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par Le Furet • le 10 février 2020
La solution qui marche à tous les coups
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article extrait du Monde libertaire n° 1813 de janvier 2020
Ce qui est embêtant avec la non-violence, c’est qu’elle est contre-intuitive. Quand on est révolté, quelle qu’en soit la raison, l’instinct ne porte pas vers la non-violence mais plutôt à la violence.
Ce qui est embêtant avec la violence, c’est qu’elle est toujours un engrenage. Á la fin, c’est le plus fort qui l’emporte mais le plus fort n’est pas forcément celui qui a raison : il est simplement le plus fort, physiquement ou militairement, ce qui n’a rien à voir.
On peut s’inspirer d’idéologues plus ou moins anciens, on peut aussi regarder l’actualité, les événements qui, ici ou là, posent la question de la violence et de la non-violence.
On peut lire ainsi dans un quotidien : « Pour certains Iraniens, le saccage est l’œuvre des éléments liés au pouvoir qui cherchent ainsi à justifier sa réponse violente, tandis que d’autres y voient la colère des couches défavorisées dont la situation s’est sensiblement dégradée ces dernières années. » [note] On est dans une ambiguïté sans solution. Le plus vraisemblable est que, comme souvent, les deux interprétations correspondent à la réalité. Et après ? Concrètement, qui est en train de gagner la bataille ? Bien sûr, celui qui l’emporte est celui qui est le plus fort militairement. Et la prochaine fois ? Ce sera pareil, évidemment.
On peut aussi voir (et approuver) les vendredis algériens : la non-violence des manifestations dérange au plus au point le pouvoir qui ne peut réprimer massivement le mouvement comme il le souhaiterait pour le faire stopper. Soit dit en passant, il dérange aussi les néocoloniaux plus ou moins racistes qui ne s’imaginent pas les Algériens capables d’une telle mobilisation, avec une telle discipline et une telle lucidité politique. Le « printemps arabe » n’avait pas touché l’Algérie, les Algériens n’étaient pas prêts à subir une répression féroce. Puis l’heure est venue d’une maturité politique suffisante pour faire entendre une voix en opposition à la mafia au pouvoir. Si les manifestations sont non-violentes, ce n’est pas pour autant que les propos qui y sont tenus ne sont pas violents. Ils dénoncent le système et ses perversités, ils lui tendent un miroir et d’une certaine manière, on peut dire que l’image reflétée est une violence. N’est-elle pas légitime ?
Toutes ces situations sont du point de vue de la dialectique violence/non-violence tout à fait ordinaire. C’est ce que l’on voit depuis toujours... Sauf qu’en terme de stratégie, il peut aussi y avoir un au-delà de ce jeu malheureusement banal et régulièrement perdant – excepté, heureusement, quelques cas ponctuels – pour les partisans de l’émancipation. C’est ce qui se passe quand on quitte le contexte démocratique. Dans le cas de la France, il semble bien qu’une période nouvelle soit engagée depuis quelques années. Les manifestations habituellement considérées comme « pacifistes », c’est quasiment fini. Même quand la non-violence fait explicitement partie de la motivation des manifestants, comme c’est le cas avec Extinction-Rébellion, cela n’empêche pas les lacrymogènes et les gazages à bout portant. En effet, les policiers ont ordre de réprimer violemment n’importe quel manifestant et en même temps les médias les plus importants soutiennent la communication du gouvernement et jouent le jeu du « il n’y a pas de violence policière ». Un certain atavisme laisse penser que la démocratie est gravée dans le marbre et non susceptible d’évoluer dans ses fondements. Quel est le meilleur mode de résistance dans ce contexte ? La violence ou la non-violence ?
On a aussi beaucoup parlé récemment des violences conjugales... La riposte violente est-elle une solution ? La non-violence en est-elle une ? Les hommes et les femmes violents sont-ils prêts à entendre que leur violence est inadaptée à un contexte qui n’est pas sado-maso ? Les victimes sont-elles prêtes à faire face, seules ? Et après ? Depuis toujours les anarchistes clament que la répression n’est pas une solution à un problème de société mais seulement un moyen de faire taire certaines personnes durant un certain temps.
Entre la violence et la non-violence, beaucoup ont fait leur choix, avec divers arguments, plus ou moins de bonne foi, chose que montre bien un petit livre paru récemment [note] . Dans un monde violent, si on veut gagner, il faut simplement choisir le camp des vainqueurs c’est-à-dire celui du capitalisme. L’autre solution, celle de l’espoir, de la recherche, de la construction d’un autre monde, non fondé sur le capitalisme, n’a pas de stratégie qui marche à tous les coups. Il est bien évident que sinon nous ne serions pas encore en train d’en discuter. Elle a simplement des erreurs à éviter, mais les acteurs ne le souhaitent ou ne le savent pas toujours.
