgons se sont alignés devant le poste de police alors que la police anti-émeutes envahissaient les rues. Après une brève accalmie, c’est reparti ; les policiers étaient moins sûrs de l’emporter car la foule ne s’était pas simplement inclinée devant leurs matraques et leurs sprays de gaz. Les gens se sont dirigés vers les baies et ont brisé quelques vitres (on rapporte que des gens sont même entrés). D’autres ont peint des fenêtres à la bombe en escaladant le poste de police en brique, mais sur un seul étage. La police a sécurisé l’entrée du poste, mais n’a pas eu la volonté ou la capacité de disperser la foule ou de la laisser partir. Au bout d’une heure, les manifestant.e.s ont été repoussés dans les rues secondaires, mais sont retournés à plusieurs reprises dans Bridewell Street. Beaucoup ont été blessé.e.s et d’autres effrayé.e.s, mais c’était réconfortant de voir à quel point les gens s’entraidaient. Des postes de premiers secours spontanés ont été mis en place, des produits ont été partagés et les gens ont veillé à sortir les plus démunis de la zone de danger, souvent à leurs risques et périls. La bataille s’est poursuivie des heures durant et au moins un autre véhicule de police a pris feu. À 20 heures, la police demandait désespérément que des agents formés aux émeutes viennent prendre leur poste, et de nombreux agents étaient toujours dans les rues bien après minuit.

Que faut-il retenir de tout cela ?
Nous ne pouvons pas contrôler le récit des médias grand public en essayant de nous conformer ses règles. Peu importe comment nous nous comportons. Si la police nous attaque, les médias nous dépeindront comme violents. La cause la plus courante d’arrestation pour avoir agressé un policier lors d’une manifestation est d’avoir été agressé par un policier, qui a donc besoin d’une excuse.

Nous devrions être prêt.e.s à publier notre propre version des faits le plus rapidement possible, avant qu’un faux récit ne se renforce dans les heures et jours qui suivent une manifestation, mais étant donnée la domination d’une poignée de grandes entreprises médiatiques, c’est toujours un objectif difficile. Cependant, le récit médiatique est aussi prévisible que déconnecté de la situation réelle. C’est quelque chose que nous devons expliquer aux personnes avec lesquelles nous discutons. Nous connaissons la police mieux qu’un journaliste assis dans un bureau à Londres. Un journaleux qui prépare probablement une papier à succès anti-contestataire en faisant du copier-coller pour nous dénigrer au hasard de son clavier.

Nous devons espérer que quiconque partage largement… très largement… nos objectifs quant au projet de loi sur la police nous croira en dépit des dires de la presse et de la police. Cela peut demander un peu de persuasion. Toutefois, même les manifestants les plus strictement pacifistes auront pu voir leurs actions déformées dans les journaux et pourront, espérons-le, être dissuadés de partager la version de la police et des politiciens. Leur volonté d’avaler une fausse version ou leur désir de se démarquer très vite comme étant plus respectables que ceux qui «affrontent» la police peuvent les conduire à avoir le réflexe de condamner les manifestant.e.s. Cela fait tout bonnement le jeu de la police, contribue à confirmer la version fausse des événements et facilite, plus généralement, les attaques contre la contestation.

Si vous vous reconnaissez, ne faites pas ça, hein ? Je respecte les personnes qui peuvent rester là et se prendre un coup de matraque sur la tête, un coup de pied aux côtes, qui peuvent voir leur camarade se faire gazer et s’en tenir à un code personnel de pacifisme. Qui peut mettre les mains dans ses poches et ne pas aller à la baston… mais pour beaucoup de gens, la plupart d’entre nous peut-être, le fort instinct est d’empêcher les attaquants de nous blesser, nous et les personnes autour de nous. Même si cette légitime défense collective consiste à lancer un coup de poing ou un bâton.

