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par Front féministe le 5 juillet 2022

Ukraine : le corps des femmes comme champ de bataille

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Article extrait du Monde libertaire n° 1840 de juin 2022



« Portrait mural ». photographie de Funemanka

La guerre permet l’expression la plus désinhibée de la violence masculine. L’oppression viriliste et destructrice du patriarcat s’y déploie sans frein. Les femmes et les enfants, qui en temps dit « de paix » subissent des violences machistes individuelles, sont alors traité·es globalement comme des objets, des marchandises, des déchets.
Depuis des années, des opposantes féministes aux dictatures, telles les FEMEN ukrainiennes, avaient donné l’alerte. Elles voyaient juste…
Décidée par un Vladimir Poutine obsessionnel de la virilité, l’invasion de l’Ukraine le 24 février 2022 se poursuit par une guerre de conquête. Comme en Tchétchénie ou en Syrie, l’armée russe massacre des civil·es. Elle pilonne des villes et bombarde des lieux abritant des femmes et des enfants vulnérables, des maternités, des hôpitaux.
Des millions de personnes ont fui les zones d’Ukraine bombardées : 90 % sont des femmes et des enfants. La moitié de celles qui ont quitté le pays ont moins de 18 ans.

Violence des armes, violences sexuelles.
Comme dans toutes les guerres,
le corps des femmes est un champ de bataille.


Le viol comme arme de guerre
De tout temps, les viols systématiques de femmes et d’enfants ont été inséparables des guerres. Depuis les années 1990, avec les conflits dans l’ex-Yougoslavie, le génocide des Tutsis par les Hutus au Rwanda et les atrocités commises au Kivu, ils sont considérés par la justice internationale comme des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité. En Ukraine, comme dans le Donbass depuis 2014, la cruauté délibérée de soldats russes ou tchétchènes exerçant des sévices sexuels relève d’une stratégie visant à terroriser la population, à la traumatiser durablement, en inscrivant dans sa chair le viol de la nation : c’est une guerre dans la guerre, nourrie par la haine des femmes, assimilant dans la même agression le corps de l’autre et sa terre.

Location de ventres et trafic d’enfants

Des reportages ont montré des couples éplorés affluant en Ukraine pour récupérer leur commande : un·e enfant pas encore sorti·e de l’utérus loué ; on présente comme des victimes des personnes qui enfreignent la loi de leur pays, et exploitent la détresse financière de femmes amenées à louer leur utérus.
La situation d’Ukrainiennes enceintes pour d’autres est devenue inextricable : l’agence qui a négocié leur mise en relation avec le couple acheteur étranger leur interdit de quitter le pays, car ce serait une violation de leur contrat ; si les commanditaires financent leur voyage, ces femmes vont accoucher dans un pays dont la loi interdit la location de ventres.

Trafic de chair fraîche
Dans les gares et aux postes frontières, des proxénètes, appartenant à des réseaux mafieux ou agissant pour leur propre compte, abusent de la détresse et de l’épuisement de réfugiées fuyant la guerre. Se mêlant aux bénévoles qui offrent aide et solidarité, ils proposent transport, hébergement, emploi à de jeunes femmes démunies, qui sont victimes de racket, d’enlèvement, de travail forcé, de violences sexuelles, de traite d’êtres humains à des fins de prostitution ou de pornographie.
Ces criminels s’alignent sur la demande : sur les sites de rencontres et les sites pornographiques, les recherches ayant pour mots-clés « femme ukrainienne » se sont multipliées.

Accueil dans les pays voisins
Ayant quitté précipitamment leur foyer, des millions de femmes et d’enfants sont dépourvu·es de tout, et leur survie est entravée par des traumatismes. Des bénévoles les aident matériellement et psychologiquement.
D’autres femmes, prises en otages par la guerre, ne peuvent quitter le pays : elles survivent dans des caves, sont restées dans des fermes, s’occupent de personnes âgées, de malades, d’enfants.
Des Ukrainiennes enceintes à la suite de viols ne peuvent avorter en Pologne, où la loi l’interdit ; même si on les y autorisait, le personnel compétent manque.
Depuis longtemps, des féministes demandent que soit inscrit dans le droit européen le droit à l’avortement de toutes les femmes ; c’est aux femmes, et aux femmes seulement, de décider si elles veulent poursuivre une grossesse.

Solidarité féministe internationale
Nous, féministes universalistes, affirmons notre solidarité avec le peuple ukrainien victime de l’agression russe, et dénonçons les violences spécifiques dont sont victimes les femmes et les enfants.
Nous saluons le courage des résistant·es ukrainien·nes et aussi des Russes qui s’opposent à la dictature de Vladimir Poutine et à la guerre qu’il mène contre l’Ukraine.
Nous demandons que tous les moyens diplomatiques soient mis en œuvre pour que cessent cette guerre et ces atrocités.
Nous demandons à la justice internationale de punir les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis en Ukraine.


Front Féministe. 58 associations de 7 pays. 9 mai 2022.
PAR : Front féministe
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