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par Groupe Salvador-Seguí le 12 novembre 2018

Loi Elan : Haro sur le droit au logement

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Le 16 octobre dernier était définitivement adopté le projet de loi ELAN (Evolution du Logement, de l’Aménagement et du Numérique), après le vote solennel des députés. Si le texte a depuis pris un retard inattendu en étant renvoyé dans les mains du Conseil constitutionnel, il n’en reste pas moins que le risque de voir ce texte entrer dans le droit commun continue de planer au-dessus de nos têtes. Passé plutôt inaperçu du fait d’un certain silence médiatique sur la question, mais aussi en raison de sa forte complexité technique, ce projet de loi a pourtant de quoi inquiéter.
Inscrite dans la droite ligne des réformes conduites par les différents gouvernements Macron depuis l’arrivée de celui-ci à la tête de l’Elysée, la loi Elan fait une fois de plus la part belle aux possédants. Non contente d’avoir rogné sur les droits des travailleuses et des travailleurs avec la loi Travail XXL, d’avoir démoli le statut cheminot, ou d’avoir sacrifié nombre de nos libertés individuelles sur l’autel du tout-sécuritaire et de la lutte contre le terrorisme, la classe politique s’en prend désormais au droit au logement. Ce nouveau projet de réforme vient en effet fragiliser les locataires, squatteurs et autres occupants sans titre, et ce, tout en répondant aux demandes et intérêts du lobby du bâtiment et de la finance. Il faut dire que pour le gouvernement, il faut préparer le terrain des JO de 2024 pour les promoteurs immobiliers de tout poil qui se frottent déjà les mains devant les juteux profits qui, avec l’afflux de touristes, se profilent.
Ainsi, ce texte de loi vient dans un premier temps faciliter la chasse aux squats en faisant sauter quelques-unes des dernières protections juridiques. Le délai entre le commandement de quitter les lieux et l’expulsion auparavant fixé à deux mois se trouverait dès lors supprimé si un juge le décide. Exit aussi pour les squatteurs, la « protection » de la trêve hivernale entre le 1er novembre et le 31 mars. De même, ce projet de loi franchit un nouveau palier dans la répression des occupants sans titre en ouvrant la voie à leur pénalisation.
Mais le projet de loi « Elan » s’attaque également aux locataires pas assez solvables aux yeux des propriétaires. Si les procédures d’impayé peuvent d’ores et déjà se conclure par des procédures d’expulsion, le passage de l’un à l’autre va s’accélérer. Pour ceux qui pourront reprendre le paiement des loyers, une période probatoire de deux ans s’ouvrira, au cours de laquelle, en cas de nouvel impayé, l’expulsion pourra être immédiate. Le gouvernement accentue donc encore la pression sur les plus précaires les plus fragiles, dans un contexte de développement du chômage et surtout de précarisation du marché de l’emploi. En bref, avec la loi « Elan » c’est une période inédite d’expulsions massives qui se profile pour les prochaines années.
Autre attaque significative contenue dans ce texte de loi, l’instauration d’un bail de trois ans pour les locataires de HLM et ce, au détriment d’un bail auparavant à durée indéterminée. Par cette manœuvre législative, la classe politique aux manettes dynamite le principe essentiel de maintien dans les lieux. Parallèlement, le texte organise encore un peu plus le démantèlement du parc locatif social. Le gouvernement a ainsi prévu de vendre 40 000 logements sociaux par an afin de renflouer les caisses des bailleurs sociaux, bien mises à mal par la baisse des APL et des dotations de l’État. Les logements sociaux vendus resteront maintenant 5 ans dans le parc social au lieu de 10 ans précédemment. De plus, la vente se fera en « bloc d’immeubles » puis la revente, à la découpe. En outre, ces ventes qui se faisaient par le passé au détail, risquent de sérieusement s’accélérer dopant par là même la spéculation immobilière. Le processus a déjà été enclenché notamment à Clichy-la-Garenne où des locataires d’HLM ont vu leur appartement préparé à être mis en vente alors qu’ils y logeaient encore.
Plus généralement, ce projet de réforme porté par le gouvernement regorge de dispositions synonymes de recul social en matière de droit au logement, comme par exemple celle qui met fin aux 100% de logements neufs accessibles aux personnes handicapées.
Il n’y a rien à attendre du Conseil constitutionnel et de son jugement. Le logement constitue l’ultime lieu de refuge et de stabilité d’un individu, aussi, le droit à avoir un toit au-dessus de sa tête doit-il être un droit inaliénable, garanti pour toutes et tous. Il est plus que temps de réclamer la réquisition effective des logements vides et la conversion du grand nombre de bureaux vides en appartements (à Paris, banques et assurances sont propriétaires d’un impressionnant parc immobilier), d’obliger les mairies à respecter les quotas de construction d’habitat social, et d’annuler les dettes locatives des locataires et des familles insolvables.
Et pour obtenir ce minimum de mesures plus qu’urgentes, n’oublions pas que tout ce que nous avons gagné jusqu’à présent c’est par nos luttes et nos mobilisations. Pas question de tergiverser ; poursuivons et amplifions ici et partout, le combat pour un logement digne, pérenne, sans condition aucune pour toutes et tous.
Groupe Salvador-Seguí
Paris, le 08 novembre 2018

PAR : Groupe Salvador-Seguí
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