Nous ne pouvons pas laisser une seule manifestation occuper les débats bien longtemps. Il ne s’agit pas d’une manifestation en soi, au-delà il s’agit d’un projet de loi qui énonce clairement le plan du gouvernement pour un pays beaucoup plus autoritaire. Certaines personnes voudront débattre pour savoir si la légitime défense collective contre la police a nui ou contribué à la cause, mais nous ne pouvons pas laisser cela être la question centrale. J’ai déjà vu certains dire que des manifestations violentes donneront au gouvernement une excuse supplémentaire pour faire adopter ce projet de loi, mais ce projet de loi ne concerne pas que les gens qui se battent contre les flics. Vous serez surpris d’apprendre que la police a déjà plus de pouvoir qu’elle n’en a besoin pour vous arrêter au motif que vous avez riposté contre elle. En réalité, cette loi concerne des manifestations où personne ne riposte. Cette loi provoquerait PLUS de manifestations agressives, car si une manifestation pacifique, servile et obéissante est passible de dix ans de prison, pourquoi une personne sensée ne ferait-elle pas une émeute à la place ?

Un camarade de la Fédération anarchiste de Bristol.



2. Deuxième compte-rendu. 24.03, 2021
FLEURS CONTRE MATRAQUES - SECOND ASSAUT DE LA POLICE CONTRE UNE MANIFESTATION À BRISTOL




Je n’ai jamais rien vu de tel. Nous avons été chargé.e.s en bas de la rue par la police montée et avec des chiens. Les flics, d’une violence extrême, frappaient littéralement des gens paisibles qui étaient assis, et les piétinaient. J’ai parlé à quelqu’un qui a vu une femme sur le sol se faire arracher sa veste et tirer les cheveux, ils lui ont dit de dégager en riant.

Hier, environ 150 personnes se sont rassemblées à College Green (Londres) pour protester contre le volet "intrusion" du projet de loi sur la police, la criminalité, la peine et les tribunaux. Quand les flics sont arrivés, elles ont agi exactement comme les politiciens et la presse insistaient pour qu’elles le fassent ; pas de riposte, pas de dégradation, calme et passivité. Cela n’a rien changé aux heures de violence policière que nous avons subies.

Le projet de loi comporte de nombreux éléments effroyables, l’un des pires étant la tentative de criminaliser efficacement les Tsiganes, les Roms et les Gens du voyage. Les membres de ces groupes sont déjà confrontés à une discrimination généralisée, à la violence et aux attaques contre leur mode de vie de la part du gouvernement. La nouvelle criminalisation de l’intrusion visera également les personnes habitant leur fourgonnette, dormant dans la rue, les squatteurs, les nomades, les campements de protestation et plus encore. C’est un mix de ces groupes et de leurs partisans qui se sont rendus au College Green, avec leur tente, pour manifester leur opposition et soutenir le mouvement #KillTheBill.

College Green a déjà accueilli de nombreux campements pour une nuit, axés sur l’itinérance, les problèmes de logement et les inégalités. Le propriétaire, la cathédrale de Bristol, est généralement heureux de les accueillir, à condition que tout soit propre après. Pendant les cinq premières heures, ce campement ressemblait à ceux qui l’ont précédé. C’était détendu, et malgré les messages politiques, il y avait une «ambiance de fête». La police était présente et semblait rester en retrait, mais cela ne devait pas durer.

Des infos ont commencé à circuler vers 19 h 30 selon lesquelles la police était en train de rassembler des effectifs aux alentours. Dix fourgons, puis quinze, puis vingt, puis nous avons arrêté de compter. Les marquages des fourgons montraient qu’au moins quatre forces de police étaient engagées, chacun pouvant contenir 12 agents, donc vu le nombre de personnes assises sur le Green, c’était pour le moins exagéré. À 22h30, soutenus par des unités montées, des chiens, un drone et un hélicoptère, des rangées interminables de policiers en tenue anti-émeute ont entouré le campement et bloqué les rues secondaires.