Ce qui est embêtant avec la violence, c’est qu’elle est toujours un engrenage. Á la fin, c’est le plus fort qui l’emporte mais le plus fort n’est pas forcément celui qui a raison : il est simplement le plus fort, physiquement ou militairement, ce qui n’a rien à voir.
On peut s’inspirer d’idéologues plus ou moins anciens, on peut aussi regarder l’actualité, les événements qui, ici ou là, posent la question de la violence et de la non-violence.
On peut lire ainsi dans un quotidien : « Pour certains Iraniens, le saccage est l’œuvre des éléments liés au pouvoir qui cherchent ainsi à justifier sa réponse violente, tandis que d’autres y voient la colère des couches défavorisées dont la situation s’est sensiblement dégradée ces dernières années. » [note] On est dans une ambiguïté sans solution. Le plus vraisemblable est que, comme souvent, les deux interprétations correspondent à la réalité. Et après ? Concrètement, qui est en train de gagner la bataille ? Bien sûr, celui qui l’emporte est celui qui est le plus fort militairement. Et la prochaine fois ? Ce sera pareil, évidemment.
On peut aussi voir (et approuver) les vendredis algériens : la non-violence des manifestations dérange au plus au point le pouvoir qui ne peut réprimer massivement le mouvement comme il le souhaiterait pour le faire stopper. Soit dit en passant, il dérange aussi les néocoloniaux plus ou moins racistes qui ne s’imaginent pas les Algériens capables d’une telle mobilisation, avec une telle discipline et une telle lucidité politique. Le « printemps arabe » n’avait pas touché l’Algérie, les Algériens n’étaient pas prêts à subir une répression féroce. Puis l’heure est venue d’une maturité politique suffisante pour faire entendre une voix en opposition à la mafia au pouvoir. Si les manifestations sont non-violentes, ce n’est pas pour autant que les propos qui y sont tenus ne sont pas violents. Ils dénoncent le système et ses perversités, ils lui tendent un miroir et d’une certaine manière, on peut dire que l’image reflétée est une violence. N’est-elle pas légitime ?
Toutes ces situations sont du point de vue de la dialectique violence/non-violence tout à fait ordinaire. C’est ce que l’on voit depuis toujours... Sauf qu’en terme de stratégie, il peut aussi y avoir un au-delà de ce jeu malheureusement banal et régulièrement perdant – excepté, heureusement, quelques cas ponctuels – pour les partisans de l’émancipation. C’est ce qui se passe quand on quitte le contexte démocratique. Dans le cas de la France, il semble bien qu’une période nouvelle soit engagée depuis quelques années. Les manifestations habituellement considérées comme « pacifistes », c’est quasiment fini. Même quand la non-violence fait explicitement partie de la motivation des manifestants, comme c’est le cas avec Extinction-Rébellion, cela n’empêche pas les lacrymogènes et les gazages à bout portant. En effet, les policiers ont ordre de réprimer violemment n’importe quel manifestant et en même temps les médias les plus importants soutiennent la communication du gouvernement et jouent le jeu du « il n’y a pas de violence policière ». Un certain atavisme laisse penser que la démocratie est gravée dans le marbre et non susceptible d’évoluer dans ses fondements. Quel est le meilleur mode de résistance dans ce contexte ? La violence ou la non-violence ?
On a aussi beaucoup parlé récemment des violences conjugales... La riposte violente est-elle une solution ? La non-violence en est-elle une ? Les hommes et les femmes violents sont-ils prêts à entendre que leur violence est inadaptée à un contexte qui n’est pas sado-maso ? Les victimes sont-elles prêtes à faire face, seules ? Et après ? Depuis toujours les anarchistes clament que la répression n’est pas une solution à un problème de société mais seulement un moyen de faire taire certaines personnes durant un certain temps.
Entre la violence et la non-violence, beaucoup ont fait leur choix, avec divers arguments, plus ou moins de bonne foi, chose que montre bien un petit livre paru récemment [note] . Dans un monde violent, si on veut gagner, il faut simplement choisir le camp des vainqueurs c’est-à-dire celui du capitalisme. L’autre solution, celle de l’espoir, de la recherche, de la construction d’un autre monde, non fondé sur le capitalisme, n’a pas de stratégie qui marche à tous les coups. Il est bien évident que sinon nous ne serions pas encore en train d’en discuter. Elle a simplement des erreurs à éviter, mais les acteurs ne le souhaitent ou ne le savent pas toujours.
PAR : Le Furet
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