Arrêtez le massacre !

mis en ligne le 24 janvier 1991
Jusqu’à la dernière seconde, avant l'expiration de l'ultimatum, nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir pour empêcher la guerre entre l'Irak et le « reste du monde ». Fous, nous avons affirmé haut et clair :
- que l'annexion du Koweït, par l'Irak, si elle devait être dénoncée, combattue et annihilée devait l'être par le seul embargo économique et technologique, dont chacun connaît l'efficacité à moyen et long terme ;
- que le recours à la force contre l'Irak n'avait aucune légitimité, dès lors que des situations semblables (Hongrie 1956, Prague 1968, occupation de la Palestine par Israël, l'occupation du Liban par la Syrie et Israël, le génocide des Kurdes, les interventions soviétiques dans les pays baltes...) n'avaient pas fait l'objet d'un tel choix ;
- que l'intolérable du régime fasciste de Bagdad et de ses agissements de toujours ne devaient pas faire oublier la responsabilité qui incombe à un Occident, qui à l'occasion de la décolonisation a tiré sur l'histoire des traits frontaliers au gré de ses seuls intérêts économiques et politiques et qui ensuite a cautionné et surarmé les régimes fascistes et féodaux qu'il a installé ou laissé s'installer au pouvoir.
Aujourd'hui, après le déclenchement tu conflit, il va bien nous falloir continuer à dénoncer une logique de guerre qui plonge ses racines dans la mise en place d'un nouvel ordre international dominé par le Nord, dans la restructuration d'une économie qui a besoin de la guerre pour se refaire une santé et dans l'être profond d'un système capitaliste qui se nourrit de l'oppression de l'homme par l'homme.
Mais, il va également nous falloir nous opposer à cette guerre. Pour l'heure, on nous dit que la guerre sera courte, qu'elle ne touchera pas les appelés et quelle n'aura que peu de conséquences sur notre économie et notre vie de tous les jours. Voire ! Le Panama, qui n'est pas l'Irak, a tenu des semaines... Les réservistes commencent à être recensés et répertoriés au cas où...
Quoi qu’il en soit, que cette guerre soit courte ou longue ; qu'elle ait ou non des conséquences économiques et sociales ; qu'elle ne concerne que des professionnels, ou bien qu'elle aspire le contingent... une chose est sûre, si nous ne dégustons pas aujourd'hui, nous dégusterons demain !
Car, qu'on ne s'y trompe pas, la guerre ne réglera rien sur le fond. Et la poudrière moyen-orientale, tôt ou tard, s'embrasera de nouveau.
Dans ces conditions, en face d'une guerre inutile, car elle ne résout rien... illégitime, car elle s'inscrit dans le cadre d'un « deux poids, deux mesures » inacceptable... criminelle, car elle va faire passer la faucheuse chez les populations koweïtiennes et irakiennes, qui ne sont pas responsables des actes de leurs dirigeants... antidémocratique, car elle va aller à l'encontre de 65% de l'opinion publique... la réponse doit être claire : le cas échéant, les appelés doivent refuser de partir, les réservistes ne doivent pas répondre aux injonctions qui leur sont faites, les travailleurs doivent s'abstenir d’œuvrer pour la guerre. Mieux, cette logique du refus doit se transformer en une dynamique de rupture, visant à mettre bas et le capitalisme et l'État. Car, il faut le savoir, la paix entre les peuples - que seul un socialisme libertaire est à même de promouvoir - ne fera pas l'économie d'une « guerre de classes », ici, au Koweït, en Irak et ailleurs. Et c'est bien pour éviter cette guerre là que les « maîtres du monde » du moment cherchent à nous envoyer en faire une autre.