Le prolétariat à l’assaut du sport capitaliste

mis en ligne le 19 juin 2014
1745boycottcoupedumondeNous, collectif Boycott de la Coupe du monde, nous sommes réunis autour de la volonté de briser le consensus national sur cet événement. Nous n’irons pas à la Coupe du monde et nous nous opposerons par tous les moyens à cette grande fête du s port au service des riches et du nationalisme. Car c’est bien de cela dont il s’agit, une guerre aux pauvres des plus brutales et un nationalisme des plus grossiers.

La guerre aux pauvres
Ce que nous appelons « guerre aux pauvres », c’est l’ensemble des mesures, des politiques et des actes qui sont entrepris pour museler la contestation et aseptiser le pays. Nous justifions le terme de « guerre » par le fait qu’elle est menée par les forces armées, qui n’hésitent pas à user de violence, ni même à tirer à balles réelles, détruire des maisons, jeter les opposants en prisons pour de nombreuses années… Et ceci vise, au maximum, la disparition et, sinon, l’asservissement total des classes populaires.
Cette guerre prend des formes diverses. Parlons spécifiquement de ce qu’il se passe actuellement au Brésil, même si on observe de tels faits lors de tout événement sportif de grande ampleur, et pas uniquement, d’ailleurs. En amont de la Coupe du monde, de nombreuses expulsions de logements ont été entreprises. Il y a actuellement 170 000 familles qui ont vu leurs habitations détruites. Ce nombre devrait s’élever à 250 000 dans deux ans au moment des Jeux olympiques de 2016. Ces expulsions sont bien entendu largement contestées, d’autant plus que la police procède de façon hyperviolente, n’hésitant pas à tirer sur ceux qui essaient de récupérer des affaires dans leur maison.
Pour faire face à la contestation, plus de 170 000 agents de sécurités ont été mobilisés, dont 57 000 militaires. Les policiers bénéficient d’une totale impunité, étant donné que les lois antiterroristes s’étendent de jour en jour, criminalisant la moindre réaction face à l’arbitraire. Pour ne donner qu’un exemple, la police sera autorisée à tirer sur tout individu qui « entrave une voie d’accès à la Coupe du monde ». Ainsi, ils ont le droit de tuer tout manifestant.
Cette guerre aux pauvres est au service des riches. Ce sont les multinationales privées qui profitent de tous les bénéfices engendrés, et dictent leurs lois par la même occasion. Ce n’est pas une métaphore, la Fifa force vraiment les pays d’accueil à ne faire payer d’impôts ni à elle-même ni à aucun de ses partenaires, à construire sur les fonds publics et, par exemple, à libéraliser la prostitution. Ce dernier point a pour conséquence d’engraisser les réseaux mafieux qui se préparent déjà en ouvrant des maisons closes qui, bien qu’interdites, s’affichent au grand jour sur les panneaux publicitaires. Ils préparent aussi une importante prostitution infantile aux abords des stades dans plus d’une douzaine de villes.
L’État a engagé d’énormes dépenses publiques pour la construction de stades et autres structures. Sous la pression de la Fifa, elle a dû en plus rénover les stades déjà existants. Cette Coupe du monde aura coûté quinze fois plus que la précédente en Afrique du Sud, et pour construire des stades qui ne serviront qu’une seule fois. De plus, les bénéfices des billets d’entrées ne reviendront pas au Brésil mais aux entreprises privées partenaires de la Fifa. La Fifa fait en moyenne 2 milliards de profits par Coupe du monde, et il se peut que ceux-ci soient encore plus importants cette année.
Les entreprises de construction ne font aucun cas de la sécurité des ouvriers, sous le regard complice de l’État brésilien, ce qui a mené à la mort de nombreux ouvriers sur les chantiers.

Le nationalisme exacerbé
Nous avons parlé des aspects spécifiques à cette Coupe du monde parce que le Brésil ne fait aucun cas des droits de l’homme, comme l’a signalé Amnesty International. Mais il ne serait pas pour autant juste de dire que la Coupe du monde serait acceptable dans un pays plus démocratique.
Toutes les rencontres sportives internationales sont prétexte au nationalisme le plus débridé. Il semble normal à ces moments de soutenir son pays coûte que coûte, brandir fièrement son drapeau national et brailler l’hymne de son pays en insultant les autres. Il est aussi acceptable après une défaite de fustiger l’arbitre, l’entraîneur, le temps ou l’alignement des étoiles. On préfère généralement cela au fait de reconnaître que l’équipe adverse était meilleure. Cette frénésie patriotique touche même les individus pourtant assez peu sensibles à l’identité nationale.
Cette exacerbation d’une supposée identité partagée le temps d’une Coupe du monde mène à une « union sacrée ». Pendant un temps il est inenvisageable de critiquer « les Bleus » ou même simplement le fonctionnement de la société. Au dire des médias et des politiques, on oublie tous un peu nos soucis pendant la Coupe et on s’unit tous derrière un même drapeau. Alors, il n’est plus question de lutte des classes ou même de mouvements sociaux. Quand bien même il y en aurait durant cette période, personne ne relaierait les infos. Même Platini demande aux Brésiliens d’avoir la décence de respecter la Coupe du monde et de cesser leurs manifestations.
C’est aussi l’occasion de voir des prolétaires de différentes nationalités, qui ont dépensé deux mois de salaire chacun pour faire le déplacement, s’affronter dans les stades, parfois violemment, alors même que c’est dans la rue, aux côtés des Brésiliens, qu’ils pourraient véritablement défendre leurs intérêts.
Nous sommes révolutionnaires et anarchistes, nous n’accepterons jamais que, sous couvert de beauté sportive, le peuple soit mutilé et exploité. Nous affirmons tout notre soutien au prolétariat brésilien dans ses luttes contre la domination d’un État autoritaire et nationaliste. Pour toutes ces raisons, nous appelons au boycott de la Coupe du monde sous toutes ses formes, de la Fifa et de ses partenaires. Nous soutiendrons toutes les actions destinées à empêcher son bon déroulement­­­, que ce soit au Brésil, en France ou ailleurs.



Collectif Boycott de la Coupe du monde
boycottdelacoupedumonde. net