Alors que la police anti-émeute se déployait, les gens étaient assis par terre ou encore dans leurs tentes. Beaucoup y avaient levé les bras en scandant «Manifestation pacifique». Cela a été soit ignoré, soit considéré comme un signe de vulnérabilité. La police a donné l’assaut frappant les gens à la tête avec matraques et boucliers, laissant les chiens mordre les manifestants et chargeant à plusieurs reprises avec la cavalerie. Les policiers ont tout saccagé, déchirant des banderoles, détruisant des tentes et piétinant même le mémorial à Sarah Everard et à d’autres femmes assassinées.

Et puis ça a été le chaos. La police a crié des ordres contradictoires, de nombreux manifestants ont été emmenés dans des ambulances et la police a procédé à des arrestations aléatoires. Des groupes de manifestants ont été poussés dans diverses directions. 50 personnes se sont retrouvées encerclées sur Deanery Road. Dans l’espoir d’un sursis, ils se sont rassis, scandant "Manifestation pacifique", "Honte à vous", et "Voici à quoi ressemble un État policier". Elles ont une fois de plus subi une charge de chevaux, suivis rapidement de coups de matraques. Ce schéma se répétait tout au long de la route, les manifestants s’arrêtaient pour s’asseoir et déposaient même des fleurs, la police répondait avec violence. Au petit jour, les rues étaient vides, les derniers manifestant.e.s ayant été arrêtés un à un, emmenés à l’hôpital ou dispersés dans la nuit.

La couverture de la manifestation dans la presse a été beaucoup plus équilibrée cette fois-ci. Il y a plusieurs raisons à cela. En partie parce qu’en absence de riposte des manifestant.e.s, il n’y a pas de photos sensationnelles d’incendies ou de vidéos de manifestant.e.s enfonçant les lignes de police. Un autre élément décisif est sans doute la manière dont la police a traité les journalistes. Des journalistes de The Cable et de Bristol sont harcelé.e.s 24h / 24 et 7j / 7 par la police alors qu’ils ont clairement signalé leur statut de journalistes. Certains médias essaieront toujours de donner une tournure pro-police ou faussement neutre aux choses, par exemple la BBC qui avait initialement déclaré `` c’était pacifique avant l’arrivée de la police ’’, puis a supprimé son tweet et sa vidéo.

Ce nouveau projet de loi est dangereux non seulement parce qu’il donne à la police de nouveaux pouvoirs juridiques. L’absence de pouvoirs légaux ne les a jamais empêchés d’opérer des arrestations massives illégales, d’exercer des violences illégales et de détourner les pouvoirs existants. Je les ai vus utiliser la loi anti-manifestations existante pour limiter l’espace d’une manifestation en déclarant à cinq personnes sur le bord de la route avec leurs pancartes, qu’elles constituaient un risque de «graves troubles publics, de graves dommages matériels ou de graves perturbations de la vie de la communauté». Ce projet est dangereux parce qu’il définit clairement la façon, pour le gouvernement, de mettre au pas le pays et pour la police de lui permettre de le faire. Ils veulent créer un cauchemar autoritaire. Pour les stopper, nous devons nous unir et les défier, que le projet de loi soit adopté ou non, nous devons continuer de les défier ensemble.

Il y a de nombreuses tactiques et actions possibles, quoi que nous choisissions, il est clair que la police et le gouvernement sont prêts à répondre à toute manifestation efficace avec une violence extrême. Nous devons être résilient.e.s, solidaires, intelligent.e.s et préparé.e.s à tout. Comme un manifestant nous l’a dit hier soir "Ce n’est pas la fin, c’est le début".

Nous avons vu passer des appels anonymes pour une autre manifestation #KillTheBill ce vendredi 26 mars à 16 heures à College Green.

Article rédigé par l’un des membres de la Fédération anarchiste de Bristol.


PAR : Anarchist Federation Bristol
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