La LDH nous écrit...

mis en ligne le 4 janvier 2004

Chers amis,

J'ai eu connaissance de l'[article publié dans votre numéro daté du 16 au 22 octobre 2003 consacré à la grève de la faim des sans-papiers de Lille et rédigé par Bertrand Dekoninck- art1696].

Nous pouvons avoir des divergences d'appréciations sur telle ou telle analyse politique, par exemple sur l'ouverture totale des frontières aujourd'hui, mais est-il nécessaire de traîner ses contradicteurs dans la boue et travestir la réalité ?

Bertrand Dekoninck écrit que nous nous sommes « couchés » devant le pouvoir socialiste en 1997 à propos de la loi Chevènement, que nous nous sommes « terrés » lors du vote de la loi sur la sécurité quotidienne présentée par Daniel Vaillant.

Nous n'avons pas eu la même analyse que l'auteur de ces lignes quant à la loi Chevènement. Mais, nous n'avons cessé d'en dénoncer les béances, les conditions d'application et l'absence de régularisation des sans-papiers. Je veux croire que vous n'avez pas oublié qu'avec le MRAP et quelques personnalités, nous avons organisé un tour de France au soutien des sans-papiers pour demander leur régularisation. Je veux croire aussi que vous n'avez pas oublié notre action avec d'autres contre la double peine à propos de laquelle nous ne considérons pas qu'elle ait été abolie, loin de là, par la dernière loi Sarkozy.

Je ne puis, enfin, laisser sans réponse le fait que nous ayons laissé passer sans rien dire la loi Vaillant sur la sécurité quotidienne. La LDH a été la seule, ou presque, à mener combat sur ce terrain en provoquant une réunion d'urgence de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (en trois jours, cela ne s'était jamais produit), en exigeant une saisine du Conseil constitutionnel et en alertant toutes les organisations. Notre affrontement avec le gouvernement a été, sur ce point, total. Il ne s'agit donc pas là d'une divergence d'analyse mais d'une accusation purement et simplement erronée.

J'en profite pour dire combien je regrette que, de manière générale, les débats dans l'ensemble du mouvement social, prennent un tour aussi agressif et aussi caricatural. Ce dont nous avons besoin, c'est de reconstruire une alternative politique, chacun selon ses fonctions, et non de décréter que l'autre a tort ou est un « social traître ».

J'espère que vous donnerez connaissance de ce courrier à vos lecteurs. Bien cordialement.

Michel Tubiana